Dans sa dernière révision trimestrielle des évaluations risques pays, la Compagne française d’assurance crédit export (Coface) se félicite du redressement opéré en Europe. Dans une zone euro « portée par l’Allemagne et l’Espagne, deux nouveaux changements : les Pays-Bas et la Belgique montent d’un cran », indique Coface.
De façon concrète, sur une échelle des risques allant de A1 pour la meilleure évaluation à D pour le risque le plus élevé, les deux pays d’Europe du Nord ont été reclassés de A3 (niveau convenable) à A2 (risque peu élevé). La zone euro « reprend », a ainsi confirmé Julien Marcilly (notre photo), économiste en chef de l’assureur crédit français, lors d’un point presse sur les économies avancées, le 26 mars à Paris. Au début de l’année, le Portugal avait déjà bénéficié d’un reclassement en B (risque assez élevé), après qu’en 2014 toute une série d’États membres de l’Union européenne (UE) ait aussi amélioré leur score : en l’occurrence, l’Allemagne, passé en A1, l’Espagne, en A4 (niveau satisfaisant), le Royaume-Uni, en A2, et l’Autriche, en A1.
« En Belgique comme aux Pays-Bas, a délivré l’économiste en chef de Coface, les défaillances d’entreprises diminuent ». Dans son dernier panorama sur l’évolution du risque pays dans le monde (mars 2015), l’assureur crédit précise que le chiffre a fléchi de 21 % en 2014 par rapport au pic de 2013 aux Pays-Bas. Chez ces deux voisins européens, la croissance du produit intérieur brut (PIB) a augmenté, tout comme la consommation des ménages et les exportations. Aux Pays-Bas, la construction et l’immobilier ont connu un léger redémarrage au début de l’année. Et en Belgique, le retour à la stabilité politique, dans un Royaume en proie régulièrement aux nationalismes régionaux, a permis au gouvernement d’engager plus activement une politique de consolidation budgétaire.
L’Amérique latine « dégringole »
« En Allemagne, nous annonçons une révision à la hausse de la croissance à 1,7 % et, en Espagne, à 2,2 % cette année. La croissance est de plus en plus équilibrée outre-Rhin et les chiffres de l’autre côté des Pyrénées sont bons, meilleurs qu’on anticipait », reconnaissait ainsi Julien Marcilly, selon lequel « le seul risque à court terme pour ce pays est un scénario à la grecque », c’est-à-dire « une reprise tuée dans l’œuf par les incertitudes politiques ».
A l’opposé de l’UE, « l’Amérique latine dégringole », remarque Coface, en raison de « la chute des prix des matières premières et du ralentissement de la demande chinoise ». « Au Brésil, précise Julien Marcilly, la demande est négative, car l’inflation est forte, la consolidation budgétaire se traduit par un recul des dépenses sociales et l’endettement des ménages est assez fort ». Par ailleurs, l’industrie serait handicapée par le manque d’eau, d’électricité, d’infrastructures et de main d’œuvre. L’automobile, en outre, souffrirait du ralentissement économique de l’Argentine, son principal débouché extérieur. Quant à la construction et l’activité pétrolière offshore, elles doivent s’attendre à une baisse drastique des investissements sur fonds de corruption au sein de la compagnie nationale d’hydrocarbures Petrobras.
Du coup, le Brésil, certes, conserve son évaluation A4, mais elle est assortie d’une surveillance négative. Tout comme le classement en B de l’Équateur est aussi accompagné d’une surveillance négative. « Comme le Venezuela, ce pays subit la baisse des cours du pétrole et il est peu diversifié », justifiait Julien Marcilly. « Tout le contraire de la Colombie », qui, elle, demeure dynamique, parce que « son économie est diversifiée », a-t-il poursuivi.
L’économiste en chef de Coface parle « d’effets ambigus » s’agissant du Pérou et du Chili, ces deux nations étant, d’un côté, importateurs de pétrole, et, de l’autre, exportateurs de minerais, ce qui complique l’analyse. En définitive, la croissance du PIB devrait y être en hausse par rapport à 2014, avec respectivement + 4,2 % cette année (contre + 3,6 %) et + 2,5 % (+ 1,8 %).
Reclassement de la Tunisie, du Cambodge et du Liban
En ce qui concerne les autres régions du monde, Coface a reclassé trois pays : Tunisie, dont le B est désormais assorti d’une surveillance positive ; Cambodge, qui est passé de D avec surveillance positive à C ; et Liban, pour lequel la surveillance négative en C est abandonnée. Un État africain, le Sierra Leone, subissant les répercussions de l’épidémie de fièvre Ebola, perd son évaluation C avec surveillance négative pour tomber en D.
En Tunisie, a commenté Julien Marcilly, « la situation économique s’améliore graduellement, même si on n’est pas revenu à la croissance d’avant la révolution. Il y a une réelle stabilisation politique. Et nous pensons que si le récent attentat à Tunis a un impact sur le tourisme à court terme, il n’est pas susceptible, en revanche, de remettre en cause notre évaluation positive ». Une appréciation donc favorable, au moment où l’UE annonce un programme d’appui de 25 millions d’euros pour lutter contre le terrorisme en Tunisie.
François Pargny