« Je tiens, au nom de l’institution régionale et en mon nom personnel, à te présenter mes plus vives et chaleureuses félicitations ». Alain Rousset, président de la région Aquitaine et président de l’Association des régions de France (ARF), a chaleureusement salué la nomination surprise, hier 4 septembre, de Matthias Fekl, jeune député (PS) du Lot-et-Garonne, franco-allemand de naissance, au secrétariat d’État au Commerce extérieur, à la promotion du tourisme et aux Français de l’étranger.
Chargé du développement économique de la Région Aquitaine
Car c’est son poulain qui accède ainsi au gouvernement, celui à qui il avait confié la vice-présidence du conseil régional chargée du développement économique en 2010. Un gage a priori que les problématiques de développement des entreprises, notamment à l’international, ne sont pas complètement étrangères à cet ancien strauss-khanien rallié à François Hollande lors de la primaire socialiste de 2011, contrairement à son éphémère prédécesseur, Thomas Thévenoud, poussé hors du gouvernement 9 jours après sa nomination pour s’être mis en délicatesse avec l’administration fiscale.
L’Aquitaine fait en effet partie des régions qui se sont dotées d’un plan régional à l’internationalisation des entreprises (PRIE) – le 21 octobre dernier-, avec comme spécificité d’avoir associé étroitement les différents acteurs publics du commerce extérieur local, mais aussi des chefs d’entreprises, à son élaboration via un «Club ETI » et un comité d’experts associant des dirigeants d’entreprises de toutes tailles. Salué à l’époque comme un modèle à suivre par l’ancienne ministre du Commerce extérieur Nicole Bricq, le PRIE Aquitaine est en cours de mise en œuvre et la Région en a fait l’un des piliers de sa stratégie économique avec l’innovation*.
Europhilie assumée
Une deuxième qualité apparemment acquise pour cet ancien magistrat administratif (2005-2010), spécialiste des politiques publiques – en tant que député, il est membre de la Commission des lois- et proche du président du Sénat Jean-Pierre Bel (dont il a été directeur de cabinet et conseiller), c’est son europhilie assumée, gage d’une vision du monde qui va au-delà des problématiques franco-françaises.
«Appartenant à une nouvelle génération française et européenne, né d’un couple franco-allemand, ayant grandi à Berlin et y ayant vécu la division de l’Europe et la chute du Mur, je ne me résigne pas au désenchantement qui gagne les peuples d’Europe, écrivait Matthias Fekl au moment de la campagne pour les élections européennes dans une tribune parue dans le Figaro (12 avril 2014). Si une Europe est en train de mourir, une autre doit naître, plus dynamique, plus forte, plus démocratique.»
Né le 4 octobre 1977 à Francfort sur le Main, d’un père allemand et d’une mère française, ce binational franco-allemand pratique à la fois la langue de Goethe et celle de Shakespeare -un plus pour ses nouvelles fonctions-, et connaît donc bien le pays qui est aussi le premier partenaire économique et commercial de la France au sein d’une Europe en quête de nouveau souffle.
Trois portefeuilles et de nombreux chantiers
Normalien, énarque, engagé au PS depuis 2001, Matthias Fekl semble aussi avoir le profil d’un homme politique qui travaille ses dossiers, y compris les plus délicats : il était aux premières loges localement pour gérer la transition de l’ex. ministre du Budget Jérôme Cahuzac, élu de ce département, en tant que secrétaire fédéral du PS dans le Lot-et-Garonne. Et il est jeune -37 ans- ce qui n’est pas le moindre des atouts pour la mission qui l’attend. Car il devra jongler entre les contraintes de ses trois portefeuilles, de multiples déplacements dans les pays étrangers, le suivi des grandes négociations commerciales internationales –en particulier le Partenariat transatlantique avec les États-Unis dont se méfie l’opinion publique-, et enfin la mise en œuvre des réformes engagées par ses prédécesseurs.
Rien que pour le Commerce extérieur, les chantiers sont nombreux : moderniser le dispositif public d’accompagnement des entreprises à l’international (fusion Ubifrance/Afii, simplifications…), poursuivre la régionalisation des politiques de soutien aux entreprises, mobiliser les PME et ETI et, the last but not the least, faire que le nouvel écosystème créé par la diplomatie économique de Laurent Fabius marche, le tout sans fâcher l’Autorité de la concurrence**…
Christine Gilguy
*Relire, à ce sujet, notre dernier dossier spécial Aquitaine paru fin 2013
**Lire : Aides à l’export : l’Autorité de la concurrence épingle Ubifrance, Bpifrance et Erai