Amélie Dujaud-Momège et Daniel Recchia
En parallèle à l’élaboration de sa stratégie et du choix de son fournisseur, il est fondamental de s’arrêter sur le produit que l’on veut importer. Le produit est l’élément clé du processus d’importation par sa « carte d’identité » douanière car elle vous permettra de tirer parti de votre produit dans votre stratégie.
Ainsi, vous vous assurez de le déclarer correctement et donc évitez un potentiel contentieux douanier, mais, surtout, vous pourrez simuler au mieux son coût.
Cette maîtrise passe par trois questions simples, essentielles et se rattachant à la déclaration en douane que vous devrez établir :
– De quoi s’agit-il ? Le choix de la bonne espèce tarifaire va permettre d’acquitter les droits et taxes réellement dus (ni plus, ni moins).
– Où a-t-il été fabriqué ? La détermination de la bonne origine va permettre de vérifier si une préférence tarifaire peut s’appliquer ainsi que les formalités à accomplir.
– Combien vaut-il ? Le calcul de la bonne valeur en douane va permettre de calculer la liquidation exacte des droits et taxes.
Repère
Les sources d’information incontournables
– Site de la douane française :
www.douane.gouv.fr
https://pro.douane.gouv.fr (rubrique Rita)
– Site de la Commission européenne (rubrique Fiscalité et Union douanière > Douane) :
http://ec.europa.eu
– Site Market Access Database : http://madb.europa.eu/mkaccdb2/indexPubli.htm
Définie par l’article 28 du Code des douanes national (CDN), l’espèce tarifaire ou nomenclature douanière est le libellé qui est attribué à la marchandise dans le tarif douanier commun et auquel correspond un numéro de nomenclature. Ledit tarif comporte près de 15 500 rubriques de classement.
La détermination de cette codification est importante car, à l’importation, elle conditionne le taux des droits de douane ainsi que l’application de certaines mesures de contrôle du commerce extérieur : contingents, licences, règles sanitaires et phytosanitaires, etc. Vous ne devez donc pas hésiter à demander au fabricant étranger toutes les précisions souhaitables ainsi que des échantillons.
1.1 Comment se compose et se détermine une nomenclature douanière
a/ Le tarif douanier
Le tarif douanier est organisé en 21 sections qui reprennent les grandes catégories de produits. Ces sections sont divisées en 97 chapitres. Chaque chapitre représente une espèce déterminée. Il est à noter que le chapitre 77 est pour l’instant réservé.
b/ Sa structure
Il existe plusieurs niveaux de nomenclatures.
La nomenclature au niveau mondial
– La position tarifaire : elle est constituée des quatre premiers chiffres et est déterminée par l’Organisation mondiale des douanes (OMD) ;
– La sous-position : elle est constituée des quatre premiers chiffres de la position tarifaire et deux chiffres complémentaires. Elle est également déterminée au niveau mondial par l’OMD.
Repère
Un système harmonisé mondial d’identification des produits
Les 6 premiers chiffres de la nomenclature représentent la position du Système harmonisé (SH), système unique de désignation et de codification des marchandises applicable au niveau mondial qui permet d’éviter la multiplicité de codes pour un même produit. Le SH assure une classification méthodique et unique, pour les pays qui l’utilisent, des marchandises faisant l’objet d’échanges internationaux et permet la comparaison de leurs flux commerciaux. Il est utilisé par 195 pays et couvre plus de 95 % du commerce mondial.
La nomenclature au niveau communautaire
– La nomenclature combinée (NC) : elle est constituée de 8 chiffres, soit les 6 premiers du Système harmonisé et de deux chiffres complémentaires. La NC est déterminée au niveau communautaire ; elle détermine notamment les droits de douane à l’importation dans l’Union européenne et permet l’élaboration des statistiques du commerce extérieur.
– Le tarif intégré des Communautés européennes (Taric) : défini au niveau communautaire, il est constitué de 10 chiffres. Les 8 premiers reprennent la NC et les deux derniers déterminent les réglementations communautaires douanières et commerciales (suspensions et préférences tarifaires, prohibitions, licences ou droits anti-dumping) à l’importation dans l’Union européenne, via des codes additionnels communautaires (Caco).
La nomenclature de votre produit se lira selon le schéma suivant :
Voir le schéma en PDF en bas de page
Toutefois, trouver la nomenclature douanière de votre produit ne se fait pas au hasard.
La recherche se déroule selon des règles bien précises. Pour cela il faudra vous appuyer sur les règles de classement.
1.2 Les règles de classement
Le classement tarifaire des marchandises s’opère en application de différents textes figurant dans le tarif douanier commun modifié annuellement : les règles générales interprétatives, les notes de sections et de chapitres, les libellés de positions et de sous-positions.
En outre, l’OMD publie des « Notes explicatives du système harmonisé (NESH) » qui, sans avoir force légale, constituent un instrument essentiel d’interprétation et d’harmonisation de la nomenclature à 6 chiffres (SH). L’OMD publie également des avis de classement spécifiques à certaines marchandises ; ces avis n’ont pas force légale.
L’Union européenne publie des « Notes explicatives pour la nomenclature combinée à 8 chiffres », les NENC. Ces notes constituent un instrument essentiel d’interprétation de la nomenclature combinée. Elles sont publiées au Journal officiel de l’Union européenne (JOUE) partie C. La Commission publie également des règlements de classement spécifiques à certaines marchandises. Ils ont force légale.
Repère
Les sites de référence
Afin de vous aider à classer votre produit, n’hésitez pas à consulter les sites suivants.
– Consultation du Taric via le site des douanes françaises : https://pro.douane.gouv.fr (rubrique Rita)
– Consultation du Taric via le site de l’Union européenne :
http://ec.europa.eu/taxation_customs/customs/customs_duties/tariff_aspects/customs_tariff/index_fr.htm
– Notice explicative de la nomenclature combinée des Communautés européennes (Journal officiel de l’UE n° C 133) à télécharger sur le site Eurlex : http://eur-lex.europa.eu/JOIndex.do?ihmlang=fr
1.3 Le renseignement tarifaire contraignant (RTC)
Les administrations douanières des États membres sont amenées à fournir aux opérateurs économiques des renseignements concernant le classement tarifaire des marchandises qu’ils envisagent de déclarer en douane (importation/exportation).
Afin d’assurer une égalité de traitement entre les opérateurs tout en facilitant la tâche des services douaniers, une procédure communautaire de délivrance de renseignements tarifaires liant les administrations des États membres a été prévue par la réglementation communautaire. Il s’agit de la demande de renseignement tarifaire contraignant (RTC). Voir en bas de page en PDF un modèle de demande de renseignement tarifaire contraignant.
Définition
Toutes les demandes de RTC doivent être formulées uniquement sur l’imprimé spécifique prévu à cet effet ou directement rempli en ligne. Tous les renseignements écrits relatifs au classement des marchandises s’effectuent dans le cadre de la procédure communautaire du RTC. Il est précisé que la procédure du RTC concerne des marchandises devant faire l’objet de présentation en douane lors des formalités douanières. Cette procédure n’est donc pas prévue pour le classement des marchandises reprises sur les déclarations d’échanges de biens (DEB).
Le conseil de Daniel
Comme indiqué ci-dessus, il est
essentiel de bien classer le produit importé afin d’éviter toute fausse
déclaration d’espèce qui peut générer un dossier contentieux avec
l’administration. Dans la mesure du possible, il faut anticiper et
définir le code douanier du produit avant son arrivée dans l’UE.
En
cas de doute, ne pas hésiter à déposer une demande « RTC » auprès de la
DGDDI. L’Administration a mis en place une procédure de délivrance des «
RTC » qui a considérablement réduit les délais de réponse.
De plus,
en cas de modification de la réglementation douanière le bénéficiaire
d’un « RTC » pourra continuer à l’utiliser, (sous certaines conditions),
pendant 6 mois si cette nouvelle réglementation lui est défavorable
(exemple : RTC avec une position à 0 % de droit de douane qui passerait à
5 % de droit de douane).
La douane française est la première
douane européenne à détenir une certification de service dans le domaine
du classement tarifaire et à offrir aux opérateurs économiques une
prestation qualitative en termes de délais, de lisibilité et de
fiabilité.
Portée juridique
Les renseignements tarifaires délivrés sur la base du règlement communautaire sont contraignants, c’est-à-dire qu’ils lient les services douaniers de l’UE à l’égard du titulaire du RTC ou des personnes agissant pour son compte.
Cette obligation vaut quel que soit l’État membre qui les a délivrés, sous réserve, bien entendu, que la marchandise déclarée corresponde à celle décrite dans le RTC présenté et que les formalités douanières soient postérieures à sa date de délivrance.
Validité
Un RTC est valable pour une période de 6 ans à compter de la date de délivrance.
Repère
Les sources d’information de référence pour le RTC
– Base RTC (EBTI) : http://ec.europa.eu/taxation _customs/dds/cgi-bin/ebtiquer?Lang=FR
– Formulaire de demande de RTC (Cerfa n°11026*03) :
– À télécharger à l’adresse www.budget.gouv.fr/themes/douane/formulaires.php et à compléter
– OU téléprocédure à réaliser sur le site : https://pro.douane.gouv.fr
Check-list des principales étapes pour trouver la nomenclature de vos produits
Pour trouver la nomenclature de vos produits
– S’agit-il d’un produit fini ou d’un composant ?
– Quelle est sa dénomination technique ?
– Quelle est sa destination / son utilisation ?
– Comment se présente-t-il ? Quelle est sa matière ? Quelles sont ses données techniques ?
– Ai-je bien déterminé le chapitre ?
– Est-il ou non repris nommément dans le Taric ?
– Lire les règles de section / de chapitre.
Si le produit est exclu, voir le nouveau chapitre
– Déterminer la position à 4 caractères numériques
– Déterminer la position à 8 caractères numériques
– Éventuellement chercher si des RTC ont été délivrés pour des produits similaires
Trois exemples de recherche tarifaire
Cas n° 1
Chaussure de sport, destinée à la pratique du football, ne couvrant pas la cheville, dont le dessus est en matière plastique, avec une languette et une fermeture à lacets, la semelle extérieure est en caoutchouc, avec des crampons, le talon est renforcé, logo publicitaire au talon, sur le dessus de la languette, sur le dessus de la chaussure et sur la semelle.
L’approche tarifaire
Le chapitre 64 reprend les chaussures, les guêtres et articles analogues ; parties de ces objets.
La note 4 a) et b) du chapitre précise :
« La matière du dessus est déterminée par la matière constitutive dont la surface de recouvrement extérieure est la plus grande, sans égard aux accessoires ou renforts… »
« La matière constitutive de la semelle extérieure est déterminée par celle dont la surface au contact du sol est la plus grande, sans égard aux accessoires ou renforts… »
– La semelle extérieure est entièrement en caoutchouc.
– le dessus est en matière plastique.
Ces 2 éléments nous orientent vers le 6402 (autres chaussures à semelles extérieures et dessus en caoutchouc ou en matière plastique).
Les chaussures de sport sont reprises nommément : 640219
Les notes du chapitre 64 (des sous-positions 640219) nous confortent puisque ces notes précisent : « On entend par chaussures de sport exclusivement : les chaussures conçues en vue de la pratique d’une activité sportive et qui sont ou peuvent être munies de pointes, de crampons. »
Les chaussures importées relèvent donc bien de la nomenclature combinée 64021900.
Cas n° 2
Matière première dénommée « résine époxyde » destinée à servir de revêtement pour le bâtiment se présentant sous forme de poudre.
L’approche tarifaire
Le chapitre 39 reprend les matières plastiques et ouvrages en ces matières.
La règle générale 2 b) précise :
« Toute mention d’une matière dans une position déterminée se rapporte à cette matière soit à l’état pur, soit mélangée ou bien associée à d’autres matières. »
La note 6 des notes du chapitre 39 précise : « L’expression ”formes primaires” s’applique uniquement aux formes ci-après :
a) liquides et pâtes
b) morceaux, grumeaux, granules, poudres… »
La matière « résine époxyde sous formes primaires » est reprise nommément à la position 3907.
Le produit importé « résine époxyde sous formes primaires » relève de la nomenclature combinée 39073000.
Cas n° 3
Imprimante d’ordinateur multifonction assurant les fonctions d’impression, de copie et de fax. Elle utilise la technologie numérique pour l’impression. Elle est apte à être connectée à une machine automatique de traitement de l’information.
L’approche tarifaire
Ce sont les libellés des codes 8443, 84331 et 84433100 qui vont déterminer le classement de cette imprimante ; « Machines qui assurent au moins deux des fonctions d’impression, de copie ou de transmission de copie, n’ayant pas la copie numérique comme fonction principale. »
En effet, compte tenu de ses caractéristiques, aucune des fonctions de la machine ne peut être considérée comme la fonction principale.
Le classement dans la sous-position 84433120 peut être exclu car le libelle indique : « Ayant comme fonction principale la copie numérique, la copie étant assurée par scannage de l’original et impression des copies au moyen d’un dispositif d’impression électrostatique »
La machine doit donc être classée sous la nomenclature combinée 84433180 : « Autres »