La situation est sérieuse, mais
pas désespérée. Si l’industrie photovoltaïque en France ne comptait plus que
18 000 emplois en 2012, contre 32 500 deux ans plus tôt, les pouvoirs
publics et les entreprises du solaire, membres du Syndicat des énergies
renouvelables (SER), ont décidé de réagir ensemble. C’est ainsi
que, sous l’égide du SER, la marque commune French Solar Industry (FSI) a été
lancée officiellement à Paris, le 9 janvier.
La France accumule des retards sur un marché où la Chine règne en maître
Pas moins de trois ministres,
Delphine Batho (Ecologie), qui, deux jours plus tôt, avait annoncé des mesures
de soutien pour relancer l’énergie solaire dans l’Hexagone, Nicole Bricq (Commerce extérieur) et Pascal Canfin (Développement), le
vice-président de l’Assemblée nationale Denis Baupin et la quasi-totalité des
ministères et organismes publics impliqués dans la filière et l’international
étaient représentés (ministères de l’Ecologie, des Affaires étrangères, de
l’Economie, du Redressement productif, Ubifrance, Ademe, Oseo). C’est que le temps
presse. La Chine règne en maître sur le marché du photovoltaïque, produisant, selon les professionnels, à
perte. Même l’Allemagne, qui va accueillir le Salon international et la conférence sur l’industrie solaire Intersolar Europe,
souffre.
La France, pour sa part, accumule les retards. Une de ses faiblesse et le manque de dynamisme de son marché domestique. Son parc photovoltaïque
ne dépassait ainsi pas 9 320 mégawatts (MW) fin septembre 2012 quand l’Allemagne
dispose à ce jour de 32 400 MW. Or, « pour travailler à
l’export et développer notre crédibilité à l’international, nous avons besoin
de nous appuyer sur un marché national fort », rappelait, le 9 janvier, le
président du SER, Jean-Louis Bal. Sans référence en France, « on peut
difficilement être retenu par des donneurs d’ordre à l’étranger »,
convenaient à leur tour plusieurs dirigeants de PME, présents dans la salle. « J’ai
des références en France. J’ai travaillé au Pérou ou au Burkina Faso. Donc, ma
société peut travailler en Arabie Saoudite où le ticket d’entrée est, pourtant,
élevé. Pour des projets de centrales, la
capacité à installer n’y est pas inférieure à 100 MW », expliquait ainsi
Xavier Daval, qui préside KiloWattsol, une entreprise lyonnaise de 12
personnes, spécialisée dans l’évaluation, le calcul et le suivi de la
production de centrales photovoltaïques (conversion directe du rayonnement
solaire en électricité).
En revanche, faute de développer
un savoir-faire suffisant dans le solaire thermodynamique (conversion du
rayonnement en chaleur puis en électricité), la France a du mal à se placer.
Elle n’était ainsi pas du tout représentée lors de l’appel d’offres passé pour la
grande centrale marocaine de Ouarzazate (160 MW) dans le cadre du Plan solaire
méditerranéen (PSM), lancée en 2008 dans le cadre de l’Union pour la
Méditerranée (UpM). Le contractant retenu a finalement été le Saoudien Acwa
Power, qui a composé pour la construction de l’ouvrage un consortium de sociétés
espagnoles. « Un marché de un milliard de dollars », rappelle, un peu
déçu, René Pujol, président de la commission solaire thermodynamique du SER.
Le label France sera important sur un marché d’appels d’offres et de gré à gré
Au ministère de l’Écologie, du
développement et de l’énergie durable, Philippe Lorec, au sein de la direction générale de l’Énergie
et du climat, conseille le directeur général du Plan solaire méditerranéen. Selon
lui, les objectifs du PSM – 20 gigawatts d’énergie solaire et éolienne – ne
seront peut-être pas tenus à la date retenue de 2020 « à la fois pour des
raisons financières et politiques dans la région », mais vers 2025.
Par ailleurs, « tous les
pays ont concocté des programmes d’énergie renouvelables. Il y aura beaucoup
d’appels d’offres mais aussi du gré à gré sur des marchés de niche ».
Enfin, les autorités nationales de ces pays vont s’entourer d’experts
internationaux. « Le label France sera donc très important, comme le
respect scrupuleux du cahier des charges et l’intégration dans l’offre
d’une part locale et de partenaires du pays », martèle Philippe Lorec.
« Les marchés de
proximité » que sont l’Algérie, le Maroc, la Tunisie et l’Égypte doivent
être suivis de près, estime, de son côté, Nicole Bricq. Mais, selon elle, il ne
faut pas oublier non plus la Turquie et la Chine. « Dans le XIIe plan
chinois, de nombreux projets d’énergie renouvelable figurent », rappelle
la ministre du Commerce extérieur. Enfin, « plus loin », il y a
notamment « l’Arabie Saoudite qui se pose la question de l’après
pétrole », observe-t-elle. Des appels d’offres sont déjà
lancés ou vont l’être dans ce pays, au Qatar et dans les Émirats Arabes Unis
entre autres. « Bien sûr, compte tenu de leur taille, ils s’adressent
essentiellement à de grandes entreprises. Mais il y a toujours la possibilité
pour des PME de se regrouper et, de toute façon, les grands devront s’appuyer
sur les PME », assure Philippe Lorec. « Les géants n’imposent plus
leur loi, renchérit Marc Benmarraze, le PDG de Solar Euromed, un spécialiste du
solaire thermodynamique à Dijon. Selon le patron de cette société de 25
salariés, Israël a montré l’exemple. « Les PME innovantes y ont essaimé.
En France, il faut simplement trouver les « bonnes formules de coopération
financière et industrielle ».
Dans un communiqué de presse
commun saluant le lancement de l’initiative FSI (voir fichier attaché), les
ministères du Commerce extérieur et de l’Écologie indiquent que le marché
mondial du solaire a connu depuis 2008 « des taux de croissance supérieurs
à 60 % ». Pour l’ensemble des énergies renouvelables, il est passé de 22
milliards de dollars en 2004 à 267 milliards en 2011, dont « 100 milliards
dans le photovoltaïque », précise Jean-Louis Bal.
Les pays en développement,
l’Afrique subsaharienne notamment, peuvent aussi offrir des opportunités.
Ainsi, clôturant la réunion de lancement du FSI organisée par le SER, le
ministre du Développement, Pascal Canfin, a indiqué que les énergies
renouvelables constituaient, avant l’efficacité énergétique, la première des
priorités de l’Agence française de développement (AFD), dans le cadre de sa
stratégie énergétique. Pendant les trois prochaines années, « le
portefeuille potentiel de financements est de 5 à 6 milliards d’euros, dont un
milliard par an pour les énergies renouvelables ». Et « si nous
travaillons sur l’offre, nous travaillons aussi sur la demande », affirme encore
Pascal Canfin.
« Nous discutons avec les
autorités de certains pays pour les accompagner, leur faire prendre conscience d’un
certain nombre d’enjeux, espérant que le mix énergétique se fasse au profit des
sources renouvelables », explique le ministre, qui a cité plusieurs États
africains, comme le Maroc et le Sénégal. Pascal Canfin a également indiqué
qu’il se rendrait au premier semestre de cette année au Kenya. Et que le
développement durable dans ce pays et dans la région serait au cœur de sa
visite.
François Pargny
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2 Le fichier joint
« communiqué de presse de Nicole Bricq et Delphine Batho saluant le
lancement de l’initiative French Solar Industry »