C’est officiel, le groupe français Mobilitas, spécialiste du déménagement international de particuliers et d’entreprises, devient la première entreprise française à s’établir dans les 54 pays du continent africain, voire, selon ses dirigeants, la première au monde. « On est les premiers et les seuls entrepreneurs privés, entrepreneurs tout court, à être installés dans les 54 pays », s’est ainsi félicité Alain Taïeb, président du conseil de surveillance et représentant de la deuxième génération aux manettes de cette ETI familiale. Cet africanophile et afro-optimiste convaincu estime d’ailleurs que les deuxième et troisième entrepreneurs qui réaliseront la même prouesse seront également des Français. « Les groupe Bolloré Logistics et CMA CGM, a-t-il commenté, sont très proches du but, il leur faudra peut-être un ou deux ans pour être dans les 54 pays ». Un podium tricolore soit.
Pour l’occasion, Mobilitas a privatisé une partie du musée du Quai Branly à Paris, qui conserve dans ses collections quelque 70 000 objets d’Afrique subsaharienne, pour accueillir le 27 septembre une conférence de presse et une soirée de gala. Le groupe avait organisé une fête similaire en Afrique du Sud la semaine précédente, et devait se transporter à Londres la semaine suivante pour renouveler l’exercice.
« On déménage dans le monde 170 000 familles par an », s’est réjoui Alain Taïeb, lors de la conférence de presse. Mais si le déménagement reste un pilier de ses activités, l’entreprise fondée par ses parents en 1974 sous la marque AGS, s’est diversifiée, exerçant aujourd’hui trois métiers : le déménagement international, son métier d’origine, la « relocation » des cadres et de leur familles, et l’archivage physique et numérique.
La branche Executive Relocations du groupe accompagne les cadres qui sont mutés et leur famille, et gère pour eux l’ensemble des aspects liés à leur expatriation : de la recherche d’une école pour les enfants, aux démarches d’obtention d’un visa et d’un permis de travail, où encore à l’immatriculation d’une voiture. Son métier de logisticien a amené Mobilitas vers le métier d’archivage physique et numérique. La société gère ainsi le stockage et la numérisation des documents d’archive des entreprises, mais aussi des administrations.
« L’Afrique représente 40 % du poids du CA du groupe »
En presque cinquante ans, l’entreprise a tissé sa toile à l’international et grossi. Elle se présente aujourd’hui comme une ETI internationale de 3 400 salariés et de 300 millions d’euros de chiffre d’affaires consolidé, au capital 100 % familial. Elle est présente en Europe, en Asie –où elle a racheté Four Winds–, et en Afrique où le groupe a une présence en propre et à travers un réseau de joint-venture. Mais le continent, où Mobilitas emploie près de 2 810 personnes, est la cible stratégique du groupe. Le projet « Africa 54 », lancé il y a quelques années à peine, visait justement à le couvrir entièrement, en direct, et de façon durable. « On a considéré que l’Afrique est un réservoir de croissance qui venait compenser la croissance atone que nous avons ailleurs, en France par exemple », a expliqué Alain Taïeb, qui est également Conseiller du commerce extérieur de la France (CCEF) et préside la Commission Appui aux PME de leur Comité national.
L’Afrique représente 40 % du CA du groupe, une part qui devrait croître à 60 % dans les années à venir. Après Djibouti, l’Éthiopie, la Somalie, le groupe Mobilitas a en effet achevé son plan de couverture de l’ensemble du continent avec une ultime implantation aux Seychelles, dernière pierre à l’édifice du projet « Africa 54 ». Dans cet archipel où l’on parle l’anglais et le français, le groupe a noué une alliance à 50-50 avec un partenaire local. Ainsi, 23 ans après avoir ouvert son premier bureau en Afrique –Abidjan, Côte d’Ivoire, en 1993–, l’ETI familiale est implantée dans chaque économie du continent.
Mais c’est l’Afrique du Sud qui constitue aujourd’hui son plus gros marché. Viennent ensuite l’Angola, le Nigeria, le Kenya et la Côte d’Ivoire. Parmi ces cinq pays clés pour Mobilitas, « quatre ne sont pas francophones », a remarqué Alain Taïeb, qui regrette que « beaucoup d’entreprises françaises installées il y a longtemps en Afrique sont restées en Afrique francophone et n’ont pas franchi ne serait-ce que la frontière voisine du Ghana ou du Nigeria ».
Une présence ininterrompue sur le continent
Aujourd’hui, le groupe, bon exemple du concept « penser global, agir local » veut capitaliser sur la proximité qu’apporte l’étendue de son implantation. « Nous sommes présents dans 54 pays avec nos infrastructures, nos entreprises, nos camions, nos hommes », a insisté Paul Massardier, directeur des Opérations Afrique de Mobilitas.
En Afrique, l’ETI familiale opère essentiellement des déménagements intra-africains et accompagne principalement les grandes entreprises internationales (sociétés pétrolières), les institutionnels (ambassades), les organisations internationales, les Nations Unies, les particuliers et les militaires. Elle peut se vanter d’avoir eu une présence continue, malgré les événements dramatiques et les crises politiques qui ont touché certains pays.
« Notre position, c’est de rester, a souligné encore Paul Massardier. Nous sommes toujours restés, on n’est pas parti, nous avons toujours été présents ». Ce sont les personnels de Mobilitas qui ont déménagé les équipes de Bicici, la filiale de BNP Paribas en Côte d’Ivoire, lors du conflit politico-militaire qui a opposé les partisans de Ouattara et de Gbagbo. Mais l’entreprise a également accompagné les Africains pendant la crise sanitaire d’Ebola. « Au Liberia, en Sierra Leone, on a été un acteur de la lutte contre Ebola », a souligné Paul Massardier. Les équipes de Mobilitas au Liberia acheminaient le matériel de soin vers les centres de traitement. « Tous nos managers sont restés, aucun n’est rentré ! », a assuré le directeur des Opérations Afrique. Sans doute le meilleur gage de pérennité.
Venice Affre
Pour prolonger :
– Consultez notre Dossier Travailler avec l’Afrique en 2016
– Consultez le Dossier CCEF 2016 : à quoi servent les conseillers du commerce extérieur ?