Rhône-Alpes ne manque pas de champions régionaux qui, à force d’innovation, se sont hissés aux premières loges sur leur marché mondial et, pour certains, ont su séduire les investisseurs étrangers. Parcours de quatre d’entre eux.
Sunaero : une innovation et un contrat en or avec l’US Air Force
Une innovation a fait de Sunaero une entreprise exportatrice. Cette PME lyonnaise de 24 personnes, grâce à une R&D très musclée, a mis au point un matériel de détection et réparation rapide des systèmes d’étanchéité des avions : les avions suspects de fuites ne sont immobilisés que 6 heures là où les moyens traditionnels imposaient 3 jours, voire 3 semaines. Quand on sait le coût d’immobilisation d’un avion… Aujourd’hui, c’est le jackpot.
Les États-Unis représentent 70 % du marché mondial de Sunaero.
Dès 2001, la PME a créé une filiale outre-Atlantique, Aerowing (actuellement 25 personnes), dont elle détient 88 % du capital. « Pour aborder ce marché, il faut fabriquer, maintenir américain, selon les normes US », justifie Thierry Regond, vice-président de Watt, le holding qui pilote les deux sociétés.
Franchissant d’impitoyables certifications pendant neuf ans, Watt a obtenu en 2010 le sésame T.O 1-1-3 qui impose à l’ensemble de l’US Air Force sa technologie. Bien que cette technologie soit unique au monde, le Pentagone a même exigé que ses « plus » financiers soient démontrés. La PME a passé les tests avec succès, ce qui lui ouvre le marché fabuleux des 560 bases de l’US Air Force. Les affaires ont démarré… et le marché s’élargit désormais à toutes les bases de la planète utilisant des avions américains.
Forte de cette super-référence américaine, Sunaero a pu diversifier ses ventes dans les pays du golfe Persique, au Pakistan, en Inde, en Malaisie… et prochainement en Europe. Les avions civils sont aussi concernés, des contacts sont en cours avec Boeing et Airbus. Bon client de Coface, d’Oséo, membre du cluster Eden, Watt prévoit de multiplier son chiffre d’affaires par 4 en 2012. À condition d’avoir une R&D toujours plus dopée : « Nous devons innover pour conserver notre longueur d’avance. »
L. J.
Poralu Marine s’ouvre les ports de plaisance de l’Asie
Cette entreprise (100 personnes) de l’Ain conçoit, fabrique, installe et distribue des équipements pour les ports de plaisance. Poralu Marine a été l’une des premières à utiliser l’aluminium comme matériau exclusif pour les pontons, innovation qui l’a conduite à la position de leader mondial sur ce créneau des pontons et marinas haut de gamme en aluminium. « Notre capacité d’innovation et la présence locale de Poralu Marine grâce aux filiales, bureaux et agents nous ont permis de prendre ce leadership », explique Laurent Gasiglia, directeur général. Poralu Marine s’appuie sur deux filiales, au Canada et en Australie, ainsi que sur un réseau de 20 agents. Elle est présente sur les cinq continents et l’export a représenté 70 % de son chiffre d’affaires 2009-2010 (19 millions d’euros).
L’Amérique du Nord et l’Europe sont en tête de cet export, le continent nord-américain avec ses nombreuses côtes, lacs et rivières s’avérant un vivier précieux pour l’équipementier portuaire. Mais l’Asie devrait les rejoindre. « De nombreux littoraux sont encore inexploités en Asie où le secteur du nautisme présente un fort potentiel. Nous sommes en train d’investir cette région », informe le directeur général. Représentée depuis cinq ans par un agent en Chine, l’entreprise vient d’ouvrir un bureau à Shanghai et un à Singapour. Dans sa ligne de mire : la Corée du Sud, la Thaïlande, le Japon, le Vietnam, la Malaisie.
Babolat monte au filet en Argentine et en Asie
Champion, le mot va bien à l’entreprise familiale Babolat, créée à Lyon en 1875 et devenue numéro un mondial pour les cordages et numéro deux pour les raquettes de tennis. À l’origine fabricant de boyaux naturels, Babolat a investi le marché de la raquette en 1994 seulement. Une gageure dans un secteur dominé de longue date par les Américains. « Grâce au cordage, nous possédions un excellent relationnel en matière de distribution ainsi qu’une proximité avec la compétition. Babolat s’est lancée et a créé une raquette très innovante. » Marie Bernard, directrice marketing, explique ainsi la belle montée au filet mondial de Babolat. La R&D absorbe 10 % du CA et l’entreprise équipe 200 joueurs professionnels dont 20 % des 100 premiers mondiaux, hommes et femmes. Elle est dotée de sept filiales de commercialisation (Allemagne, Autriche, Espagne, Italie, États-Unis, Royaume-Uni, France) et emploie 300 personnes. Le CA 2010 était de 116,5 millions d’euros, une croissance de 8 % est prévue en 2011 avec une part export de 83 %. Les produits Babolat sont distribués dans 142 pays via 15 000 points de vente et 20 000 clubs.
Le marché américain, avec ses 23 millions d’euros, est numéro un, juste devant la France, 22 millions d’euros. Ses cinq pays clés restent les États-Unis, le Japon, l’Italie, l’Espagne et l’Allemagne, mais l’entreprise vise notamment une croissance en Amérique du Sud, Brésil et Argentine, pays phares du tennis sur terre battue. « Notre association avec Rolland-Garros en juin 2011, où nous fournirons balles, service de cordage, raquettes et bagagerie sera un tremplin pour notre image dans ces pays. » Autre marché en vue, la Chine et l’Asie du Sud-Est, via le badminton cette fois qui pèse tout de même 5 % du chiffre d’affaires.
Mermet : une nouvelle vie sous l’ombrelle d’un groupe hollandais
Mermet, entreprise iséroise créée en 1951 autour du tissage de la fibre de verre, a été vendue en 2005 au groupe hollandais Hunter Douglas, leader mondial pour l’environnement de la fenêtre. Entre ces deux dates, la famille, dont les trois frères Mermet, avait transformé l’entreprise en un groupe international : 3 filiales (Australie, États-Unis, Espagne), 52 millions d’euros de CA dont 60 % à l’export. Avec le rachat de la marque Sunscreen, Mermet (230 personnes) s’était imposé comme leader européen des tissus de protection solaire pour les bâtiments tertiaires.
Les frères désirant passer la main, il n’a pas été facile de trouver un acheteur pour un groupe d’une telle envergure. Mermet fabriquant en mode intégré (il dispose de lignes de fabrication de fil de verre enduit), Hunter Douglas s’est laissé séduire. « Nous avons pu nous défaire d’activités peu rentables et nous centrer sur notre cœur de métier, la protection solaire. Ceci sans casse sociale », se souvient Caroline Moreau, responsable
marketing. Le groupe a donné les moyens financiers à Mermet SAS de maintenir au top son outil de production. Par exemple fin 2010, il a investi 700 000 euros pour une nouvelle ligne d’enduction de fibre de verre. « Sur un marché où la concurrence, en particulier asiatique, est très forte, il est indispensable d’apporter des produits différenciants », justifie le directeur général, François Lacquemanne. Mermet SAS s’appuie sur trois sites de production en Isère et affiche une part export de 80 %, principalement en Europe. « Avec des exigences normatives très élevées, il y a très peu de concurrence en Europe, où nous maintenons notre leadership. »
Au-delà, Mermet SAS se développe au Moyen-Orient, à Dubaï, au Katar, et bénéficie du réseau de distribution de sa maison mère.