Avec 25 millions d’habitants dotés d’un fort pouvoir d’achat et une majorité de la population connectée à Internet, les pays nordiques (Norvège, Suède, Danemark, Finlande) représentent de véritables opportunités d’affaires pour les e-commerçants. Tel est un des constats de la 8e édition du salon du e-commerce qui s’est tenu mi-septembre, à Paris.
Dans son étude 2011 sur le e-commerce dans les pays nordiques, le groupe de logistique Posten Norden – né de la fusion entre la Poste danoise et la Poste suédoise – signale que la vente sur Internet représente plus de 80 % de la vente à distance.
Jonas Prosell, de la société suédoise Direct Link, spécialisée dans les solutions de e-commerce dans les pays nordiques, indique qu’un habitant nordique sur quatre achète chaque jour sur Internet. Les pays nordiques ont un atout de taille, ajoute-t-il : leur excellente infrastructure logistique. Direct Link livre ainsi 13 millions de paquets par jour. Parmi les consommateurs adeptes du e-commerce, 22 % y trouvent des meilleurs prix, 20 % apprécient l’aspect pratique, 21 % estiment y trouver une meilleure sélection de produits et 12 % affirment gagner du temps.
En 2010, la part du e-commerce sur le marché scandinave (Norvège, Suède, Danemark) s’est élevée à 23 milliards d’euros, indique Luc Bodet, de la Chambre de commerce franco-norvégienne (CCFN), dont 6 milliards d’euros pour la seule Norvège. Avec un PIB par habitant de 62 000 euros en 2010, la Norvège, pays de 4,85 millions d’habitants dont 98 % ont accès à Internet, est un marché en pleine maturité, explique Luc Bodet. Le commerce mobile est en pleine expansion : de plus en plus de Norvégiens utilisent uniquement leur téléphone portable pour se connecter à Internet.
Sur six mois, le panier d’achat moyen d’un Norvégien s’élève à 987 euros contre 487 euros pour un Français. La catégorie des 30-39 ans compose la majorité des cyberacheteurs suivie par les plus de 50 ans représentant 25 % de la population, une part à ne pas négliger, estime M. Bodet. « 75 % des Norvégiens, indique Luc Bodet, achètent sur des sites norvégiens. » Mais, nuance-t-il, les pays Scandinaves achètent aussi beaucoup sur les sites internationaux. Un potentiel donc pour les e-commerçants français qui souhaitent s’installer sur le marché. À condition bien sûr d’adapter l’offre à la demande locale.
Les acheteurs en ligne norvégiens sont les plus favorables à l’achat sur des sites étrangers. En effet, 66 % des Norvégiens achètent à l’étranger, talonnés par les Danois (60 %), les Suédois (56 %) et les Finlandais (40 %). Les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne arrivent en tête des pays d’achat.
De l’autre côté de la frontière norvégienne, en Suède, la forte utilisation d’Internet a également participé au développement du e-commerce. En effet, 91 % de la population suédoise âgée de 16 à 75 ans utilisent Internet.
Et, en 2010, 16 % de la population avaient accès à Internet via son téléphone portable. Autant de facteurs qui expliquent que, cette même année, le chiffre d’affaires du commerce électronique a atteint 24 milliards de couronnes (2,6 milliards d’euros).
« En Suède, l’économie la plus compétitive d’Europe, les derniers chiffres, signale Jonas Prosell, montrent une progression de 8,4 % de l’activité du e-commerce en 2011 par rapport à 2010. » La reprise économique y a été plus rapide que dans les autres pays de l’Union européenne, rapporte la Chambre de commerce française en Suède (CCFS).
Côté moyens de paiement, « les Norvégiens sont les rois de la carte bleue », souligne Luc Bodet. Ils s’en servent aussi bien pour acheter un ticket de cinéma qu’un billet d’avion. L’utilisation du paiement électronique est de plus en plus fréquente en Norvège. Il est donc important pour le développement du commerce électronique que les consommateurs puissent faire confiance à Internet par le biais de systèmes de paiement sécurisés. La carte de crédit est aussi très populaire au Danemark avec huit achats sur dix réglés par carte bancaire, selon l’étude Posten Norden. En Finlande, le paiement par carte bancaire est beaucoup moins répandu que dans les autres pays nordiques, quatre Finlandais sur dix préférant payer par leur banque en ligne. Les Suédois, eux, privilégient le paiement après réception sur facture.
