Au cours d’un voyage au Proche-Orient entre le 17 et le 19 novembre, François Hollande se déplacera dans les Territoires palestiniens. Cette visite, effectuée après celle du ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, fin août, est éminemment politique, au moment où Palestiniens et Israéliens ont repris le dialogue sur le processus de paix. L’économie n’est, pour autant, pas oubliée, puisque les ministres Pierre Moscovici (Économie et finances) et Fleur Pellerin (PME, innovation et économie numérique) accompagneront le chef de l’État, ainsi qu’une délégation du Mouvement des entreprises de France (Medef).
« La partie économique tournera autour de l’aide au secteur privé et aux institutions publiques et des grands projets », confiait à moci.com Julien Buissart, le chef du Service économique au consulat général de France à Jérusalem (à gauche sur notre photo, en compagnie de Mazen Abu Hamdan, directeur de la société franco-palestinienne Jaffa Newsolar Power, à droite), lors d’un séminaire de la Chambre de Commerce franco-arabe (CCFA), le 13 novembre, intitulée « La Palestine, des opportunités d’affaires à découvrir ».
Inauguration d’un institut des finances publiques
Durant le séjour de François Hollande, un institut des Finances publiques doit être inauguré. L’Agence française de développement (AFD) apporte une aide très diversifiée, allant du secteur privé à l’eau, en passant par le développement rural et urbain. Paris a également signé avec l’Autorité palestinienne un protocole de dons visant à soutenir l’acquisition de matériel français par les PME palestiniennes. Cette subvention peut varier entre 35 et 50 % du montant d’un achat et dans une limite de 5 000 euros – 1 million dans la zone de Bethléem.
Selon Pierre Duquesne, l’ambassadeur chargé des questions économiques, de reconstruction et de développement au ministère des Affaires étrangères, la France a apporté quelque 7,7 milliards de dollars d’aide générale (budgétaire, humanitaire, aide-projet…), s’engageant notamment « dans les réformes du secteur de l’eau et de l’électricité, des marchés publics, de la sécurité, la réduction de la bureaucratie pour les entreprises ou encore le ciblage de la sécurité sociale pour les plus pauvres ».
Rappelant que début 2007 « la conférence de Paris I avait permis de dégager une aide financière de trois milliards de dollars sur trois ans », le ministre palestinien des Finances, Shoukri Bishara, lors du séminaire de la CCFA, s’est déclaré persuadé que la France « organisera le moment venu une deuxième conférence internationale ». Des propos repris par Pierre Duquesne, qui a confirmé que Paris était prêt à accueillir un tel évènement, à condition que « les Palestiniens en fassent la demande » et que « les perspectives politiques » reposent sur « un véritable plan stratégique » allant « au-delà du simple soutien au secteur privé et aux services sociaux » et permettant de pérenniser « un État palestinien indépendant ». En clair, cette nation devra maîtriser ses frontières et orienter librement ses frontières, sans en référer à Israël.
De grands projets dans l’électricité et l’eau
Les opportunités d’affaires sont multiples, de la valorisation des terres agricoles à l’industrie manufacturière, en passant par la transformation et le conditionnement de produits agricoles et alimentaires, la gestion des hôtels, le développement des grandes marques de restauration, d’habillement et de boulangerie ou encore le secteur de l’extraction des pierres, dont le parc de machines doit être renouvelé.
Dans l’électricité encore, les Territoires palestiniens disposent d’une centrale dans la bande de Gaza. « D’autres unités à gaz ou solaires sont indispensables », estime Julien Buissart. Ainsi, créée fin 2012 à Ramallah, la joint ventrue franco palestinienne Jaffa Newsolar Power (6 millions d’euros de capital) « met en place un projet de production électrique solaire au sud de la Cisjordanie », explique son directeur, Mazen Abu Hamdan. Un projet de 30 millions d’euros, qui bénéficie de crédit bancaires à hauteur de 20 millions.
Dans l’eau, six à sept stations d’épuration, d’un montant unitaire de 20 à 40 millions d’euros, sont en voie de finalisation ou vont être construites. La France a encore promis 10 millions d’euros pour un chantier de dessalement de l’eau de mer à Gaza. Une initiative retenue par l’Union européenne, labellisée dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée (UpM) et soutenue par la Banque islamique d’investissement (BID), la Banque européenne d’investissement (BEI), qui s’est engagée pour 4 millions d’euros dans l’étude de faisabilité, et de la Banque mondiale qui réunit les financements pour les études complémentaires.
De fait, dans les Territoires palestiniens, la pluviométrie est faible, inférieure ainsi à 250 millimètres par an, et l’eau est rare, encore plus à Gaza, qui abrite l’Autorité palestinienne de l’eau, qu’en Cisjordanie. Selon Julien Buissart, « pour convaincre les bailleurs de fonds, reste à lever l’incertitude sur l’alimentation électrique de l’unité de dessalement », dont il espère le démarrage vers 2016-2017.
Le projet franco-palestinien de zone industrielle à Bethléem
« Ce projet est soutenu par Israël, tout comme celui de la zone industrielle de Bethléem, une initiative franco-palestinienne dans laquelle la France a engagé 8 millions d’euros pour la construction des infrastructures externes – sous-station électrique, réservoir d’eau, route d’accès, station de traitement des eaux usées… », précise Pierre Duquesne. « Nous sommes en négociation pour faciliter le passage aux frontières pour l’export », a-t-il précisé à Paris.
Schneider Electric a été la première entreprise à s’installer sur cette zone, créée à la suite de la visite du président Nicolas Sarkozy en juin 2008, pour y former des ingénieurs et techniciens spécialisés dans l’installation des équipements électriques. France Telecom lui aussi réalise de la formation sur place. Mais s’agissant d’investissements directs étrangers (IDE), « à l’exception du Royaume-Uni, les Occidentaux sont encore absents, les IDE étant jordaniens, qatari, égyptiens ou saoudiens », constate Julien Buissart.
« De façon générale, jusqu’à présent, malgré des conditions d’investissement favorables, observe encore le chef du Service économique au consulat général de France à Jérusalem, les investissements directs étrangers sont faibles dans les Territoires palestiniens, en raison de l’instabilité politique et de la taille du marché ». Et pourtant, Total ou Peugeot, la première marque automobile vendue sur place, y ont trouvé de bons agents. En outre, les hommes d’affaires palestiniens sont friands de technologie française.
« Je suis frappé par la dynamisme de entrepreneuriat palestinien, y compris féminin », témoignait à Paris Bernard Soulage, président du Conseil régional de Rhône-Alpes, chargé de l’Europe et des affaires internationales. A l’initiative du Centre économique franco-palestinien subventionné par la Région, l’élu français pilotera une mission économique dans les Territoires palestiniens en janvier prochain. L’organisation en est confiée à l’agence Erai, bras armé du Conseil régional à l’international.
François Pargny
Pour en savoir plus :
– Service économique
Tél. : 00 972 2 582 89 95
[email protected]
– Agence française de développement
Tél. : 00 972 2 540 0423/581 49 46
[email protected]
– Bethlehem Industrial Estate (BMIP)
Tél. : 00 972 2 275 5177/274 6438
[email protected]
– Service économique de la Mission de Palestine en France
Tél. : 01 48 28 66 00