Chez Coriolis, on a deux passions : l’industrie et l’innovation. Le développement international est, depuis le départ en 2001, intégré à la stratégie globale, avec le souci de soigner les clients. Pas étonnant, dans ce contexte, que cette PMI du Morbihan soit devenue un des trois leaders mondiaux de la robotique pour la production de pièces composites pour l’aéronautique.
Photo : Ludovic Rincel (à droite), directeur Ile-de-France chez Dachser, a remis le 23 novembre à Paris lors de la dixième cérémonie du Palmarès des PME & ETI leaders à l’international le prix Entreprise exportatrice de l’année du Moci à Vincent Dwornik, directeur général de Coriolis Composites.
« Nous sommes un des trois leaders mondiaux de notre secteur et dans certains domaines précis, nous sommes le leader. Et c’est parce que l’on est au top technologique que les grands industriels viennent nous voir ». De fait, comme nous l’indique ainsi Vincent Dwornik, le directeur général de Coriolis, concepteur et fabricant de têtes de robots pour la production de pièces en composites, cette PMI de 170 salariés installée près de Lorient, dans le Morbihan, compte aujourd’hui une soixantaine de machines installées chez les grands de l’aéronautique mondiale, en Europe, mais aussi au Canada et en Chine. L’Européen Airbus, le Canadien Bombardier, le Chinois Comac, le Français Dassault, le Russe OAK, mais aussi les équipementiers Stelia Aerospace, Daher, Premium Aerotec, font partie de ses clients.
Une fibre innovatrice et conquérante
Cofondée initialement par trois jeunes ingénieurs passionnés de voile qui voulaient développer des coques de bateaux en matériaux composites, Coriolis a gardé cette fibre innovatrice et conquérante des débuts qui lui a permis de s’imposer dans le domaine hautement technologique qu’est l’aéronautique. Les trois cofondateurs sont toujours là pour l’entretenir : Clémentine Gallet, qui dirige l’entreprise à 44 ans, et son mari Alexandre Hamlyn, qui anime le commercial et le marketing, détiennent toujours la majorité du capital (aux côtés de Bpifrance et ACE, qui ont 15 % environ chacun, le reste étant détenu par des individuels), tandis qu’Yvan Hardy a cédé ses parts mais reste directeur groupe. Clémentine Gallet, personnellement investie dans l’actuelle campagne de l’industrie française pour accélérer sa modernisation et mettre fin à son déclin (programme Industrie du Futur, French Fab…), n’est pas la dernière à aussi arpenter les salons internationaux pour promouvoir ses machines. « On est tous dans le même état d’esprit : on ne supporte pas l’idée que la France soit perdue pour l’industrie » souligne Vincent Dwornik.
Rester maître de nos savoir-faire
Ce dernier, qui a fait une partie de sa carrière dans l’industrie (automobile notamment) et a vécu certains échecs dans ce secteur, insiste sur cette passion de l’industrie et de son développement qui habite l’entreprise : « ici, vous avez des gens qui sont ingénieurs mais qui sont aussi pragmatiques : ils font des produits qui marchent, dans l’intérêt de leurs clients ! ».
Coriolis investit chaque année près de 15 % de son chiffre d’affaires dans la R&D, mais veille à ce que cet esprit créatif existe dans tous les services, au-delà de la rigueur industrielle nécessaire à son activité. « Nous passons notre temps à déposer des brevets, car notre stratégie est de rester maîtres de notre savoir-faire », souligne Vincent Dwornik.
En outre, l’entreprise, qui assure elle-même la fabrication de certains composants de ses machines et leur assemblage final, fait les développements et les démonstrateurs en interne. Cette phase essentielle est aussi une partie intégrante de sa stratégie commerciale, qui vise avant tout à rassurer les clients sur la fiabilité de la PMI. Une force précieuse pour les convaincre d’acheter ces machines high-tech qui coûtent, selon les modèles, de 1 à 10 millions d’euros. « Pour décrocher un contrat, la première étape est de démonter la faisabilité au client : il faut faire l’étude, mais aussi réaliser une démonstration. Tout le monde s’y met et lorsque les clients viennent assister à la démonstration, non seulement ils voient que la machine fonctionne, mais aussi que toutes les composantes de l’entreprise sont engagées sur son projet ».
Donner confiance aux clients
Le sens commercial et du service client est en l’occurrence le troisième atout de cette PMI, à la hauteur des exigences de la clientèle internationale qu’elle vise. Quand l’entreprise livre un client, quelle que soit sa localisation géographique, ce n’est pas seulement une machine, mais toute une équipe d’ingénieurs et de techniciens qui va assurer, durant 4 à 6 mois, l’installation, la mise en route, et la formation du personnel sur place. « Dans notre entreprise, plus de 60 % des collaborateurs tournent à l’international, de l’ouvrier qualifié aux ingénieurs, explique Vincent Dwornik. Cela donne confiance aux clients ». La constitution d’un réseau international y contribue aussi.
Le goût du voyage et la pratique des langues étrangères font d’ailleurs partie des critères de recrutement : chez Coriolis, on parle au minimum l’anglais, et de nombreuses nationalités sont représentées. La PMI est sans aucun doute l’un des clients les plus assidus des compagnies qui desservent les aéroports de Lorient Lann-Bihoué, Nantes ou Brest.
Ces dernières années, Coriolis a renforcé son réseau à l’international par la création de filiales commerciales, dont les deux dernières ont été ouvertes l’an dernier à Seattle, aux États-Unis, et à Shanghai, en Chine. Elle dispose de trois autres filiales commerciales en Allemagne (Augsbourg), au Royaume-Uni (Bristol) et au Canada (Montréal). Les résultats sont au rendez-vous, avec une croissance à deux chiffres sans discontinuer ces dernières années : 28 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2017, dont 68 % à l’export, et, l’an dernier, un bond de 80 % de son chiffre d’affaires à l’international grâce à la montée en puissance d’un gros programme chinois pour le compte de Comac. Si en 2017, la Chine a généré près de 40 % des exportations, « en 2018, on s’attend à ce que le moteur soit l’Amérique du nord » souligne le directeur général. Les États-Unis constituent le marché cible prioritaire de la PMI.
Si 90 % du chiffre d’affaires de Coriolis viennent de l’aéronautique, la PMI s’active pour diversifier ses débouchés, en premier lieu l’automobile. Le rachat cette année d’une PME de l’Orne de 20 personnes spécialisée dans l’enroulement filamentaire, MF Tech, la première croissance externe pour Coriolis, est à replacer dans cette perspective : cette technologie, qui s’inspire du filage du ver à soie, est utilisée notamment dans l’automobile. Cela prendra du temps, car l’industrie automobile n’est pas encore tout à fait prête à faire des matériaux composites un moteur d’innovation et de croissance. Mais avec l’avènement de la voiture électrique, les dirigeants de Coriolis sont convaincus qu’elle y viendra : « Notre objectif à 5 ans est de démocratiser nos technologies dans l’automobile, grâce à des applications spécifiques » explique Vincent Dwornik. Et, en attendant, la PMI compte poursuivre sa croissance dans le secteur aéronautique grâce à toujours plus d’innovation et de nouveaux produits.
Christine Gilguy