Après un fort repli de la consommation des ménages et de l’investissement, l’économie britannique a renoué avec la croissance, son PIB a ainsi progressé de 1,7 % en 2013 et l’assureur-crédit Coface table sur une accélération de la croissance cette année à + 2,7 %, les indicateurs de confiance des ménages et des entreprises étant bien orientés à fin mai 2014.
« La confiance des ménages est réorientée à la hausse. Les ménages ont confiance dans l’économie et ils consomment », a indiqué Paul Chollet, économiste spécialiste de la Grande-Bretagne chez Coface, le 12 juin lors d’un point presse. En 2013, la reprise de la consommation a été soutenue par une baisse du taux de chômage. « La courbe de l’emploi s’est améliorée fortement en 2013 », a-t-il ajouté. Selon les dernières estimations, le taux de chômage au Royaume-Uni a baissé d’un point depuis un an et est passé sous le seuil de 7 % pour la première fois depuis fin 2009, s’établissant à 6,8 % au premier trimestre 2014.
L’emploi, note Coface, a particulièrement bien résisté pendant la crise au vu de l’ampleur de la récession en 2009 qui avait conduit à une contraction du PIB de 5,2 %. Devant les bons chiffres du chômage et estimant que le risque de défaut des entreprises est moindre, Coface a reclassé en A2 l’évaluation du Royaume-Uni après A3 assortie d’une surveillance positive (voir article).
Une dette privée toujours « colossale »
Des faiblesses persistent, toutefois. « La dette privée au Royaume-Uni, souligne Paul Chollet, est toujours colossale ». La dette des ménages est passée de 60 % du PIB en 2000 à 101 % en 2009 (+ 41 points), contre une progression de 15 points pour la zone euro (de 49 % à 64 % du PIB).
Cette envolée de l’endettement reflète principalement l’essor du crédit immobilier (86 % de la dette des ménages fin 2011). À cela s’ajoute une productivité relativement faible. Cependant, l’économie britannique enregistre depuis le second semestre 2012 une croissance vigoureuse, qui permettra à la production de retrouver en 2014 son niveau d’avant-crise.
Après une désindustrialisation préoccupante, l’étude s’intéresse aux secteurs qui caractérisent le renouveau de l’industrie, en insistant particulièrement sur l’automobile, l’aéronautique et la pharmacie, portés par de considérables investissements en R&D et des innovations.
Le secteur automobile, un atout, surtout à l’export
« Le secteur de l’automobile, signale pour sa part Khalid Ait Yahia, économiste de Coface, se porte plutôt bien, aussi bien au niveau de la production que de la consommation ». La production automobile est repartie à la hausse depuis 2009. « Elle est fortement orientée à l’export, 80 % de la production est exportée », informe Khalid Ait Yahia. Les 20 % restant étant destinés au marché domestique. L’industrie britannique s’est réorientée vers une offre premium (Land Rover, Mini) destinée à l’exportation. Les prix des véhicules exportés sont supérieurs à ceux importés.
Le marché automobile britannique, constate Coface, est une singularité en Europe de l’Ouest. En effet, il connaît depuis deux ans une hausse ininterrompue des ventes de voitures neuves. Ce dynamisme résulte notamment de la réorientation de sa production vers les modèles premium, qui en fait un des secteurs les plus dynamiques à l’exportation. Ce secteur a dégagé un solde commercial positif de 70 millions de livres en 2013.
« Le Royaume-Uni, fait remarquer l’économiste, dispose d’un écosystème avec les plus grands équipementiers et constructeurs automobiles mondiaux.» L’attractivité de l’ensemble de la filière automobile britannique est en partie due à l’implantation des grands groupes japonais : Toyota, Honda, et Nissan. Ce dernier dispose d’une usine à Sunderland, au nord-est du Royaume-Uni. Près de 500 000 véhicules en sortent chaque année. Les investissements considérables en R&D permettent, par ailleurs, de créer des améliorations sur les véhicules. Nissan a ainsi conçu une motorisation hybride sur certains modèles de véhicules.
La pharmacie et l’aéronautique, autres forces de frappe de l’industrie
Le secteur pharmaceutique au Royaume-Uni investit énormément en R&D avec 10 % des dépenses mondiales. Il est le premier contributeur à la balance commerciale avec un excédent de 6 milliards d’euros.
Le secteur aéronautique et de la défense se situe à la 1ère place en Europe et à la deuxième place mondiale derrière les États-Unis, avec 17 % de part de marché. Les exportations dans le secteur aérospatial se sont élevées à 10 milliards de livres en 2012 et ce secteur a dégagé un excédent commercial de 3 milliards d’euros.
Malgré les excédents commerciaux qu’ils dégagent, ces trois secteurs ne parviendront pas à redresser la balance courante du Royaume-Uni nettement déficitaire. La part des exportations britanniques dans les exportations mondiales s’est dégradée passant de 5,2 % en 2002 à 4,2 % en 2007, prévient l’assureur-crédit. Ces lacunes en matière d’exportations de biens proviennent notamment des pertes de parts de marché britanniques à l’export vers les pays émergents.
La détérioration récente des comptes extérieurs fragilise le rebond. « Le déficit commercial représente 5,4 % du PIB ! », alerte Yves Zlotowski, économiste en chef de Coface. Les exportations de services financiers ne compensent pas la faiblesse de l’offre de biens. « Le système d’offre doit répondre à la demande, prévient Yves Zlotowski, mais le Royaume-Uni est à la limite de sa capacité de production ! ». « Si la demande finale augmente, ils devront investir pour éviter l’inflation.», met en garde l’économiste.
Venice Affre