Due to a lapse in Exim Bank‘s authority, as of july 1, 2015, Bank is unable to process applications or engage in new business or other prohibited activities, « en raison de l’expiration du mandat de l’Exim Bank, à compter du 1er juillet 2015, la banque ne peut pas traiter les demandes ou s’engager dans de nouvelles affaires ou d’autres activités interdites ». Cette annonce lapidaire figure sur la page d’accueil du site Internet de la banque fédérale chargée du soutien aux exportations américaines depuis le 1er juillet dernier (www.exim.gov). Autrement dit, les exportateurs américains ne bénéficient plus de soutiens à l’export depuis plus de deux mois. Et le renouvellement -ou non- de cette autorisation va être l’un des sujets sensibles de la prochaine rentrée du Congrès aux États-Unis, le 8 septembre.
A l’origine de cette suspension d’activité -la première depuis la création de l’Export-Import Bank of the United States (US Ex-Im Bank) en 1934 !- un bras de fer entamé il y a un an environ à l’initiative de Républicains conservateurs du mouvement radical Tea Party, qui souhaitent la fin de cette institution au motif que, selon eux, elle va à l’encontre de la loi du marché et favorise les grandes entreprises comme Boeing ou General Electric (GE), ses principaux clients, qui n’ont pas besoin de l’argent du contribuable. Nous nous en étions déjà fait l’écho dans la Lettre confidentielle*. Malgré la contre-offensive des partisans de l’institution, Républicains et Démocrates ont été incapables de trouver un accord au Congrès avant le terme du mandat de l’institution, le 30 juin 2015.
Sorte de Coface et Bpifrance réunis, l’US Ex-Im Bank est ce qu’on appelle une agence de crédit export : elle fournit des solutions de prêt, de garantie et d’assurance-crédit avec la garantie du Trésor en soutien aux exportateurs américains. Le contribuable américain ne met pas la main au portefeuille : elle se rémunère sur les intérêts qui lui sont versés. Alors que les parlementaires américains partaient en congés, l’institution s’est donc retrouvée pour la première fois de son histoire dans l’impossibilité de prendre de nouveaux engagements du jour au lendemain, laissant en plan tous les dossiers en cours d’instruction, soit, selon diverses sources, quelque 9,1 milliards de dollars de nouvelles affaires potentielles.
La concurrence chinoise brandie comme un épouvantail
Si les opposants à l’Ex-Im Bank ont gagné une belle manche, la partie n’est toutefois pas perdu pour ses partisans, en tête desquels les industriels, à l’origine d’un lobbying intense auprès du Congrès sur ce dossier : la National Association of Manufacturers (NAM), l’US Chamber of Commerce, les dirigeants de Boeing ou GE, tous sont montés au créneau pour déplorer la suspension des activités de cette institution. Ils ne manquent pas d’arguments et on en trouve la plus belle synthèse dans une fiche mise en ligne sur le site Internet de la Maison Blanche elle-même (www.whitehouse.gov/), auquel renvoie celui de l’Ex-Im Bank : certes, les grandes entreprises américaines sont ses premiers clients par l’importance des montants en jeu, mais elles créent de l’emploi aux États-Unis et chez leurs sous-traitants; en outre, 90 % des transactions (3340 en 2014) ont concerné des PME.
Surtout, la fin de cette institution priverait les États-unis d’un instrument de lutte commerciale dont sont dotés tous les pays développés et émergents exportateurs, et en premier lieu la Chine, brandie comme un épouvantail : selon une estimation de l’US Ex-Im Bank figurant dans la fiche de la Maison Blanche, les institutions financières chinoises auraient financé 58 milliards de dollars de crédits export « standards » en 2014, soit plus que les 50,9 milliards de crédit export moyen et long terme fournis par les pays du G 7 l’an dernier (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni). « La Chine a procuré davantage de financements à ses exportateurs depuis deux ans que l’Ex-Im Bank au cours de ses 80 ans d’histoires », renchérissait ainsi Loren Thompson, un chercheur au Lexington Institute, dans une tribune publiée par le très libéral magazine Forbes sur son site Internet le 26 août**. Mais il n’avançait pas de chiffres précis.
Mais c’est l’actualité récente qui devrait le plus les y aider. Déjà secoué par le contrat indien géant remporté par son rival Airbus dans l’aéronautique (250 A320néo commandé par la compagnie IndiGo), Boeing a fait savoir le 22 août qu’il avait perdu un contrat de 85 millions de dollars pour la fourniture d’un satellite à l’opérateur asiatique Asia Broadcast Satellite faute d’avoir pu mettre en place un financement export en l’absence de l’US Ex-Im Bank, qui fournit bon an mal an 1 milliard de dollar de soutien à ce secteur où opèrent également Lockheed Martin, Orbital ATK, Space X, Space System Loral. Fin juillet, le vice-président de GE, John Rice, qui est basé à Hong-Kong, avait de son côté indiqué que son groupe était en train de préparer pour près de 10 milliards de dollars d’appels d’offres et qu’en l’absence du soutien de l’US Ex-Im Bank, il devrait davantage y répondre via ses usines hors des États-Unis pour bénéficier des aides des agences de crédit export locales. Et de citer le cas d’un tel projet de génération électrique dont l’assemblage final pourrait être effectué en Hongrie ou en Chine plutôt que dans son site de Houston…
C.G
*Etats-Unis : l’Ex-Im Bank en sursis suscite une campagne de soutien auprès des exportateurs
**As China Bubble Bursts, Push To Kill U.S. Export-Import Bank Looks Crazy