« A demain pour relever les défis de l’économie française dans cette période si difficile » écrivait Emmanuel Moulin le 1er novembre dans un tweet en réponse à Agnès Benassy- Quéré, chef économiste du Trésor, qui lui souhaitait la bienvenue dans sa Maison d’origine sur le même réseau social.
C’est dans un contexte de crise exceptionnel, en effet, qu’Emmanuel Moulin, jusqu’à présent directeur de cabinet de Bruno Le Maire, a pris la direction du Trésor le 2 novembre. Il succède ainsi à Odile Renaud-Basso, qui avait été désignée le 10 août dernier à la tête de la BERD (Banque européenne pour la reconstruction et le développement). Il sera remplacé à la tête du cabinet de Bruno Le Maire par l’actuel directeur adjoint du Trésor, Bertrand Dumont.
Cet énarque surdiplômé (Science-Po, Essec, Université Paris II, Ena…) bénéficie toutefois d’une expérience solide de la gestion de crise : à la tête du cabinet du ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, il a été aux premières loges pour suivre dans les moindres détails l’élaboration du plan de soutien à l’économie mis en place lors du premier confinement, puis du plan de relance (et son volet Export) présenté par le Premier ministre en septembre.
Il est aussi un haut fonctionnaire issue de la Maison Trésor, avec un parcours enrichi par des passages à des postes internationaux, dans les cabinets ministériels et le secteur privé.
Cabinets ministériels et secteur privé
Emmanuel Moulin rejoint la direction générale du Trésor en 1996 comme adjoint au bureau Transports, puis au bureau Trésorerie politique et monétaire de 1998 à 2000. Il se dotera d’une expérience internationale comme administrateur suppléant de la Banque mondiale à Washington puis Secrétaire général du Club de Paris -enceinte où se traite les problème d’endettement publics bilatéraux- de 2003 à 2005.
Commence alors un passage dans le secteur bancaire privé avec sa nomination, en 2006, comme banquier senior chez Citigroup, en charge du secteur public pour la France et la Belgique. Il occupera par la suite plusieurs fonctions dirigeantes dans des groupes privés comme Eurotunnel, dont il a été directeur général adjoint puis directeur général délégué (2012-2015), puis Mediobanca, dont il a été directeur général (2015-2017).
Mais entre-temps, Emmanuel Moulin, à qui l’on prête d’anciens penchants rocardiens dans ses années Science Po, fera une halte prolongée dans les coulisses du pouvoir plus à droite : en 2007, comme directeur adjoint de cabinet de Christine Lagarde, alors ministre de l’Économie, des finances et de l’industrie du Premier ministre François Fillon, où il s’occupe des dossiers macro-économiques, financiers et des affaires européennes et internationales ; et de juin 2009 à mai 2012 comme conseiller économique du président de la République de l’époque, Nicolas Sarkozy.
A cette époque, il fait l’apprentissage aux premières loges des effets économiques d’une première grande crise mondiale, financière celle-là, celle de 2008-2009, causée par l’éclatement de la bulle des subprimes et la faillite de la banque américaine Lehman Brothers.
On note aussi qu’il croise à cette époque Christophe Lecourtier, actuel directeur général de Business France, qui a dirigé le cabinet de Christine Lagarde ministre du Commerce extérieur puis ministre de l’Economie et des finances.
Ce n’est qu’après un nouveau passage dans le privé qu’il retrouvera la direction d’un cabinet ministériel avec sa nomination, en mai 2017, à la tête de celui de Bruno Le Maire, ancien candidat à la présidence de la République rallié à Emmanuel Macron.
A la tête du Trésor, administration clé pour la politique économique et financière, qui a la haute main sur les instruments financiers de la politique de soutien au Commerce extérieur, Emmanuel Moulin restera donc aux premières loges pour imaginer et mettre en œuvre les réponses à une crise économique causée par une crise sanitaire sans précédent, dont on commence à peine à mesurer les effets économiques.
Christine Gilguy