L’Asie mène la course des investissements industriels loin devant les autres régions du monde, selon l’édition 2020 du Baromètre mondial de l’investissement industriel établi à l’initiative des groupes d’ingénierie Fives, Edf et l’Institut de réindustrialisation. Mais la zone asiatique est confronté actuellement à de nombreux mouvements de relocalisation en raison de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine.
Sur les 18 183 investissements industriels dans le monde annoncés de 2016 à 2020, 53 % (8 358) ont pour destination l’Asie et représentent dépenses d’investissement cumulées de 3 455 milliards de dollars (Md USD). Cette zone se situe loin devant le continent américain (20 % des projets, Md USD) et l’Europe (13 %, 847 Md USD).
Si l’Afrique ne concentre que 9 % des investissements industriels annoncés, les montants investis se rapprochent néanmoins de ceux de l’Europe avec 613 Md USD, en grande partie en raison de l’activité minière. Enfin, rapportée à sa part dans la population mondiale, l’Océanie est le continent les plus attractif avec 4 % des investissements annoncés et 275 Md USD de dépenses cumulées.
Près de 90 % des investissements en Asie sont intracontinentaux
Signe d’une forte intégration régionale, 89 % des investissements en Asie sont originaires du même continent, ce qui fait de la région la plus autosuffisante, juste devant l’Europe (64 % d’investissements intracontinentaux), les Amériques (64 %), l’Afrique (50 %) et l’Océanie (38 %).
Moins dépendante de financements en provenance de régions du monde dont les croissances sont encore fortement impactées par la crise, l’Asie s’en sort donc mieux même si les montants investis entre janvier et août 2020 ont baissé de 20 % en glissement annuel contre – 48 % dans les Amériques, – 47 % en Europe, – 80 % en Afrique et -98 % en Océanie.
Dynamique en termes de nombre de projets et de montants investis, l’Asie est également en pleine reconfiguration. En effet, selon les auteurs du baromètre, la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine a durement impacté ce dernier pays : en 2019-2020, près de 4 Md USD ont été finalement investis dans d’autres pays, les entreprises motivant leur décision par la volonté d’échapper aux taxes imposées par les États-Unis pour leur production chinoise. Taïwan est le principal bénéficiaire de ces mouvements de relocalisation avec 70 % du nombre d’investissements et 62 % des montants investis, suivi du Vietnam (10 % des projets et 2 % des montants) et l’Inde (7 %, 20 %).
L’industrie manufacturière arrive en tête des secteurs
Par secteur, sur le plan mondial, c’est l’industrie manufacturière (chimie, agroalimentaire et automobile en tête) qui bénéficie le plus de ces investissements avec 56 % du nombre de projets (plus de 3 000 Md USD).
Viennent ensuite la production et distribution d’électricité, les mines et les carrières qui représentent ensemble un peu moins d’un quart du nombre d’investissements mais près de la moitié des montants investis.
Les auteurs du baromètre notent d’importants changements en 2020 : tandis que les investissements dans la production et la distribution ont été réduits de moitié par rapport à 2019, ceux dans les mines et les carrières ont quasi disparu. Une tendance, qu’ils attribuent aux conséquences de la pandémie de Covid-19 et à une baisse du prix du pétrole.
Les pays africains ne sont pas en reste
Afin d’obtenir un panorama de l’innovation dans le paysage industriel mondial, ce baromètre passe au crible les investissements en fonction de six critères de « l’usine du futur » : la flexibilité, la numérisation, l’efficacité énergétique, les efforts sociaux, les efforts territoriaux (soit les décisions visant à améliorer les relations entre un site de production et les communautés locales) et les efforts environnementaux.
Les meilleures notes sont obtenues par trois types de production en lien direct avec la nature : l’agriculture, le traitement des déchets et le traitement des eaux. Dans l’industrie manufacturière, le score de l’usine du futur, en particulier pour les efforts environnementaux et l’efficacité énergétique, est particulièrement élevé dans le secteur du papier et du carton, réputé très polluant.
Si en moyenne le score « usine du futur » établi par ce baromètre place économies occidentales en tête, certains pays africains obtiennent de très bons scores (avec cependant peu d’investissements).
C’est le cas du Mali qui obtient un score élevé pour les critères de flexibilité et d’efficacité énergétique, principalement pour des projets dans le domaine de l’énergie. Le Burkina Faso affiche également de bons scores pour le efforts environnementaux et territoriaux. Néanmoins, le score moyen (0,93) est encore extrêmement faible, l’échelle allant de 0 à 12. Toutes régions confondues, entre 2016 et 2020, ce sont les efforts territoriaux, l’efficacité énergétique et la flexibilité qui ont le plus diminué. Les efforts environnementaux et la numérisation ont légèrement ralenti tandis que les efforts sociaux ont augmenté, passant de critère le plus bas à l’avant-dernier.