La période est décidément spéciale pour la tête de Business France : non seulement la nomination de Muriel Pénicaud au gouvernement laisse son poste vacant pour quelques temps à la direction générale de Business France, mais elle intervient alors que le conseil d’administration de cet EPIC (établissement public à caractère industriel et commercial) va devoir se chercher un nouveau ou une nouvelle président(e) qui ne soit pas issu(e) du Parlement, contrairement à la tradition qui prévalait jusqu’à présent. Ce qui ne manque pas de susciter des vocations, notamment parmi les administrateurs, ou même anciens administrateurs.
C’est une réforme introduite en 2013 dans le code électorale par la Loi organique n°2013-906 du 11/10/13 relative à la transparence de la vie publique qui interdit désormais aux nouveaux élus, députés ou sénateurs, entre autres incompatibilités d’activités, d’exercer en même temps que leur mandat « les fonctions de président ainsi que celles de directeur général et de directeur général adjoint exercées dans les entreprises nationales et établissements publics nationaux » (article 2). Et il était prévu que cette mesure s’applique lors des prochains renouvellements des assemblées. Autrement dit, lors des prochaines législatives des 11 et 18 juin pour ce qui concerne l’Assemblée nationale.
Dans ce contexte, qui pourrait succéder à Seybah Dagoma, députée socialiste de Paris, qui préside depuis le 12 mai 2016 le conseil d’administration de Business France, où elle avait succédé à sa collègue Estelle Grelier, députée socialiste de Seine-Maritime ?
Un conseil d’administration de 24 membres
Cette instance de gouvernance comporte 24 membres dont :
– six représentants de l’État : deux pour le ministère des Affaires étrangères (Anne-Marie Descôtes et Laurent Garnier); deux pour les ministères de l’Économie (Sandrine Gaudin) et du Budget (Arnaud Jullian); un pour le ministère en charge de l’Aménagement du territoire (Jean-Michel Thornary) et un pour celui de l’Agriculture Frédéric Lambert);
– quatre représentants du Parlement et des régions : un député (Seybah Dagoma), un sénateur (Alain Chatillon), deux présidents de conseils régionaux, actuellement Nouvelle Aquitaine (Alain Rousset) et Île-de-France (Valérie Pécresse);
– six représentants des organisations professionnelles et réseaux consulaires et personnalités qualifiées : Medef, CPME, CCI International, CCI France International, CNCCEF, le patron d’une entreprise étrangère (voir plus bas);
– six représentants du personnel;
– deux commissaires du gouvernement : l’actuel directeur des relations internationales de la DG Trésor, Thomas Courbe et l’actuelle directrice des Entreprises et de l’économie internationale du ministère des Affaires étrangères, Agnès Romatet-Espagne.
La liste complète est consultable sur le site Internet de l’agence*.
Les politiques éliminés, et compte-tenu des équilibres de pouvoir à préserver entre les différents ministères de tutelle –surtout dans la période actuelle !-, c’est plutôt vers les administrateurs issus du secteur privé que les regards se tournent. Un ancien administrateur et vice-président d’Ubifrance (ancêtre de Business France), l’homme d’affaires et CCE Philippe Mangeard, aurait même d’ores et déjà fait acte de candidature et ferait campagne. Mais il faudra d’abord qu’il réintègre le conseil d’administration…
Du Medef au CCEF
Sont déjà administrateurs, pour leur part, les chefs d’entreprises et représentants des organisations professionnelles que sont Frédéric Sanchez, président du pôle Internationalisation-filières et président de Medef International, François Asselin, président de la CPME, Jean-François Gendron, vice-président de CCI International en charge du réseau France et Arnaud Vaissié, vice-président de CCI International en charge du réseau à l’étranger, Alain Bentéjac, président du Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France (CNCCEF). Claudio Colzani, P-dg du groupe agroalimentaire italien Barilla, est administrateur en tant que personnalité qualifiée.
Alors que les représentants des organisations patronales et des réseaux consulaires, bien qu’eux-mêmes chefs d’entreprises, pourraient être jugés trop « clivants » pour prendre la présidence de cette instance, un profil plus neutre et « Macron-compatible » pourrait être celui du président du CNCCEF, qui avait fait son entrée au conseil d’administration de Business France à l’initiative de Muriel Pénicaud, et en avait été élu le vice-président.
Interrogé par Le Moci peu après la formation du nouveau gouvernement Philippe, celui qui co-préside également le groupe Artelia indiquait qu’il n’est pas candidat mais qu’il examinerait cette possibilité si on le lui demandait… Avec un souhait qui pourrait être une condition : que cette instance de gouvernance qu’il juge « un peu pléthorique » ne soit pas une simple « chambre d’enregistrement » de décisions déjà arbitrées dans les coulisses de l’administration mais puisse être « force de proposition »…
À suivre après les législatives…
Christine Gilguy
*http://www.businessfrance.fr/business-france/organigramme
Pour prolonger :
Lire dans la précédente édition de la Lettre confidentielle : Gouvernement : le Commerce extérieur sans portefeuille, Business France sans dirigeant