Alors que la Commission planche sur la révision de son registre de transparence, deux catégories professionnelles concernées – les lobbyistes et les avocats – se livrent une guerre intestine. Motif ? Les premiers travaillent en coulisses pour une réforme à l’américaine qui obligerait les seconds à divulguer le nom de leurs clients.
A l’heure actuelle, tous doivent s’inscrire sur le registre de transparence de l’UE – une base de données commune à la Commission et au Parlement européen (PE) – s’ils veulent être autorisés à rencontrer des hauts responsables européens. Mais seuls les lobbyistes sont contraints de révéler les noms de leurs clients. Pour Karl Isaksson, président de l’EPACA (European Public Affairs Consultancies’ Association), une organisation qui représente les intérêts des firmes de lobbying à Bruxelles, les avocats travaillant dans la sphère des affaires publiques devraient, eux aussi, être soumis à cette obligation.
« Je n’aimerai pas voir des potentiels clients se tourner vers des firmes d’avocats sous prétexte qu’ils ne sont pas contraints de révéler leurs noms », commente ce responsable cité par le site politico.eu. Les avocats expliquent, quant à eux, qu’ils ont les pieds et poings liés, du fait des règles de confidentialité imposées par les barreaux européens. « Même si nous le souhaitions, nous ne serions pas autorisés à dévoiler le nom de nos clients dans le registre de transparence », explique un membre du CCBE (Council of Bars and Law Societies of Europe), l’association qui défend les intérêts de la profession auprès des instances communautaires. Selon ses responsables, le modèle américain n’est pas adaptable à Bruxelles où les avocats sont membres de 28 différentes associations professionnelles, chacune ayant sa propre interprétation des limites entre les missions « légales » et celles de lobbying.
« Si la Commission décide de contraindre les avocats à divulguer le nom de leurs clients, elle devra d’abord s’accorder sur une définition claire et commune du travail de lobbying », estime ce responsable de la CCBE. L’exécutif européen n’a pas encore dévoilé les détails de sa réforme ni le calendrier envisagés. Entre temps les lobbyistes s’agitent dans l’ombre pour défendre leurs propres intérêts. Ils craignent, néanmoins, que la révision du registre de transparence se limite à des changements « cosmétiques » qui ne remettraient pas en cause cette situation de concurrence déloyale.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles