C’est à Bruxelles que le ballet diplomatique entre Donald Trump et ses alliés avait débuté jeudi 25 mai, pour le sommet de l’Otan à Bruxelles puis le G7 à Taormina, en Sicile. Avant un mini-sommet de l’OTAN programmé l’après-midi, le président américain a été reçu dès 10h du matin au Conseil européen par son Président Donald Tusk et son homologue à la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. « Notre objectif était d’obtenir des réponses claires, quant au positionnement de la nouvelle administration, sur plusieurs dossiers sensibles », détaillait un diplomate européen. Car à Bruxelles – ville que le milliardaire avait qualifiée de « trou à rats » lors de sa campagne – les responsables étaient à l’affût de signes d’apaisement. Et ils sont restés sur leur faim sur bons nombres de sujets relatifs aux relations transatlantiques, incluant les relations commerciales.
Alors qu’il s’était félicité du vote des Britanniques en faveur d’une sortie de l’Union européenne (UE) à l’issue du référendum en juin 2016, rompant ainsi avec des décennies de diplomatie américaine en faveur de l’unité du bloc, Donald Trump et sa politique guidée par « l’America first », continue de susciter les inquiétudes des dirigeants européens. Soulignant une convergence de vue entre les deux blocs sur le contre-terrorisme, « plusieurs questions restent ouvertes », a indiqué Donald Tusk, à l’issue d’un entretien de 1h30 avec son homologue américain. Outre le dossier climatique, celle relative aux échanges commerciaux « est loin d’être clarifiée », déplorait-on dans les coulisses du Conseil.
Lors d’une conférence de presse conjointe avec le nouveau président français Emmanuel Macron, le jour même, Jean-Claude Juncker a néanmoins annoncé la volonté, de part et d’autre, de mettre en place une équipe d’experts « dans les semaines ou les mois à venir », en vue de « commencer à travailler à un projet d’action commune sur le commerce ». Reconnaissant l’existence de « très nombreuses divergences » entre Bruxelles et Washington, le président de l’exécutif a précisé que le groupe commun devra œuvrer à « rapprocher les positions » et préciser le contour de la future relation transatlantique.
Ukraine : « flou artistique »
Autre préoccupation soulevée par les Européens lors de cette première rencontre avec Donald Trump : la politique de son administration vis-à-vis de la Russie. Une question également jugée centrale à Bruxelles, alors que les Vingt-huit s’apprêtent à renouveler, en juin, le train de sanctions économiques lancées en 2014 contre la Russie suite à l’annexion de la Crimée et à la déstabilisation de l’est de l’Ukraine. « On nage en plein flou artistique », déplorait un collaborateur de Donald Tusk.
Des confidences étayées par la lecture des déclarations de l’ancien Premier ministre polonais, à l’issue de la rencontre : « je ne suis pas sûr à 100 % que nous puissions dire que “nous” – le président [Trump] et moi – avons une position commune, une opinion commune sur la Russie bien que s’agissant du conflit en Ukraine il semble que nous soyons sur la même ligne », a-t-il souligné. Un langage diplomatique alambiqué qui démontre une nouvelle fois « l’absence de ligne claire de cette administration », commentait cette même source au Conseil.
Et la réunion du G7, qui débutait le lendemain à Taormina, n’aura que partiellement levé le voile sur ces questions restées en suspens. Malgré l’insistance de ses six homologues, Donald Trump n’a toujours pas confirmé si son pays respecterait l’Accord de Paris sur le climat. « Je prendrai ma décision finale la semaine prochaine ! » a tweeté le président américain avant de quitter la Sicile.
Le commerce international, autre sujet de dissensions, a lui aussi donné lieu à d’importantes tractations dans la nuit du vendredi 26 à samedi 27 mai. Des discussions qualifiées de « fermes » mais qui auront néanmoins permis – timide avancée – d’inclure dans le communiqué final la lutte contre le protectionnisme. Le texte rappelle le respect des règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et la vigilance nécessaire vis-à-vis des pays qui tenteraient de les contourner. Une claire allusion aux émergents asiatiques.
Quant aux relations avec la Russie, les messages des Américains n’auront cessé d’évoluer au cours de ces derniers jours. Jeudi, à Bruxelles, Gary Cohn, le conseiller économique de Donald Trump, assurait que la question de la prolongation des sanctions n’était toujours pas tranchée. « Pour l’instant nous n’avons pas de position », commentait ce dernier à la presse en marge du sommet de l’OTAN à Bruxelles. Des déclarations rapidement démenties dès l’ouverture du G7, en Sicile, le lendemain. Face aux pressions des autres leaders du Forum mondial, le président américain a finalement clarifié ses intentions, excluant à ce stade d’alléger le train de sanctions imposées à Moscou au lendemain de l’annexion de la Crimée.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles