Pris en tenaille entre la Chine et le Japon, la Corée du Sud compte sur la France pour peser en matière d’innovation. Si elle ne peut espérer rejoindre le volume d’excellence des États-Unis et de l’Europe, elle est, néanmoins, « le premier pays de l’OCDE à investir dans la recherche et développement (R & D) relativement à son produit intérieur brut (PIB), avec un taux de 4,3 % », a souligné Pierre Gattaz, le président du Medef, qui organisait avec son homologue, la Fédération des industries coréennes (FKI), le Forum économique France-Corée, à Paris, le 2 juin.
Le pays du Matin calme, point d’ancrage en Asie
Organisé à l’occasion du 130e anniversaire des relations diplomatiques bilatérales et de la visite officielle dans l’Hexagone de la présidente Park Geun-hye (sur notre photo, lors du forum), cet évènement s’inscrit dans toute une série de rendez-vous, comme en 2015 le déplacement de François Hollande à Séoul, le 4 novembre, et le Forum franco-coréen d’innovation industrielle, le 26 du même mois à Bercy. A l’occasion de cette dernière manifestation, le ministre de l’Économie, de l’industrie et du numérique, Emmanuel Macron, s’était félicité des trois secteurs de coopération bilatérale déjà ciblés : e-santé, nanotechnologies et véhicule du futur.
Il est vrai que Paris a tout intérêt à s’entendre avec Séoul, la Corée du Sud étant en Asie un point d’ancrage de l’Hexagone, qui en est le deuxième fournisseur européen, avec 4,8 milliards d’exportations en 2015, et le quatrième investisseur européen.
Pour ses échanges, elle a su utiliser l’accord de libre échange, conclu en 2011 entre la nation asiatique et l’Union européenne (UE), et le label French Tech Hub, dévolu en avril à l’écosystème français d’innovation à Séoul, devrait encore « favoriser les échanges en matière d’économie créative », s’est réjoui Cho Yang-Ho, coprésident, côté coréen, du club d’affaires de haut niveau France-Corée et président de Korean Air.
Une mission du Medef à la mi-novembre
Le Forum économique France-Corée a accueilli « plus de 250 représentants du monde de l’innovation », dont « plus de 90 chefs d’entreprises coréens et une centaine de Français », selon Marwan Lahoud, coprésident, côté français, du club d’affaires de haut niveau France-Corée. Pendant cette manifestation, le président d’Airbus France s’est réjoui de la mise en place d’un programme d’échanges de cinq startups françaises et coréennes et a annoncé la conduite d’une mission du Medef en Corée à la mi-novembre prochain.
« La Chine, la Corée et le Japon veulent développer une politique de l’offre et la France a tout intérêt à intervenir dans des industries où l’offre est encore faible en Corée », insistait le vice-président de la FKI, Lee Seungcheol, qui a cité notamment :
- l’agroalimentaire – « les produits japonais ne sont pas populaires chez nous en raison des craintes de contamination », a-t-il précisé ;
- le marché des seniors – « la croissance est ici la plus élevée de l’OCDE et en 2030, selon Lee Seungcheol, le nombre de seniors en Chine sera équivalent à celui de toute l’Europe et donc il y a des opportunités de coopération avec la Corée » ;
- et encore les loisirs, la plaisance et la montagne, les biotechnologies, les semi-conducteurs, etc.
« La Corée du Sud a peu d’influence au niveau mondial par rapport à l’Europe et aux États-Unis, notamment dans l’Internet des objets et les fabrications intelligentes. Les États-Unis et l’Allemagne dominent », estimait Park Sang Jin, président de Samsung Electronics, qui développe notamment un partenariat avec Sigfox, spécialiste français de la communication des objets.
D’après lui, Paris et Séoul ont intérêt à coopérer pour créer de l’emploi, ce qui leur est « indispensable », et parce qu’ils « manquent d’un écosystème vertueux par rapport à la Silicon Valley ». Le Coréen a ainsi lancé une gamme de puces destinées à l’Internet des objets.
Trois secteurs à développer : énergies renouvelables, TIC, pharmacie
Pour sa part, Park Geun-hye a appelé à des échanges en matière d’information et d’hommes et à des coopérations entre la recherche fondamentale française et appliquée coréenne pour parvenir à des « partenariats gagnant-gagnant ». Et de citer trois grands secteurs : les énergies nouvelles, avec, par exemple, Air Liquide impliqué dans la liquéfaction de l’hydrogène, les technologies de l’information et la communication (TIC), où des « synergies » peuvent être trouvées entre le savoir-faire de l’Hexagone en matière de robot ou d’intelligence artificielle et celui de la Corée dans les infrastructures et les télécommunications, et, enfin, la pharmacie, le chef d’État du pays du matin calme saluant, en particulier, le travail de Sanofi.
Implanté en Corée depuis 1957, le groupe pharmaceutique français y a conclu « des partenariats locaux ou globaux pour la R & D, la fabrication et les activités commerciales », a indiqué un de ses vice-présidents, Loïc Haméon. En particulier, Sanofi et le coréen Hanmi exploitent un portefeuille d’antidiabétiques. « Si nous avons apporté à notre partenaire notre connaissance en matière de recherche ou de règlementation, lui en retour, a encore expliqué Loïc Haméon, nous a donné accès à une technologie très attractive au niveau mondial, puisqu’il n’est plus nécessaire de procéder à des injections quotidiennes pour traiter le diabète, mais hebdomadaires ».
Preuve de la volonté de Paris et Séoul de renforcer leur partenariat en matière d’innovation, neuf accords ont été signés à l’issue du forum entre des organismes et des entreprises des deux pays (voir fichier pdf » MOUSs » ci-joint).
François Pargny