Pierre Gattaz veut inscrire le secteur privé français « dans la durée », et dans le cadre d’un «partenariat gagnant-gagnant». Dix ans après de dernier voyage d’un président du Medef en Algérie (2008), le patron des patrons français va se rendre à Alger, les 7 et 8 février, à la tête d’une délégation d’une soixantaine de chefs d’entreprises de tous les secteurs : infrastructures, transport, construction, aéronautique, spatial, défense, banque, environnement, sécurité, numérique, etc.
« Un tiers des entreprises sera des PME », a-t-il précisé, lors d’une conférence de presse, le 5 février, donnée conjointement avec Jean-Louis Chaussade, directeur général de Suez et président du Conseil de chefs d’entreprise France-Algérie de Medef International.
Le Medef va signer deux MOU avec le FCE
A cette occasion deux memorandums of understanding (MOU) seront signés avec le Forum des chefs d’entreprises (FCE). « C’est le patronat qui est à même d’avancer avec nous » a indiqué Pierre Gattaz en réponse au Moci, qui s’interrogeait sur le choix de cette organisation plutôt que d’une autre, avant de préciser que le Medef « travaillait aussi avec les autres patronats algériens ».
Le premier MOU sera conclu le 7 février. A la demande du FCE, les relations vont être renforcées. Un forum des affaires algéro-français sera organisé, présidé côté français par Jean-Louis Chaussade. « L’objectif est d’avoir des réunions plus fréquentes et d’accroître les échanges », s’est félicité Léonard Cox, conseiller spécial de Pierre Gattaz.
Le second MOU sera signé, le 8 février, par une section du FCE, le Jil’FCE, réservé aux chefs d’entreprises de moins de 40 ans, et Agyp (Active Growth & Youth Programs / Programmes pour la Croissance et la Jeunesse Active), un réseau animé par le Medef, qui regroupe les patronats de France et d’Afrique et d’autres acteurs (entrepreneurs, institutionnels, acteurs de l’éducation/formation, entreprises et associations). « Le but sera de permettre à des jeunes algériens de se lancer dans l’entreprenariat, après avoir bénéficié d’une formation adaptée de cinq semaines », a précisé Léonard Cox.
Entre ces deux accords, Engie et la compagnie nationale algérienne d’hydrocarbures Sonatrach signeront également un MOU dans les domaines de l’énergie bas carbone et des renouvelables. Déjà acheteur à long terme de gaz naturel liquéfié (GNL) à Sonatrach et présent dans l’efficacité énergétique et les solutions environnementales, le groupe français devrait ainsi contribuer à la diversification indispensable d’un pays dépendant des exportations d’hydrocarbures.
P. Gattaz : il faut « travailler filière par filière »
Pendant la durée de son séjour à Alger, Pierre Gattaz devrait rencontrer une demi-douzaine de ministres, dont le Premier ministre Ahmed Ouyahia, et le ministre du Commerce, Mohamed Benmeradi. « Les points de blocage feront partie des discussions », a précisé au Moci Pierre Gattaz, à propos de la décision récente du gouvernement algérien de suspendre temporairement les importations de 851 produits *. Une mesure, qui va à l’encontre d’une ouverture sur le monde et qui s’ajoute à la règle fort décriée du « 51/49 % », qui oblige tout étranger à céder la majorité d’un projet d’investissement à des intérêts locaux.
Pour le président du Medef, « si on veut diversifier l’économie, alors il faut que les entreprises puissent monter en gamme » et « ce n’est pas en étant brutal par des décisions sur les droits douane et les interdictions d’importer qu’on peut y parvenir ». Au contraire, a-t-il affirmé, « on risque de tout bloquer ». Pour Pierre Gattaz, la bonne solution serait de « travailler filière par filière, voire entreprise par entreprise, d’imaginer, par exemple, pour l’aéronautique ou l’automobile, des programmes à cinq ans ».
J-L. Chaussade : « il faut permettre les importations importantes »
« La question que nous devons nous poser, a renchéri Jean-Louis Chaussade, est de savoir comment on protège les fondements de l’économie algérienne et on développe en même temps des filières pour avoir une économie diversifiée ». Il a ainsi cité le cas de l’industrie automobile « en phase de démarrage » avec, notamment, l’implantation de Peugeot. « Pour que les entreprises tournent, a assuré le président du Conseil des chefs d’entreprises France-Algérie de Medef International, il faut de la production et des importations. Et donc il faut permettre les importations importantes ».
« On veut un partenariat gagnant-gagnant, a encore souligné Pierre Gattaz. On veut créer une base économique, créer de l’emploi local, quelque soit la base politique ». Il n’y aura pas de grand contrat de signer pendant ce déplacement. « Nous sommes des facilitateurs, notre ambition est de casser des murs, d’établir des relations de confiance à long terme », a encore ajouté le patron des patrons. Pour les PME, il s’agit de les aider à trouver des partenaires.
François Pargny
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