Une industrie pharmaceutique française en difficulté, un marché français mou, des exportations en recul (- 5,14 % en 2014), une situation plus enviable chez les pays voisins… En lisant la documentation proposée à l’occasion de la présentation de ses vœux par le Leem (Les entreprises du médicament), le 13 janvier, on ne pouvait que se dire : « tout va mal ». Ennuyeux pour le cinquième secteur exportateur français (26,5 milliards d’euros en 2014, après la mécanique, la navigation aérienne et spatiale, l’automobile et l’équipement électrique), alors que le commerce extérieur français n’est déjà pas très brillant. Et les propos du président du Leem, Patrick Errard (notre photo), dont le discours était centré sur « l’innovation et la compétitivité » du site France, ont conforté cette image d’un pays dont « l’attractivité est en panne ».
Or, s’est inquiété le patron du Leem, « la France ne retrouve pas sa croissance », la hausse de la consommation de médicaments en France est une des plus faibles en Europe. Seule bonne nouvelle, la « refondation » de l’accord-cadre signé, le 10 janvier, avec le nouveau président du Comité économique des produits de santé (CEPS), Maurice-Pierre Planel, visant à servir de référence en matière de régulation conventionnelle du médicament pendant trois ans. Une gouvernance paritaire État-secteur privé est mise en place, avec la création du Comité de pilotage de la politique conventionnelle (CPPC), devant se réunir au moins deux fois par an.
Reconnaître que l’innovation a un prix
Autre sujet de satisfaction de ce document de quarante pages, qui aura demandé neuf mois de réflexion, une mesure particulièrement bienvenue pour favoriser l’attractivité du site France : « les investissements réalisés par les industriels dans la recherche et développement et dans la production industrielle seront pris en compte pour garantir les stabilité des prix », a expliqué Philippe Tcheng, qui préside la commission des Affaires économiques du Leem.
De façon concrète, a précisé Patrick Errard, « les industriels devront remplir un formulaire avec preuves à l’appui, ce dossier permettant alors au CEPS de prendre en compte les investissements consentis pour fixer les prix et décider de la pérennité de ces prix dans le temps ».
Cette dernière mesure est la reconnaissance par l’État que l’innovation a un prix, l’indice de prix étant bien supérieur en Allemagne, voire en Italie, remarque-t-on au Leem. Et c’est d’autant plus important et appréciable, selon le président de l’organisation des industriels, que la profession figure à la troisième place des investisseurs en France en matière de recherche privée avec des investissements annuels de 4,8 milliards d’euros. Le nombre de molécules ne cesse d’augmenter, permettant au passage d’améliorer la lutte contre des maladies graves ou sérieuses (cancer, hépatite C, cardiovasculaires). Selon Philippe Barrois, administrateur au Leem, les entreprises du médicament consacrent ainsi 10,6 % de leur chiffre d’affaires annuel à la R & D, un niveau supérieur à celui de la construction aérienne et spatiale (7,7 %) et de l’automobile (6 %).
Seulement huit nouvelles molécules seront produites en France
Philippe Barrois a également indiqué que la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis avait délivré 95 autorisations de mise sur le marché (AMM) en 2015 et l’Agence européenne du médicament (EMA) 93, contre 82 l’année précédente. Un rythme qui devrait s’accélérer, mais la France accumule les retards en matière de mise à disposition des produits auprès des patients.
D’après la Fédération européenne des industries et associations pharmaceutiques (EFPIA), la longueur des délais de mise à disposition dans l’Hexagone s’élève à 440 jours après l’autorisation de mise en marché, bien que le délai requis par la règlementation européenne soit de 180 jours. A cet égard, le nouvel accord cadre paritaire devrait permettre à la France de rattraper son retard. S’ajoute au problème du délai une fiscalité (impôt + cotisation sociale + participation salariale) parmi les plus fortes sur le continent, avec un écart qui se creuse, notamment avec le Royaume-Uni.
Résultat : sur les 130 molécules autorisées en Europe entre 2012 et 2014, « seulement huit seront produites » dans l’Hexagone, écrit le Leem, contre 32 en Allemagne, 28 au Royaume-Uni et 13 en Irlande et en Italie.
L’innovation et les investissements sont particulièrement importants en matière de commerce extérieur. Le pays qui semble à l’heure actuelle retenir le plus l’attention de l’organisation professionnelle est l’Iran. Elle y mène ainsi, du 17 au 19 janvier, 25 chefs d’entreprise de la santé, en partenariat avec la Fefis (Fédération française des industries de la santé) et Medef International.
François Pargny
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