C’est une première dans le secteur maritime : l’organisation des armateurs, Armateurs de France, a co-signé le 10 octobre avec cinq organisations syndicales –UGICT CGT, CGT, CFDT, CFE CGC, CFTC– une pétition destinée au Premier ministre Jean-Marc Ayrault appelant « à une réforme immédiate de la loi du 31 décembre 1992, relative à la sécurité des approvisionnements stratégiques en produits pétroliers ». Motif de cette union sacrée tout à fait inédite dans un secteur plutôt réputé pour ses conflits sociaux « durs » : la sauvegarde du pavillon français pour le transport de produits énergétiques.
Ce que demande ces organisations unanimes : étendre la réservation de pavillon, jusqu’à présent limitée au pétrole brut (à hauteur de 5,5 %), à tout les produits raffinés importés, mais également au gaz et au charbon. Face à la réduction des capacités de raffinages françaises (cf la fermeture de Petroplus), les acteurs de cette filière, en crise depuis 2008, anticipent une nouvelle baisse des importations de pétrole brut au profit de produits transformés, donc une réduction de la part d’activité, en volume, des navire sous pavillon français.
« A chaque fois que nous perdons des navires, nous perdons également des emplois de navigants français hautement qualifiés, qui sont au cœur de notre métier, argumente le président d’Armateurs de France, Raymond Vidil. Il sera bientôt impossible de maintenir une filière car nous n’aurons plus suffisamment de marins français formés et qualifiés. Or sans navire et sans marins français pour approvisionner notre pays en pétrole ou en charbon, il n’y a plus d’indépendance stratégique ».
Cet appel inédit témoigne d’une forte impatience du secteur, qui craint que les conclusions d’un rapport que le gouvernement a commandé sur le sujet ne soit enterré. Il s’agit du rapport conjoint du Conseil général de l’Environnement et du développement durable et du Conseil général de l’Économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies sur « l’Évaluation de l’obligation de détention de capacité de transport sous pavillon français inscrite dans la loi du 31 décembre 1992 portant réforme du régime pétrolier ». Il a été co-rédigé par Philippe Maler, Philippe Guignard et René-François Bernard.
Selon Armateur de France, ce rapport confirmerait « la nécessité de maintenir une capacité minimale de transport maritime sous pavillon national, afin de répondre en temps de crise ou de pénurie aux besoins en énergie du pays et de ses forces armées ». Mais il n’a toujours pas été rendu public.
C.G.