Du 17 au 20 juillet à Beyrouth, la présidente du Conseil régional d’Ile-de-France, Valérie Pécresse, s’efforcera de relancer une coopération décentralisée déjà ancienne entre Beyrouth et l’Ile-de-France, mais qui s’est enlisée depuis 2014. « Son objectif ne sera pas que l’action humanitaire et le social, comme ce fut le cas par le passé avec ses prédécesseurs, mais elle ira aussi pour pousser le business », précisait, le 5 juillet, lors d’un atelier de Business France sur le Liban à Paris, Eric Fajole, récent directeur régional de la Coopération internationale et du tourisme, après avoir dirigé les bureaux de Business France au Brésil (juillet 2010-janvier 2012) et en Turquie (janvier 2012-août 2016).
Parmi les projets possibles, la mise en place d’un réseau d’incubateurs francophones et de soutien à des startups. La feuille de route de la coopération francilienne comprendrait aussi la mise à disposition de savoir-faire en matière de ville durable, d’urbanisme, d’aménagement des espaces ou encore de transport et des échanges universitaires entre l’École supérieure des affaires et l’Université Saint-Joseph de Beyrouth.
La France est très présente au Liban. Preuve en est encore l’investissement réalisé tout récemment par la deuxième compagnie française après Air France KLM, Aigle Azur, le 3 juillet, qui a posé pour la première fois un avion sur le tarmac de l’aéroport de Beyrouth. « Nous voulons casser le duopole Air France-Middle East Airlines au départ de Charles-de-Gaulle, en offrant quatre rotations hebdomadaires d’une ligne régulière au départ d’Orly, avec des prix plus attractifs », affirmait au Moci Jean-François Raudin, responsable des Ventes indirectes du transporteur aérien, à l’issue de l’atelier d’information de Business France.
80 % des produits consommés sont importés
Avec les Libanais en Afrique et aux États-Unis, le trafic potentiel à partir de Paris est plus important qu’on le croie de prime abord. Selon Marie Maamari (notre photo), directrice du bureau de Business France au Liban, « la diaspora libanaise dans le monde est forte de 16 millions de personnes, soit quatre fois la population du pays ». Avec les Français, il y aurait une « alchimie », qui se traduit par « une volonté des PME de travailler avec des sociétés libanaises », concrétisée souvent par la réalisation d’affaires « sans papier écrit, mais sous forme de gentleman agreement ».
Résultat payant puisqu’entre 2011 et 2015, le stock d’investissements français a bondi de 20 % et la France est aussi le quatrième fournisseur de marchandises du Liban, avec une part de marché de 5,8 % en 2016, derrière la Chine, 11,5 %, l’Italie, 7,1 % et l’Allemagne, 6,8 %. Ce sont ainsi 92 entreprises françaises qui sont implantées sur place, avec un stock d’investissement de 534 millions d’euros en 2015. Réalisées par 4 500 entreprises (à 93 % des PME et ETI), les exportations françaises ont, elles, atteint les 886 millions d’euros en 2016, grâce à l’aéronautique, 23 % (vente d’Airbus), mais aussi l’agroalimentaire, 13 %, la mécanique et le matériel électrique ensemble, également 13 %, la pharmacie, 11 %, et les parfums cosmétiques, avec 7 %.
L’an dernier, le Liban a importé pour 18,7 milliards d’euros de biens, des achats qui ont contribué à 80 % de sa consommation. Or, dans toute une série de secteurs, la France peut répondre aux attentes des Libanais. C’est le cas dans la santé, notamment dans des spécialités comme l’oncologie, la cardiologie, l’esthétique et l’ophtalmologie. Le savoir-faire tricolore y est déjà reconnu, comme le montre ses places de numéro deux et six respectivement pour la fourniture de médicaments (130 millions de dollars d’exportations) et de dispositifs médicaux (282 millions). Dans la pharmacie, avec une part de marché de 11 %, la France se situe ainsi juste derrière l’Allemagne, avec 16 %.
L’objectif de 12 % d’énergies renouvelables sera dépassé
La filière agroalimentaire offre aussi de nombreuses opportunités, du vin au bio, en passant par les emballages, le remplissage, l’embouteillage, la transformation laitière, la viande et les fruits et légumes. Les possibilités, en fait, sont variées, allant des franchises de luxe aux technologies (logiciels de gestion bancaire et de jeux, progiciels de gestion…), en passant par le bâtiment et le second œuvre (produits, solutions innovantes..).
Directeur régional d’Apave, un spécialiste de la maîtrise des risques présent depuis 20 ans au Liban, Nassib Nasr a identifié d’autres domaines porteurs, comme les produits et systèmes de sécurité (panneaux de contrôle, détecteurs d’incendie, portes coupe feu…), de traitement des déchets et de protection de l’environnement (installations, équipements, brevets…) et les énergies renouvelables. Le plan d’action national dans les énergies renouvelables 2016-2020 prévoit notamment de réaliser 1 million de m2 de chauffe eau solaire, 100 mégawatts d’énergie photovoltaïque décentralisée, 150 MW d’énergie solaire d’origine publique et privée, 200 MW d’énergie éolienne.
Lors de l’atelier de Business France à Paris, Pierre El Khoury, le directeur général de l’Agence libanaise de l’énergie (LCEC), consultait régulièrement son téléphone portable, persuadé de recevoir la confirmation que le gouvernement a donné son accord à la réalisation de trois fermes éoliennes pour 200 MW. Finalement, la décision n’a pas été prise. « Alors ce sera dans six mois, dans un an, mais ce sera fait. C’est pourquoi je peux vous affirmer que l’on dépassera l’objectif fixé dans le plan d’action national de 12 % d’énergies renouvelables en 2020. Nous avons même déjà fixé un objectif très challenging de 15 % en 2030 », expliquait-il au Moci à l’issue de la manifestation.
A mi chemin entre ces deux dates de 2020 et 2030, le pays du Cèdre pourrait avoir acquis une certaine autonomie en matière d’hydrocarbures. En effet, en 2025 au plus tard, le premier baril d’or noir devrait sortir, provenant de l’exploitation du pétrole et du gaz au large des côtes au sud du pays. Un appel d’offres a été lancé. « Environ 50 entreprises ont soumissionné », selon Claude Rufin, directeur général d’Emirates Lebanon Bank. Les résultats devraient être connus en novembre et l’exploration lancée début 2018. Une bonne nouvelle… A suivre.
François Pargny