Quelque 300 entreprises françaises et marocaines étaient réunies le 28 mai, à Paris, pour assister à la rencontre du Club de chefs d’entreprise France-Maroc, qui avait pour thème « France-Maroc : nouvelles réalités, nouvelles coopérations, nouvelles frontières », organisée conjointement par la Confédération générale des entreprises du Maroc (Cgem) et l’organisation patronale française pour le développement des entreprises tricolores sur les marchés émergents et en développement Medef International.
Cette rencontre ouverte par Miriem Bensalah-Chaqroun, présidente de la Cgem et Pierre Gattaz, président du Medef, a été l’occasion de revenir sur les parcours de trois entreprises françaises implantées durablement au Maroc, mais qui ont développé, à partir de leur plateforme au Royaume chérifien, une stratégie en vue de rayonner sur l’ensemble du continent africain : les dirigeants de Nexans, expert mondial dans la fabrication de câbles et équipements électriques pour les infrastructures, l’industrie et le bâtiment, du groupe hôtelier Accor et de l’industriel Alstom, spécialisé dans les infrastructures d’énergie et de transport, se sont ainsi succédé pour à la tribune pour raconter leur parcours (notre photo*).
Nexans : répondre aux besoins en électrification rurale sur toute l’Afrique
« Oui, le Maroc, c’est un marché important pour nous », a affirmé Frédéric Vincent, P-dg de Nexans, lors de la table-ronde consacrée aux témoignages d’entreprises à laquelle Le Moci a assisté. À travers sa filiale Nexans Maroc, créée en 1947, le groupe français s’est imposé sur le marché marocain en tant que leader dans le secteur du matériel électrique. Le spécialiste des câbles y propose une offre dédiée à l’électrification rurale dans le cadre du Programme d’électrification rurale global (PERG), engagé par le Royaume du Maroc en 1995 pour combler les importants retards en matière d’électrification en milieux ruraux. Nexans a fourni 50 % des câbles électriques pour ce programme d’électrification généralisée du Maroc visant à raccorder au réseau interconnecté la majorité des villages et à électrifier, principalement par équipement photovoltaïque, les zones éloignées de tout réseau électrique.
Mais la société française présente une offre stratégique adaptée au marché africain dans son ensemble. « 600 millions d’habitants n’ont pas encore accès à l’électricité en Afrique», a ainsi rappelé Frédéric Vincent. En effet, le taux moyen d’électrification du continent est de 40 %. Le Français a donc une carte à jouer en proposant son savoir-faire dans les zones rurales de tous les pays africains.
Le groupe français réalise déjà 30 % de son chiffre d’affaires en Afrique. Sa stratégie en Afrique repose sur la diversification de son offre. « On a essayé d’avoir une offre la plus diversifiée possible », explique le dirigeant. La filiale Nexans Maroc produit à la fois des transformateurs, sur son site de Casablanca, et des câbles électriques (câbles d’énergie, câbles de bâtiments, câbles de télécommunication, câbles automobiles et câbles aéronautiques) sur son site de Mohammédia, commune du Grand Casablanca. « On a installé plus de 2 500 000 kilomètres de pose de câbles sur le continent », s’est félicité le P-dg, dont la société a également installé 100 000 transformateurs en Afrique. L’électrification rurale au Maroc, a conclu Frédéric Vincent, c’est quelque chose que l’on peut répliquer en Afrique ».
Accor : utiliser le Maroc comme plateforme de développement vers l’Afrique subsaharienne
« Accor est présent depuis très longtemps sur le continent africain », a indiqué pour sa part Jean-Jacques Dessors, directeur général d’Accor Hotelservices Méditerranée, Moyen-Orient, Afrique. Fort d’une présence de 40 ans, le groupe hôtelier français a été pionnier de l’hôtellerie en Afrique. Depuis l’ouverture de son premier hôtel au Congo en 1975, Accor a élargi son réseau jusqu’à devenir numéro 1 sur le continent avec une centaine d’établissements.
Au printemps 2014, Accor a choisi d’implanter son siège Afrique à Casablanca, un choix qui s’est avéré stratégique pour accélérer son développement sur le continent africain. « Le Maroc, c’est un excellent laboratoire car nous y avons toutes nos marques », a ainsi commenté le dirigeant.
Dans ce pays d’Afrique du Nord, le groupe hôtelier possède 37 hôtels toutes enseignes confondues du luxe (Sofitel, Pullman) aux deux-étoiles (ibis), en passant par le segment affaires et le milieu de gamme (Novotel, Mercure). Accor a donc fait le choix d’« utiliser le Maroc comme une plateforme pour se développer en Afrique notamment en Afrique subsaharienne », a révélé Jean-Jacques Dessors. L’Afrique subsaharienne, où Accor compte 54 hôtels, de l’économique au haut de gamme, dans 14 pays, constitue un enjeu majeur pour le groupe qui entend se développer principalement avec les marques économiques et milieux de gamme : ibis et Novotel.
Alstom : s’appuyer sur l’industrie marocaine pour être compétitif
Tramway, éolien, hydroélectrique, thermique… Alstom est un partenaire de longue date des projets de transport et d’énergie au Maroc où il est implanté depuis plus de 40 ans. « Nous avons une stratégie pour le Maroc et nous avons une stratégie pour l’Afrique », a déclaré Thierry de Margerie, vice-président Afrique d’Alstom.
Ce dernier a notamment rappelé le contrat remporté par Alstom en Afrique du Sud en octobre 2013 et finalisé au printemps 2014, d’une valeur de 4 milliards d’euros –soit le plus gros contrat de l’histoire d’Alstom– pour la fourniture, sur dix ans, de 600 trains de banlieue. « Nous voulons accompagner le désengorgement des villes africaines », a commenté Thierry de Margerie. La croissance économique et l’urbanisation des grandes villes représentent des opportunités pour Alstom qui compte s’appuyer de plus en plus sur l’industrie marocaine pour contribuer à la compétitivité de son offre. Le groupe industriel envisage ainsi de participer à « des projets de transports urbains en s’associant avec des partenaires compétitifs ».
D’autre part, comme l’a révélé Thierry de Margerie, Alstom commence à travailler avec des investisseurs importants présents au Royaume du Maroc sur un projet de centrale électrique en Afrique de l’Ouest, en vue de « développer une vraie industrie que nous exporterons ensuite vers l’Afrique », a conclu le dirigeant.
Venice Affre
*Sur la photo, de gauche à droite : Frédéric Vincent, P-dg de Nexans ; Jean-Jacques Dessors, directeur général d’Accor Hotelservices Méditerranée, Moyen-Orient, Afrique ; Thierry de Margerie, vice-président Afrique d’Alstom.
Pour prolonger :
– Maroc-France : de nouveaux marchés à conquérir ensemble en Afrique et en Europe
– Maroc : les grands projets d’infrastructure moteurs de l’internationalisation économique