Depuis le début de l’année, plusieurs mesures importantes en matière de financements export annoncées par Bercy ont été applaudies par les milieux d’affaires français, comme l’assouplissement des règles de part française* ou le rétablissement du mécanisme de stabilisation des taux d’intérêts pour les crédits export, suspendu au cours de l’été dernier sans prévenir **. Mais leur concrétisation se fait attendre, de sorte que le Medef les Conseillers du commerce extérieur (CCEF), comptent profiter de la tenue de leur première Matinale de la mondialisation qu’ouvriront Pierre Gattaz et Alain Bentéjac (voir rubrique « Demain dans vos agendas »), organisée sur le thème des financements export, pour remettre à Bercy une sorte de livre blanc sur les « promesses non encore tenues » dans ce domaine.
« Sur ces mesures comme sur d’autres, on attend soit les textes d’application, soit des clarifications », confirme un observateur proche du Medef, relayant un sentiment d’agacement perceptible, dans les milieux d’affaires de l’export, sur la question de la part française ou de la stabilisation des taux d’intérêt. De sorte que le renforcement de l’arsenal de Bercy pour soutenir l’export français tarde à devenir réalité, sauf, sans doute, pour les grands contrats de la défense et du secteur naval, comme en témoigne la lettre d’intention obtenu la semaine dernière par STX France pour une très grosse commande (deux nouveaux navires de croisière auprès de Royal Carribean Cruises).
Part française : toujours pas de décret d’application
L’annonce de la réforme des règles de part française dans le sens d’un assouplissement avait été faite par Emmanuel Macron lui-même lors du séminaire Bercy Financements export, le 16 février dernier. « Nous avons décidé de réduire de 50 à 20 % le seuil d’éligibilité des projets aux garanties publiques » avait précisé le ministre de l’Economie, de l’industrie et du numérique. Charles Sarrazin, sous-directeur du financement international des entreprises à la direction générale du trésor (DG Trésor) avait aussi promis plus de souplesse dans les modalités, lors du même séminaire.
Mais près de 4 mois plus tard, le décret d’application se fait attendre. De sorte que ni les entreprises ni leurs banques ne connaissent à ce jour précisément les nouvelles modalités de calcul de cette part française, qu’il s’agisse de la calculer pour obtenir un crédit export ou un financement du Trésor.
Stabilisation des taux : mode d’emploi ?
Sur le mécanisme de stabilisation des taux que gère Natixis pour le compte de l’Etat et qui permettait d’offrir aux clients des exportateurs des financements à moyen long terme à taux fixe pour financer leur achats de biens et de services, Bercy a lâché du lest : le rétablissement du mécanisme a été annoncé. Mais l’approche de l’administration sera davantage au cas par cas et la marge garantie aux banques sera réduite de 75 à 55 points de base.
« Ce rétablissement est une bonne nouvelle, mais les nouvelles modalités posent question car en Italie, la marge reversée aux banques est de 100 à 12 points de base et aux Royaume Uni, le mécanisme, qui avait été suspendu, a été pleinement rétabli » précise notre observateur, qui se demande s’il ne faut pas y voir l’influence restrictive du Budget, alors que la Direction générale des entreprise, rattachée au ministère de l’Economie, est plus en faveur d’une politique de soutien. Une perte de compétitivité en perspective pour le financement export français ?
En attendant, c’est là aussi le mode d’emploi qui se fait attendre après la tenue de deux réunions séparées des représentants du Trésor avec d’une part les banques et d’autre part les entreprises. « On nous a promis une note précisant et clarifiant ces nouvelles modalités mais on l’attend encore » s’agace notre observateur qui relève que le décret d’application se fait également attendre.
D’autres mesures annoncées ou promises par Bercy ces derniers mois seraient ainsi encore en attente de clarification ou de mise en œuvre, à l’instar de la réforme de la garantie des investissements, pour lequel un rapport a été rendu par l’Inspection générale des finances, ou encore l’instauration d’un mécanisme d’assurance-crédit export court terme, pour lequel un décret a été publié en décembre dernier mais dont on attend, côté entreprises, le mode d’emploi. Sans compter les mesures d’accompagnement du transfert des garanties publiques de Coface à Bpifrance, pour lesquelles le Medef avait, l’an dernier, élaborer une note à Bercy restée à ce jour sans réponse. Autant de points qui viendront sans aucun doute enrichir le livre blanc Medef/CCE.
Christine Gilguy
* Financements export : Bercy muscle encore son arsenal de soutiens aux exportateurs
** Bercy / Financements export : le système de stabilisation des taux toujours gelé