Croissance zéro en 2016, moins de 1 % prévu cette année : la Russie serait en phase de « glaciation », mais ce ne serait pas « catastrophique » insistait, le 15 mai, lors de la présentation du 31e rapport CyclOpe sur les marchés internationaux, François Roche, journaliste et auteur d’ouvrages, notamment sur la Russie. Pourquoi un tel optimisme ?
D’abord, parce que l’État a pu puiser dans les réserves pétrolières pour adoucir le poids de la récession. Ensuite, trois opérations de privatisation ont été menées, avec la vente de 20 % du capital du géant pétrolier Rosneft à des actionnaires non identifiés et du premier producteur mondial de diamants Alrosa à un fonds souverain russe, deux cessions auxquelles s’est ajouté l’achat de la compagnie pétrolière Bashneft par Rosneft.
Non seulement « ces opérations étaient complexes, mais elles se sont passées en famille, les investisseurs étrangers étant écartés », a pointé François Roche. En ce qui concerne la part de capital de Rosneft vendue, dont on ne connaît toujours pas les acquéreurs, « on ignore également sur les 2,5 milliards de dollars concernés ce qui est véritablement revenu au Trésor russe », a-t-il précisé.
Au cœur de l’initiative chinoise de la Route de la soie
En définitive, si l’on excepte la lutte contre la corruption, qui n’a pas donné jusqu’à présent beaucoup de résultat, aucun projet majeur touchant à l’économie n’a été lancé par Vladimir Poutine, dont « l’économie n’est pas la priorité », selon François Roche. De leur côté, les libéraux débattraient sur les voies et moyens de déconnecter la conjoncture russe de la conjoncture pétrolière, mais jusqu’à présent, ils auraient échoué à faire émerger une solution. Du coup, l’économie, de façon générale, a été peu réformée, une inertie à laquelle s’ajoute le poids des sanctions internationales, ce qui se traduit pour les investisseurs, notamment étrangers, par un accès au capital et des conditions de travail difficiles.
« Les Chinois ont proposé de pallier à la baisse des investissements européens et américains », a encore souligné François Roche. Le maître du Kremlin était, d’ailleurs, présent au Sommet international de Pékin, le 14 mai, sur la Route de la Soie, une initiative colossale de la Chine de 1 000 milliards d’euros pour relier l’Asie à l’Europe par terre et par mer. A cette occasion, le numéro un chinois Xi Jinping a annoncé un effort de 113 milliards d’euros supplémentaires*.
Vladimir Poutine était invité à s’exprimer lors de l’ouverture du forum, « ce qui montre à quel point les Chinois font de la Russie un point essentiel de la Route de la Soie », a commenté François Roche. Environ 60 % du trafic de marchandises en Russie est déjà chinois.
François Pargny
*Lire dans la précédente édition de la LC : UE / Chine : les dirigeants européens boudent le sommet « Routes de la soie »
Pour prolonger :
Dans la Lettre confidentielle d’aujourd’hui :
– UE / Russie : vers une prolongation des sanctions européennes
– Chine / Route de la Soie : « Obor peut fonctionner dans un partenariat Sud-Sud », selon J-J Boillot
Et aussi :
– Russie / UE : Moscou officialise sa ‘guerre de communication’ contre l’UE
– France / Russie : trois jeunes managers français lauréats du Grand prix V.I.E
– UE / Russie : Moscou attaque à l’OMC les taxes antidumping européennes sur l’acier
– Chine / Commerce : le concept géant de route de la soie englobe l’Asie, l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Europe