Côté référencement, « Google est souvent le point de départ », prévient Jonas Prosell. Sept habitants nordiques sur dix passent par le moteur de recherche Google pour acheter en ligne. Viennent ensuite les sites de réseaux sociaux. La Norvège, explique Luc Bodet, est un petit pays, et ses habitants utilisent beaucoup les réseaux sociaux.
Néanmoins, il ne faut pas ignorer le catalogue qui continue à jouer un rôle important dans l’acte d’achat. Près de quatre consommateurs sur dix en consultent un avant de passer commande sur Internet. Les livres, les vêtements et l’électronique sont les produits les plus populaires sur le marché du e-commerce nordique. En Norvège, le tourisme, les services culturels et la mode sont les premiers choix. La décoration intérieure, insiste Luc Bodet, est un autre secteur à surveiller, car pas très développé, mais qui intéresse les Norvégiens qui passent beaucoup de temps chez eux en hiver.
Côté exigence locale, le consommateur norvégien demandera une bonne information sur le produit, et si possible en langue norvégienne, précise Luc Bodet. En effet, sur le marché scandinave l’anglais suffit pour démarrer, mais « si on veut pénétrer le marché en profondeur, il faut faire une traduction dans les langues locales », insiste Jonas Prosell. Et celui-ci met en garde sur les préjugés. Si un Norvégien comprend à l’oral un Suédois à 80 %, la langue finlandaise est totalement différente : elle se rapproche du hongrois. Conclusion, il est préférable d’adapter son site Internet à chaque langue scandinave.
Cyril Drouin, directeur associé de l’agence d’ingénierie Internet Bysoft, accorde aussi de l’importance à la traduction. Il recommande de traduire l’ensemble du site marchand, y compris l’infographie et les fiches produits. Et pour s’assurer d’un résultat optimal, une relecture par un anglophone est conseillée. La même recommandation s’applique pour le service client. Celui-ci, prévient Cyril Drouin, doit être dans la langue du pays.
« L’internationalisation, ajoute-t-il, c’est bien plus que de la traduction, c’est un relais de croissance profitable à condition d’y mettre les moyens, et dans le bon ordre ». En effet, « on ne surfe pas sur Internet de la même façon en Afrique et en France », c’est pourquoi il faut travailler avec des acteurs locaux sur place. Selon lui, le e-commerce est un très bon moyen pour voir si un produit connaît un succès à l’étranger. Cette pratique coûte moins cher que de le lancer directement.
Enfin, en cas de litige, prévient maître Gérard Haas, spécialiste en propriété intellectuelle, c’est le droit français qui s’appliquera, et ce même si le site est dans une autre langue. C’est la loi française, renchérit-il, qui s’appliquera, peu importe le pays où est situé le consommateur. Les cybermarchands, souligne-t-il, doivent demander l’application du droit français car c’est la garantie d’être mieux défendu par les tribunaux de commerce français.
Venice Affre
Chine et Inde en croissance
Avec 173 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2010, le marché européen du e-commerce est premier mondial, devant les États-Unis (172 milliards d’euros). Mais d’ici 5 ans, l’Europe va être dépassée par la Chine, avertit Jean-Rémi Gratadour, vice-président de l’Acsel. Car si en Chine, le chiffre d’affaires du e-commerce ne s’élève qu’à 50 milliards d’euros, il ne faut pas négliger sa très forte croissance (80 %) à laquelle s’ajoutent le nombre des consommateurs (457 millions d’internautes) ainsi qu’une demande soutenue pour les produits de luxe.
Concernant l’Inde, le e-commerce dans ce pays devrait peser 10 milliards de dollars en 2011 et 40 milliards en 2015, selon les estimations de l’Internet and Mobile Association of India (IAMAI). Côté produits, on observe une prédominance du marché des voyages. Les achats de voyages représentent 80 % de la part de marché du e-commerce, dont 40 % sont réalisés par le site de vente en ligne Indian Railway. Signe des potentialités du marché indien, le géant de la vente en ligne Amazon prévoit de s’y installer en 2012.
V. A.
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