C’est plutôt une bonne nouvelle par les temps qui courent : à l’occasion de son colloque annuel sur l’évolution des risques pays, le 5 février à Paris, Coface a annoncé plus de reclassements que de déclassements de ses évaluations pays, notamment dans les pays émergents et en développement (voir la carte mondiale des risques 2019 de Coface dans le document attaché à cet article).
C’est le cas pour trois pays africains dont le Mozambique (de E à D), qui affichent des réserves de change record depuis 2014 et une croissance supérieure à 3 %, du Rwanda (A4), qui recueille les fruits de sa dynamique de réformes et de son climat des affaires « en constante amélioration » et enfin de l’Angola (reclassé en C), pays producteur de pétrole dont les cours « restent à un niveau modéré malgré une forte volatilité » .
D’autres pays dépendant du pétrole bénéficient également de reclassements dont l’Azerbaïdjan (B), le Canada (A2), les Émirats arabes unis (A3) et Trinité et Tobago (B). Seul pays à avoir été déclassé depuis le début de 2019 : le Liban (passé en D), « pénalisé par des difficultés économiques persistantes ».
Mais ces nouvelles plutôt positives ont une portée limitée car globalement, l’assureur-crédit français affiche, en ce début d’année, une vision plutôt inquiète du climat des affaires et de l’évolution des risques d’impayés sur le plan mondial.
L’Europe, première source d’inquiétude
Le contexte, c’est le ralentissement de la croissance mondiale, freinée depuis la fin de 2018 par divers facteurs dont « la montée du risque politique, la forte volatilité des cours des matières premières, les contraintes d’offre » : Coface table sur un taux de croissance mondial de 3 % pour 2019, après 3,2 % en 2018 et 2017. La croissance sera ramenée cette année à + 1,6 % en zone euro et à + 2,3 % aux États-Unis.
La croissance du commerce mondial devrait continuer de ralentir cette année (+2,3 % seulement attendu cette année par Coface).
Dans ce contexte, la première source d’inquiétude est l’Europe de l’Ouest « qui, contrairement aux précédents retournements, s’est affaiblie avant les États-Unis », et sur laquelle pèsent à la fois le ralentissement économique mondial et les incertitudes politiques.
Coface anticipe que le nombre de défaillances d’entreprises augmentera dans 20 pays européens (sur 26 analysés), au rythme de +1,2 % en zone euro et de +6,5 % en Europe centrale. « Pour la première fois depuis la crise des souveraines en 2011-2012, les entreprises devront cette année faire face à deux écueils en même temps : le ralentissement cyclique et les risques politiques », commente Julien Marcilly (notre photo), économiste en chef de Coface.
Dégradation générale des risques du secteur automobile
Cette montée du risque de crédit pèse particulièrement, selon Coface, sur le secteur automobile qui, « après un cycle de croissance d’environ 8 ans, il montre désormais des signes d’essoufflement ».
Les pressions qui affectent cette industrie sont multiples sur le plan mondial : besoin d’investir, concurrence accrue, changement de modes de vie des consommateurs, adaptation nécessaire aux nouvelles normes environnementales anti-pollution… Or, ces investissements « doivent se réaliser dans un contexte d’arrivée à maturité du marché chinois et de montée du protectionnisme », observe Coface, ce qui fragilise le secteur.
Résultat : l’assureur-crédit a dégradé ses évaluations du risque du secteur automobile à « risque moyen » dans la quasi-totalité des pays d’Europe de l’Ouest ainsi que d’Europe centrale et de l’Est et à « risque élevé » en Amérique latine et en Amérique du Nord.
Le mécontentement social à surveiller en Europe
Mais ce n’est pas tout : le risque politique restera plus que jamais d’actualité en 2019 en Europe, avec, précise Coface, son indicateur de risque social « à son plus haut niveau depuis 2010 ».
À surveiller, dans ce contexte : les élections en Grèce mais aussi « d’éventuels votes anticipés en Italie, en Espagne et en Allemagne ». « Le mécontentement social qui se généralise et la montée de partis anti-européens prennent une ampleur suffisamment importante pour aboutir à un Parlement européen très fragmenté lors des élections européennes de mai 2019 » insiste Coface.
Risques politiques : l’Afrique est particulièrement à surveiller
Les pays émergents, qui sont exposés aux effets du ralentissement de l’économie et du commerce mondiaux, notamment des marchés développés, resteront également à surveiller. Un motif d’optimisme toutefois : « la modération de la croissance aux États-Unis a aussi un effet positif : en réduisant les anticipations de hausses de taux d’intérêt de la Réserve fédérale américaine, elle limite les risques de sorties de capitaux des marchés émergents » relève Coface.
Reste que, selon l’assureur-crédit français, de nombreux risques politiques resteront à surveiller cette année dans le monde émergent, en particulier en Afrique, « où les populations ont désormais davantage de moyens d’exprimer leurs frustrations (triplement du taux d’accès à internet depuis 2010) dans un contexte de calendrier électoral chargé (Nigeria, Afrique du Sud et Algérie notamment) ».
Desk Moci