Dernière coopérative indépendante de l’Est de la France, Alsace-Lait, positionnée sur la fabrication de lait liquide et de produits frais, pousse un peu plus les feux à l’international. Avec l’appui du fonds Build-up international de Bpifrance, elle vient de boucler une opération de croissance externe, en devenant l’actionnaire majoritaire de son partenaire local depuis 2015 : Maison Riviera.
La coopérative Alsace-Lait franchit un nouveau jalon dans son internationalisation. Après être sortie des frontières de son territoire alsacien natal en acquérant Savoie Yaourt en 2009, la structure, qui affichait 105 millions de chiffre d’affaires pour 250 salariés en 2019, est devenue le premier actionnaire de l’entreprise québécoise Maison Riviera, avec laquelle elle avait amorcé le virage de son internationalisation il y a six ans en nouant un partenariat.
L’usine historique de Sorel-Tracy, à 45 minutes de Montréal en Montérégie, s’approvisionne en lait de vache, biologique et de chèvre auprès de fermes locales dans un rayon de moins de 60 km autour de ses installations de production ou auprès des producteurs de lait du Québec (PLQ).
Maison Riviera produit des yogourts, des fromages, du beurre, de la crème, du lait et des produits végétaux, soit près de 195 articles vendus dans les supermarchés. Le fabricant privilégie le haut de gamme et se présente comme un créateur de « tendances laitières » avec des collections de yaourts dont une baptisée « Versailles » au bouquet framboise-menthe. Un marketing au petit accent frenchy et précieux, taillé sur mesure pour séduire le marché nord-américain.
Comme le note Yannick Verchère, directeur d’investissement chez Bpifrance : « accompagnée par Alsace-Lait, Maison Riviera a réussi en quelques années à repositionner complétement son offre en construisant un univers de marque fort basé sur l’innovation produits (« petits pots en verre », yaourts végétaux, …) ».
Un ancrage aux portes du marché prometteur des USA
La coopérative française, présidée par Michel Debes, a connu une forte croissance de son activité depuis sa création il y a 40 ans. Elle figure ainsi dans le top 20 de l’industrie laitière en France et est en quatrième place en France sur le segment des fromages frais. Le Grand Est reste d’ailleurs une région de production laitière importante. Avec près de 2,3 milliards de litres livrés à l’industrie en 2018, elle occupe la sixième place des régions françaises pour sa production de lait de vache.
L’opération qu’elle vient de boucler au Canada, en reprenant la participation de la famille Chalifoux dans Maison Riviera pour un montant non divulgué, permet à Alsace-Lait de s’arrimer solidement au continent américain. Cet approfondissement des liens avec son partenaire québécois devrait apporter un nouveau souffle à l’export à Alsace-Lait.
« En Europe de l’Ouest, le marché des produits laitiers est mature, en France nous faisons face à un recul de la consommation et en Russie, les autorités sont fermées à l’importation de tout produit agroalimentaire », confiait Frédéric Madon, le directeur général d’Alsace-Lait en mai 2019 à nos confrères de Traces Ecrites, média local suivant l’actualité économique du Grand Est et de la région Bourgogne Franche Comté.
Les Nord-américains ne sont pas de gros mangeurs de yaourts mais le marché représente néanmoins une manne de plusieurs milliards de dollars. En 2018, les ventes en supermarchés (référencement en moyenne de 300 à 350 produits) s’élevaient à 8,7 milliards de dollars avec Danone, Chobani et General Mills se partageant la majeure partie du gâteau (environ 70%), selon le cabinet d’études Euromonitor International.
Si le goût et le prix restent les deux premiers facteurs de choix, 37% des Américains déclarent qu’ils accordent une plus grande importance à l’impact santé des produits qu’ils consomment depuis le début de la pandémie selon la société d’études de marché Mintel. Une bonne nouvelle notamment pour les producteurs de yaourts végétaux comme Maison Riviera et son nouvel actionnaire majoritaire.
Emmanuelle Serrano