Le bilan et les perspectives de la politique de financement export (PFE) de l’Etat présentée aux entreprises le 2 février, lors de l’événement annuel Bercy France Export, sera ambitieuse dans le cadre de l’effort de relance, après un bilan 2020 atypique, marqué par les effets de la crise sanitaire liée au Covid-19.
Pour François Lefebvre, le directeur général de Bpifrance assurance export, le bilan de l’année 2020 en matière de financements export montre la « volonté d’accompagnement » de l’État vis-à-vis des entreprises à l’exportation dans le contexte de crise sanitaire inédite, et à quel point il « leur ouvre son bilan » à travers les garanties qu’il met à la disposition de leurs projets dans ce domaine.
Les ventes de pas moins de 100 avions ont été prise en garantie à l’export l’an dernier, contre 5 à peine en 2019, un record : la Covid-19 et les restrictions aux déplacements qu’elle a entraînées a mis à genoux le transport aérien et, par ricochet, l’aéronautique. L’État a donc joué un rôle « contracyclique » en pesant de tout son poids financier pour couvrir les transactions qui correspondant aux acquisitions des compagnies aériennes et loueurs.
Record pour les cautions et garanties de préfinancement
Selon les chiffres du bilan d’activité livré par François Lefebvre, en assurance-crédit export, qui soutient des projets à long terme, on est loin de l’effondrement : des garanties export pour près de 12,7 milliards d’euros (Md EUR) de contrats ont été acceptées l’an dernier, un peu plus que les 11,7 Md de l’année précédente. Et, sur un total de 431 entreprises, « les deux tiers des bénéficiaires sont des PME et ETI [247 exactement] » a-t-il assuré.
Par zone géographique, le top 5 est composé de l’Europe (21 %), l’Asie (12 %), l’Afrique (10 %), le Moyen Orient (4,3 %) et les Amériques (3 %). Par secteur, le transport terrestre et maritime concentre 30 % des garanties acceptées, suivi de la défense (27 %), de l’aéronautique (23 %), et de l’énergie et du spatial (7 %).
L’assurance prospection, produit phare pour les PME, a un peu plus souffert des effets de l’arrêt ou du report des opérations de prospection durant une partie de l’année : 192 M EUR couverts en 2020, contre 239 M en 2019, et le nombre d’entreprises bénéficiaires a chuté de -17,7 %, de 1490 à 1226. Les restrictions aux déplacements internationaux, le basculement de nombre de salons professionnels en format digital, a pesé et la prolongations d’un an des contrats en cours dans le cadre du plan de soutien a été une décision bienvenue.
En revanche les garanties de cautions (pour les appels d’offres internationaux) et de préfinancement des exportateurs (pour lancer la fabrication des commandes) ont le vent en poupe, un signe que face à des banques plus frileuses, les entreprises ont sollicité beaucoup plus les aides d’État pour boucler leur financement et continuer à être actives : 177 M EUR de garanties acceptées pour les cautions, après 160 M l’année précédente ; et surtout, le chiffre record de 911 M EUR acceptés pour les garanties de préfinancement, un quasi-doublement par rapport à 2019 (567 millions).
L’encours total des garanties gérées par Bpifrance assurance export s’élève à 59,6 Md EUR à fin décembre 2020, au bénéfice de 11069 utilisateurs.
La montée en puissance des instruments du Trésor
Concernant les instruments gérés par la Direction générale du Trésor (DG Trésor), la tendance forte qui ressort de la présentation de Vincent Marinet, chef du bureau aide-projet, est leur montée en puissance progressive, qui se poursuivra en 2021.
Concernant les prêts du Trésor (prêts concessionnels et prêts directs), qui se négocient d’État à État et permettent de financer des projets plus lourds, notamment d’infrastructures, ayant des retombées en termes de contrats d’exportation, les montants engagés ont atteint 318 M EUR en 2020, après 283 M en 2019 et 170 M en 2018.
Sept projets ont été soutenus, dont trois au Kenya, avec lequel la France a resserré ses liens ces trois dernières années, et les autres en Côte d’Ivoire et en Mongolie. Exemples de projets : une ligne d’interconnexion électrique au Kenya (entre un cratère géothermique et une station) ou des infrastructures sportives de proximité en Côte d’Ivoire (des petites arénas).
Quant au Fasep (Fonds d’étude et d’aide au secteur privé), qui finance via des subventions des études de faisabilité et des démonstrateurs, le développement des appels à projets thématiques a dopé l’activité : le nombre de projets à bondi à 45 en 2020, dont 18 liés à un appel sur des projets innovants en matière de déchets en lien avec le Sommet Afrique-France, annulé pour cause de pandémie. Le montant attribué a atteint 25,1 M EUR. Sur les 29 pays ciblés par les projets, 62 % étaient en Afrique et 18 % en Amérique latine.
Des objectifs ambitieux pour 2021
Pour 2021, l’État sera au rendez-vous de la relance export. Pour l’assurance-prospection, l’enveloppe budgétaire a été augmentée grâce à l’apport du volet export du plan de relance (130 millions sur les 247 millions débloqués iront à l’assurance prospection).
L’objectif est de permettre de financer 1 Md EUR de dépenses de prospection pour 6000 entreprises sur les trois prochaines années, avec à la clé 6 Md EUR de chiffre d’affaires supplémentaires.
Il y aura davantage de « petits tickets », a confirmé François Lefebvre, grâce à la nouvelle assurance prospection accompagnement, dont la capacité a été plafonnée à 40 000 EUR par projet, mise en place début janvier à l’attention des primo exportateurs, startup et petites entreprises. Un objectif ambitieux qui montre encore une fois le volontarisme de l’État dans le soutien aux entreprises à l’export, notamment les PM
D’une manière générale, les capacités de l’assurance-crédit restent très importantes, le plafond de prise en garantie autorisé par le Parlement étant, selon les fonctionnaires du Trésor, loin d’être atteint.
Concernant les crédit export direct de Bpifrance (crédits acheteurs et crédits fournisseurs), produit ciblé pour les projets des PME et ETI, Nicolas Dufourcq, son directeur-général, qui présentait son bilan le 4 février, a annoncé que l’objectif de la banque publique pour 2021 était d’atteindre un montant global de 500 millions d’euros, plus du double de 2020 (217 M EUR, dont 80 % en Afrique).
Même volontarisme du côté des instruments du Trésor : l’enveloppe budgétaire du Fasep a été quasiment doublée à 50 M EUR (après 25 M EUR en 2020), de même que celle des prêts du Trésor (1 Md EUR disponibles pour 2021, après 600 M EUR en 2020).
Dernière tendance forte : toutes ces aides n’échapperont pas au « verdissement » voulu par le gouvernement. Les projets « verts », contribuant à la lutte contre le réchauffement climatique et à la préservation de l’environnement seront favorisés par les opérateurs, qu’il s’agisse d’octroyer de l’assurance-crédit export, de l’assurance prospection, des Fasep ou des prêts du Trésor.
Christine Gilguy
*Pour en savoir plus : la présentation du bilan et des perspectives de la politique de financement export est en ligne au lien suivant : https://www.tresor.economie.gouv.fr/Evenements/2021/02/02/bercy-france-export-2021