Les investissements chinois en R&D devraient dépasser ceux des Etats-Unis en 2025, selon une enquête de l’institut Batelle. Bouillonnante, mais jeune, l’innovation chinoise a-t-elle la capacité de ravir aux Etats-Unis le titre de champion mondial de la R&D ?
Si la Chine est toujours derrière les Etats-Unis en termes d’investissements en R&D (199 milliards de dollars prévus en 2012 contre 436 milliards de dollars), elle est en train de les rattraper à une vitesse fulgurante. Avec une croissance de 10 % elle devrait les dépasser en 2025, selon les prévisions de Batelle. Fin décembre, un rapport de Thomson Reuters confirmait que l’ancien empire du Milieu était devenu le premier déposant mondial de brevets.
Aujourd’hui tous les grands groupes industriels occidentaux ont leur centre de R&D à Pékin ou à Shanghai, soit pour développer des produits adaptés à ce marché, soit pour centraliser tous leurs activités de recherche au niveau mondial. Côté français, L’Oréal, Schneider Electric, EDF, Sanofi-Aventis, Thalès, Rhodia, l’institut Pasteur, Michelin ou encore le CNRS sont présents. Le géant pharmaceutique américain Merck a annoncé en décembre 1,5 milliard de dollars d’investissement dans l’innovation en Chine au cours des cinq prochaines années, incluant la création d’un centre de R&D à Pékin.
De leur côté, les entreprises chinoises commencent également à délocaliser leurs centres de recherches aux Etats-Unis et en Europe. Haier, le géant de l’électroménager, possède dix centres de R&D, dont huit à l’étranger. Xiangsue Pharmaceutical a ouvert son premier centre européen il y a quelques mois. Huawei dispose de six centres dans le monde. Une boulimie de R&D qui s’explique par la nécessité pour les entreprises chinoises de se rapprocher des marchés qu’elles convoitent, mais aussi par une politique volontariste. Les autorités chinoises ont en effet établi un programme sur vingt-cinq ans visant à porter de 1,5 % à 2,5 % le ratio d’investissement de leurs entreprises. Un objectif qui reste bien en-deçà
L’abondance de projets de centres de R&D et la croissance exponentielle des brevets chinois sont des critères quantitatifs. Mais quid de la qualité des innovations chinoises ? C’est là que le bât blesse. Selon l’office chinois de la propriété intellectuelle (SIPO), 46,4 % des inventions chinoises deviennent caduques au bout de cinq ans. Aucune entreprise chinoise ne figure non plus au classement « top 100 global innovators », dressé par Thomson Reuters. Ce palmarès des entreprises les plus innovantes ne tient pas seulement compte des volumes, mais aussi du taux de réussite des dépôts de brevets, de la portée internationale du portefeuille de brevets, et de leur influence (mesurée par le nombre de citations dans les revues scientifiques). Des critères que ne satisfont pas les entreprises chinoises, même les plus en pointe, telles Lenovo ou Huawei.
Une lacune dont sont conscientes les autorités chinoises, par ailleurs désireuses de faire de l’innovation le moteur de l’économie chinoise. Le XIIème plan quinquennal, lancé l’an dernier, fait ainsi la part belle aux industries innovantes. Mais le volontarisme politique suffira-t-il à faire de la Chine le leader mondial de l’innovation ? La R&D chinoise a un atout en poche : la spectaculaire rapidité de son développement. Le taux de délivrance des brevets demandés en Chine par des entreprises locales atteint désormais 40 %, contre 55 % pour les entreprises étrangères.
Sophie Creusillet
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