Avec le lancement de son quatrième fonds de fonds Averroès Africa, avec Proparco, et la signature d’un premier accord de coopération avec une place financière africaine, Rwanda Finance, la banque publique française tisse sa toile tous azimuts sur le continent africain, où elle souhaite attirer davantage de PME et ETI françaises.
100 millions d’euros à investir
« Depuis près de dix ans, le capital développement se développe en Afrique mais il reste encore une marge de manœuvre importante, confie au Moci Isabelle Bébéar, Directrice des affaires internationales & européennes de Bpifrance (notre photo). Beaucoup de fonds de capital développement se concentrent sur les PME et ETI classiques. Plus récemment ont émergé des fonds de capital-risque, qui adressent les startup, et des fonds sectoriels, mais il reste encore de nombreuses opportunités sur ce segment. »
Avec Averroès Africa, la banque publique en est à sa quatrième levée de capitaux depuis 2003 sous le label Averroès, fonds qui soutiendra des fonds d’investissement en Afrique ciblant les PME, et, désormais, les startups. Le premier à bénéficier de ce nouvel apport pourrait être Africinvest, société de gestion de fonds basée à Tunis, mais qui déploie des investissements dans toute l’Afrique.
La taille cible d’Averroès Africa est de 100 millions d’euros, Bpifrance et Proparco (d’euros, filiale de l’Agence française de développement dédiée au financement du secteur privé) ont financé le premier « closing » à hauteur de 55 millions et espèrent être rejoints dans une seconde étape par d’autres institutions financières publiques internationales.
Plus panafricain, plus « vert », plus de capital-risque
L’objectif et d’investir dans une douzaine de fonds avec plusieurs nouveautés : une vision plus panafricaine et plus « verte » de la stratégie affichée, et davantage d’ouverture au capital-risque.
« Averroès Africa, sera investie pour au moins 70 % dans des fonds d’investissement multi sectoriels et panafricains qui ciblent les PME et ETI, précise Isabelle Bébéar. Mais nous souhaitons aussi investir dans des fonds africains de capital-risque qui ciblent les startup et des fonds sectoriels qui ciblent des secteurs comme l’agrobusiness, la santé ou les services financiers. »
Le « verdissement » de la stratégie est une tendance lourde dans ces activités d’investissement. « C’est un critère à l’entrée, qui est devenu central et qui a été poussé par les institutions financières internationales depuis plusieurs années. »
Comment les fonds sont-ils tracés à cette aune ? « L ’équipe de gestion d’Averroès Africa s’assure qu’une personne, au sein de la structure, soit dédiée à ça et que le fonds ait une politique claire dans ce domaine. Nous exigeons également de la part des fonds un reporting régulier sur l’utilisation des capitaux que nous investissons et nous demandons que des objectifs d’amélioration des performances en matière environnementale soient fixés aux entreprises dans lesquelles ils investissent », précise encore Isabelle Bébéar.
Coopération pour développer les écosystèmes africains de l’entrepreneuriat
La signature d’un protocole d’accord de coopération économique, le 9 octobre, entre Bpifrance et Rwanda Finance lève le voile pour sa part sur une activité moins connue et moins visible de Bpifrance, mais qui n’en est pas moins cohérente avec ses activités de banque d’investissement en Afrique : l’assistance technique, avec pour objectif de contribuer au développement des écosystèmes africains de l’entrepreneuriat.
En l’occurrence, alors que cette coopération se matérialisait jusqu’à présent par des accords avec des gouvernements, principalement les ministères des finances, et portait sur des missions bien précises comme la création ou le renforcement de mécanismes de garanties ou de dispositifs de financement, c’est la première fois que Bpifrance signe avec une place financière, l’équivalent de Paris Europlace en France.
En l’occurrence, le Rwanda affiche une forte ambition d’être la tête de pont de l’innovation et du financement des entreprises en Afrique centrale et australe et Rwanda Finance est jeune, à peine deux ans d’existence. « C’est une des premières fois que Bpifrance signe un protocole d’accord avec une place financière afin de renforcer la coopération économique entre deux pays », confirme Vincent Di Betta, responsable de l’expertise internationale de la Bpifrance.
D’après lui, les ouvertures permises par cet accord sont importantes et les entreprises françaises doivent s’en saisir : « C’est une excellente opportunité car Rwanda Finance est rattachée au ministère des Finance et constitue la porte d’entrée dans l’écosystème financier du Rwanda pour les investisseurs internationaux intéressés par ce marché. Le rapprochement entre Rwanda Finance et Bpifrance va permettre de développer des opportunités pour nos entreprises de part et d’autre en termes d’innovation, d’exportation, d’investissement. »
Concrètement Bpifrance et Rwanda Finance se sont engagées à contribuer au développement d’un écosystème d’innovation, entrepreneurial et financier au Rwanda, à promouvoir le développement des PME et ETI françaises en se structurant au travers du Centre financier international de Kigali (Kigali International Financial Center), et à développer des missions, des projets et des événements ensemble.
Investissement en capital, développement de liens de coopération, autant de cordes qui s’ajoute à un arc comportant déjà, pour la banque publique, le soutien au commerce (crédit export, financements export) et l’accompagnement des PME et ETI françaises (via les accélérateurs franco africain d’entreprises, notamment).
Christine Gilguy