Une conjoncture plus favorable, une aversion au risque de crédit moins aiguë que dans les années de crise, il y a dix ans, la confiance est de retour dans les relations inter-entreprises. Résultat : les délais de paiements moyens s’allongent, les comportements de paiement se relâchent. Le délai moyen de paiement s’est ainsi établi à 66 jours au niveau mondial à fin 2017, soit deux jours de plus que l’année précédente, selon les résultats de la dernière étude sur l’évolution du DSO mondial (Days Sales Outstanding), publiés par Euler Hermes.
Cette étude se fonde sur l’analyse de cet indicateur dans 20 secteurs et dans 36 pays.
Au plus haut niveau mondial depuis 2007
Ce délai moyen de paiement mondial est au plus haut niveau depuis 2007 et la tendance est assez générale puisque selon Euler Hermes, elle se vérifie dans deux secteurs sur trois et deux pays sur trois. Elle devrait se poursuivre en 2018, l’assureur-crédit prévoyant une progression de 1 jour supplémentaire cette année, à 67 jours.
« L’allongement du DSO moyen à l’échelle mondiale reflète un relâchement des bonnes pratiques de paiement entre les entreprises dans un contexte macroéconomique et financier plus favorable, qui a permis un regain de confiance des acteurs économiques, analyse l’assureur-crédit. En découle une moindre appréhension du risque de non-paiement de la part des entreprises, malgré la poussée des défaillances de grandes entreprises ».
Juste après la crise il y a dix ans, le DSO moyen avait chuté de 65 à 60 jours au niveau mondial en 2008, témoignant d’une volonté des entreprises d’accélérer le recouvrement de leurs créances. Il était remonté ensuite pour se stabiliser autour de 64 jours durant cinq ans. Les progressions les plus nettes du DSO moyen ont été relevées aux Etats-Unis, dans la zone Euro, et en Chine, trois zones où la conjoncture est plutôt porteuse et où les credit manager semblent donc se relâcher…
Les écarts s’accentuent
Ce DSO moyen cache toutefois des disparités. Selon Euler Hermes, l’écart entre les extrêmes s’accentue : ainsi si « une entreprise sur quatre est payée par ses clients en moins de 31 jours », la même proportion d’entreprise – une sur quatre- « doit attendre plus de 90 jours pour être payée ».
La situation varie également selon les secteurs : l’électronique, les biens d’équipement et la construction affichent les DSO les plus élevés en moyenne « tous au-delà de 85 jours » observe Euler Hermes. L’électronique, avec 91 jours, affiche le DSO moyen le plus élevé sur le plan mondial.
A l’opposé, quatre secteurs affichent un DSO plus court, en dessous des 50 jours, dont le commerce de détail (28 jours), l’alimentaire (46 jours), les transports (49) ou les équipements ménagers (49). Comme le relève l’assureur-crédit, il semble que le DSO se réduise au fur et à mesure que l’on se rapproche du consommateur final.
Entre les deux, des secteurs tels que l’aéronautique et l’automobile, avec 72 jours en 2017. Le DSO a progressé de 4 jours dans l’aéronautique (+12 jours au total depuis 2012) et de 3 jours dans l’automobile. Au total treize secteurs se situent entre les extrêmes, des télécommunications (53 jours) à la pharmacie (78 jours).
Sur 36 pays, seulement 8 affichent des DSO
Enfin, des disparités existent entre pays, seuls 8 pays étant en-dessous des 51 jours de DSO mais 22 au total étant en dessous de la moyenne mondiale. Euler Hermes distingue trois grands groupes allant du plus bas au plus élevé DSO :
–DSO moyen inférieur ou égal à 51 jours où l’on retrouve la plupart des bons élèves en matière de comportement de paiement : Nouvelle-Zélande, qui conserve sa 1ère place (43 jours) ; l’Afrique du Sud, le Danemark et l’Autriche (47) ; la Finlande et les Pays-Bas (50) ; la Suisse et les Etats-Unis (51).
–DSO moyen supérieur à 51 jours mais inférieur à la moyenne mondiale : Australie et Royaume-Uni (53 jours) ; Allemagne et Canada (54 jours) ; Russie (56) ; Suède et Norvège (57) ; Pologne (59) ; Brésil et Bulgarie (62 jours) ; Chili et Hong-Kong (63) ; Corée du Sud (6() ; Belgique (66).
–DSO supérieur à la moyenne mondiale : on y retrouve 12 pays dont l’Inde et la Roumanie (68) ; l’Arabie Saoudite (69) ; le Japon (71) ; la France, Singapour et le Portugal (74 jours) ; Taiwan (78) ; l’Espagne, le Maroc et l’Italie (83 jours) ; la Grèce (89 jours) ; et la Chine (92 jours).
La Chine affiche en l’occurrence le DSO moyen le plus élevé du monde, signale Euler Hermes. Et la tendance est à l’aggravation car il s’est allongé de 3 jours en 2017. Un facteur d’inquiétude pour les exportateurs qui visent ce grand marché. Quelque 12 secteurs sur 18 ont enregistré des progressions de DSO moyen et un quart des entreprises doivent patienter 136 jours avant d’être payées…
Pour les exportateurs, les résultats de cette étude doivent inciter à la vigilance : à l’export plus les délais de paiement sont longs, plus les risques de crédit sont élevés, les retournements de conjoncture sectoriels ou géographiques étant toujours possibles, on l’a vu à de nombreuses reprises ces dernières années. Autrement dit, une incitation à ne pas négliger de sécuriser les transactions, d’une façon ou d’une autre.
C.G
*L’étude complète est accessible (en anglais) sur le site www.eulerhermes.fr/
Voir également le fichier PDF attaché à cet article.
Pour prolonger :
–Risques pays / Export : les défaillances se stabilisent, le risque de crédit revient
–Risque pays / Europe de l’Est : baisse des défaillances d’entreprises pour la troisième année consécutive
–Risques client / Conjoncture : délais de paiement en hausse chez les émergents, en baisse en Europe
Et aussi :
–Atlas des risques pays – 9e édition, 2017
–Guide de la gestion du risque client à l’international – Édition 2017