Alors que les eurodéputés, réunis à Strasbourg en plénière, adoptaient le 23 novembre dernier, une résolution demandant le gel des négociations d’adhésion avec la Turquie, les présidents du Conseil et de la Commission recevaient, le même jour à Bruxelles, leurs homologues ukrainiens pour réaffirmer leur soutien à Kiev et à sa politique de rapprochement avec l’Union européenne (UE). Si la question d’une adhésion n’était évidemment pas à l’ordre du jour de ce nouveau sommet bilatéral, les 28 ont promis la levée rapide des visas, jusqu’ici refusée à Ankara.
« Cette décision est la reconnaissance des efforts ukrainiens pour répondre aux standards européens », a affirmé Donald Tusk, le président du Conseil de l’UE. Mais contrairement aux vœux de Petro Porochenko, le président ukrainien, aucune date n’a été annoncée, à l’issue de la rencontre, sur l’entrée en vigueur de la mesure. Cette perspective ne sera matérialisée qu’une fois que le Parlement et le Conseil se seront entendus sur un « mécanisme de suspension » en cas de dysfonctionnement, lequel s’appliquera à plusieurs pays en attente d’une libéralisation de leur régime de visa.
Une nouvelle tranche d’aide financière de 600 millions d’euros
Concernant l’aide financière, elle reste, elle aussi, d’actualité. Ces deux dernières années, l’UE s’est engagée à verser 3,41 milliards d’euros d’assistance financière au pays, toujours au bord de la faillite et gravement miné par le coût de la guerre. Les 28, qui ont conclu un accord d’association politique et de libre-échange stratégique avec Kiev, ne peuvent en effet pas se permettre de voir l’Ukraine chuter. Affectée prioritairement à la réforme de l’administration publique et à la lutte anti-corruption, une nouvelle tranche de 600 millions d’aide va donc être débloquée. « Nous sommes très satisfaits de la qualité et du tempo des réformes », a rappelé Jean-Claude Juncker, le président de la Commission.
Autre engagement des Européens : les sanctions économiques visant Moscou, depuis l’annexion de la Crimée en mars 2014, « restent clairement liées à la mise en œuvre complète des accords de Minsk », a rappelé Donald Tusk. Si le dossier continue à faire débat au sein des 28 – entre les partisans d’une ligne dure et ceux favorables à un assouplissement de la position européenne vis-à-vis de Moscou – l’UE devrait décider de les prolonger lors du sommet de décembre, les sanctions prenant fin en janvier 2017.
Reste à savoir quelle sera la position de la nouvelle administration à Washington. Car si la question inquiète forcément Kiev, qui redoute d’être « lâché » par le grand frère américain, les Européens craignent quant à eux de se mettre en porte-à-faux avec leur allié traditionnel, dans l’hypothèse où le président élu Donald Trump effectuerait un virage à 180º pour se rapprocher de Vladimir Poutine.
« L’Ukraine bénéficie d’un fort soutien bipartisan au Congrès américain, parmi les politiciens américains, démocrates comme républicains, et nous ne nous attendons à aucun changement significatif dans ce soutien bipartisan », a affirmé Petro Porochenko. Donald Tusk a lui aussi écarté l’hypothèse d’un schisme transatlantique sur le dossier des sanctions contre Moscou. « Ses commentaires sont restés très généraux mais au moins prometteurs par rapport à certaines annonces durant la campagne », a confié, en marge du sommet, l’ancien Premier ministre polonais, évoquant un premier entretien téléphonique avec Donald Trump.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles
Pour prolonger :
–Ukraine / Forum d’affaires : la France pousse ses entreprises dans un pays en transition
–UE / Ukraine : course contre la montre aux Pays-Bas pour sauver l’accord d’association