François Hollande effectuera une visite officielle au premier semestre de l’année prochaine en Égypte. L’information, si elle a été confirmée le 1er décembre, lors des Rencontres sur « le développement des échanges économiques entre la France et l’Égypte » à l’Ima (Institut du monde arabe), devra encore être précisée, mais, d’après nos informations, elle serait prévue pendant la deuxième quinzaine d’avril, en fonction des agendas du président français et de son homologue Abdel Fattah al-Sissi.
Selon Fouad Younes, coprésident du Conseil franco-égyptien des Affaires, « le chef de l’État sera accompagné d’une délégation importante de chefs d’entreprises et le Service économique, Medef et les deux ambassades travaillent déjà à l’heure actuelle dans ce sens ». Du côté de Medef International, on a confirmé au MOCI réfléchir à la mobilisation des entreprises françaises. De grands noms étaient, d’ailleurs, représentés à ces Rencontres : Orange, Suez, Engie, CMA CGM, Crédit Agricole, Vicat, etc.
Le contrat des 24 Rafale, l’achat des deux bâtiments de projection et de commandement (BPC) Mistral, destinés à l’origine à la Russie, et d’autres matériels militaires (missiles, frigate) pour un montant global de 6 milliards d’euros en à peine un an, contribuent à une relation diplomatique quasi idyllique, Paris ayant fait le choix de la « realpolitik » alors que les organisations de défense des droits de l’homme n’ont de cesse de dénoncer le régime de l’ancien maréchal aujourd’hui au pouvoir.
« Une nouvelle ère » est engagée, selon Emmanuel Macron
Inaugurant les Rencontres de Paris, Emmanuel Macron, ministre de l’Économie, de l’industrie et du numérique, a parlé « d’une nouvelle ère », faisant allusion au « développement des relations diplomatiques ». Et de rappeler que le président de la République était présent lors de l’inauguration du nouveau canal de Suez aux côtés de son homologue égyptien, le 6 août 2015, et que le Premier ministre Manuel Valls s’était également déplacé au Caire, le 10 octobre suivant, pour signer le contrat des BPC, estimé à 950 millions d’euros.
Les entreprises n’étaient pas en reste, puisqu’une délégation de 37 chefs d’entreprise s’était rendue au Caire les 15 et 16 juin et qu’une soixante de sociétés françaises, selon Emmanuel Macron, étaient présentes en mars à Sharm el Sheikh pour assister à la conférence « Egypt the future ».
Le bilan économique est positif pour la France, dont les exportations auraient bondi de 23 % pendant les neuf premiers mois de l’année. « Septième client de l’Égypte, la France serait également son sixième fournisseur, derrière la Chine, l’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis, les États-Unis, l’Allemagne » et « sa part de marché serait passée de 3 à 4 % », a souligné André Parant, ambassadeur de France en Égypte (notre photo).
André Parant : « Nous ne réussissons pas seulement dans l’armement »
Selon lui, en matière d’investissements directs étrangers (IDE), la France est en sixième position, avec « un stock d’environ 3 milliards d’euros, des flux annuels de 300 millions ». De son côté, le ministre de l’Économie a indiqué que « 150 entreprises françaises sont présentes sur place, employant 33 000 personnes » dans des secteurs très divers, allant de l’ingénierie à l’agriculture, en passant par les produits manufacturés et l’énergie.
« Nous ne réussissons pas seulement dans l’armement », a tenu à préciser André Parant, qui a cité aussi « le développement du réseau de distribution de Total, les investissements de L’Oréal, Lactalis, Axa, les affaires remportées par les entreprises françaises pour les lignes 3 et 4 du métro du Caire, la construction par Vinci du nouveau barrage d’Assiout », à 250 km au nord de Louxor, destiné à la régulation du cours du Nil, l’irrigation et la production d’électricité.
« Il faut contribuer à bâtir les infrastructures dans ce pays. Et c’est pourquoi l’engagement de l’Agence française de développement est important pour la réalisation de routes, de lignes ferroviaires, dans les télécommunications, l’énergie, le BTP », a pointé Emmanuel Macron.
L’Agence française de développement (AFD) a engagé 275 millions d’euros dans l’eau, l’assainissement ou le transport. Mais d’autres financements sont également disponibles, « ainsi ceux du ministère des Finances, qui a dévolu 344 millions d’euros pour le métro du Caire », a précisé André Parant. Cet engagement comprend à parts égales un prêt du Trésor et un crédit garanti par Coface. Pour la phase 3 de la ligne 3, les signataires français sont Thalès, Alstom et un consortium franco-égyptien mené par Colas Rail. Quant à la phase 4 de la ligne 3, Bouygues et Vinci sont attributaires, ainsi que Alstom, Thales, Colas et Euravia.
Les opportunités : canal de Suez, énergies renouvelables, ville durable, consommation
« Le risque terroriste est présent, mais on peut venir et se déplacer sans danger particulier, sous réserve de précautions de base», a tenu également à rassurer l’ambassadeur de France. D’ailleurs, l’Égypte, qui vient de se doter d’une nouvelle loi sur l’investissement, « est revenue en 2014 au niveau d’IDE de 2009 », a-t-il précisé, avant d’énumérer les principales opportunités d’affaires qui se présentent, comme « les travaux de conception et de réalisation des infrastructures dans la région économique du canal de Suez ainsi que les investissements à y engager et les plateformes logistiques à installer dans les zones industrielles ».
Autre priorité les énergies renouvelables. Le Caire, qui voudrait ainsi porter à 20 % le taux de production électrique, aurait déjà proposé des projets pour un volume global de 10 000 mégawatts (MW). « Les tarifs de rachat de l’électricité seront garantis et certaines entreprises auraient déjà affiché leur intérêt pour des projets qui commenceraient à être lancés en 2016 », s’est félicité André Parant, qui incite aussi les sociétés tricolores, qui « ont une expertise reconnue » en matière de ville durable, « à s’organiser et à présenter une offre ».
Enfin, un grand marché de 90 millions de consommateurs présente obligatoirement des débouchés commerciaux aux PME et ETI. Et, à cet égard, le diplomate en poste au Caire a indiqué que Business France prévoyait d’organiser diverses opérations dans les biens alimentaires, l’équipement agroalimentaire ou encore les infrastructures de transport. De même, a-t-il conclu, l’Égypte doit être considérée comme « une porte d’entrée » sur le Proche-Orient, mais aussi l’Afrique.
François Pargny