Archiduchesse,
une PME stéphanoise commercialisant des chaussettes fabriquées près de Limoges, a eu la
désagréable surprise de découvrir l’existence d’un site chinois… en tout point
identique au sien. Hormis les prix bien sûr.
C’est un
internaute qui a donné l’alerte mi-janvier. Mêmes produits présentés de
la même manière, mêmes couleurs, mêmes photos et des tarifs défiant toute
concurrence (1,50 euro la paire au lieu de six)… Le site de vente en ligne est victime d’une
contrefaçon chinoise. « C’était il y
a trois mois et nous sommes passés à autre chose depuis, mais sur le coup nous
étions entre l’inquiétude et l’amusement », se souvient Patrice Cassard
le fondateur d’Archiduchesse, qui distribue 70 % des chaussettes portant sa
marque via son site et le reste en retail (au détail).
Amusé, le
dirigeant l’a d’autant plus été que sa marque n’est pas commercialisée à l’étranger.
« Il nous est arrivé d’honorer des
commandes à l’international, en Australie, aux Etats-Unis et en Chine, où nous
n’envoyons plus rien depuis cette histoire », précise Patrice Cassard.
Pas
de risque de concurrence directe donc. A moins que le fabricant chinois qui
fournit le site en fausses archiduchesses ne décide de s’attaquer au marché
français. Pour se prémunir d’une éventuelle invasion de copies l’entreprise a déposé une déclaration en douane, qui constitue la seule et unique
procédure déclenchée par Archiduchesse.
« Nous aurions
pu intenter quelque chose, mais cela demande de prendre un avocat ici et un
autre sur place, c’est beaucoup d’argent et peu de certitudes sur le résultat »,
explique le dirigeant. C’est en effet le seul recours de l’entreprise comme le
confirme Delphine Boy avocate spécialiste de la propriété intellectuelle :
« Dans le cas d’un nom de
domaine en .cn, il est possible demander au registre chinois, qui a beaucoup
évolué en 2010, de supprimer le site en question. Dans le cas d’Archiduchesse,
le site concerné est en .com. Si le nom de domaine est une
translittération, ce qui ne semble pas être le cas,
il est possible d’entamer une procédure auprès de l’Organisation mondiale de la
propriété intellectuelle, ce qui coûterait environ 3 500 euros ».
Le site chinois, développé sur la plate-forme de
e-commerce Tao Bao (l’ebay chinois), a en effet comme url http://abwa.taobao.com. AB pour Ankle Biting
et wa, une onomatopée exprimant la surprise, l’admiration. Aucune mention d’Archiduchesse n’y figure. « Dans ce cas, le dépôt de la marque en Chine n’aurait rien apporté »,
précise Delphine Boy. Car Archiduchesse,
qui n’a pas d’ambition à l’export et préfère se concentrer sur le marché
hexagonal, a fait le choix de ne pas déposer sa marque à l’étranger. « Au lancement en 2009, nous avons
estimé que ces démarches étaient trop onéreuses », résume Pierre
Cassard.
Le coût prétendument trop élevé de la protection de la
propriété intellectuelle est fréquemment
mis en avant par les PME. «
Déposer une marque en France coûte entre 400 et 600 euros, frais de conseil
inclus. Au niveau européen, le dépôt revient à 1200 ou 1600 euros pour trois
classes de produits. Concernant un dépôt international, qui couvre 76 pays, les
tarifs varient en fonction des pays. Il faut d’abord déposer sa marque en France
puis au niveau international pour 1 000 euros. Certains imposent une taxe
individuelle, d’autres pas. En Chine, il en coûte 150 euros »,
détaille Delphine Boy. Il est par ailleurs possible de déposer une marque
nationale chinoise, mais la protection ne vaut que pour une classe de produit
contre trois pour une marque internationale, qui permet donc de faire de notables
économies d’échelles. En revanche, le dépôt en Chine permet d’enregistrer des
idéogrammes.
A une époque
où le « fabriqué en France » fait florès, cette mésaventure a eu au
moins un effet positif pour l’entreprise : une publicité sans
précédent.
Sophie
Creusillet
MOCI Pratique :
L’Institut
national de la propriété intellectuelle (INPI) a expatrié quatre de ses experts
dans les services économiques des ambassades de France en Chine , au Maroc, au
Brésil et aux Emirats arabes unis. Leur rôle est d’orienter et conseiller les entreprises
françaises victimes de contrefaçon dans ces quatre pays, auxquels devraient
bientôt s’ajouter l’Indonésie.
Pour
retrouver leurs coordonnés, suivez le lien !
Pour en savoir plus :
Lire sur www.lemoci.com :
Les
prochains salons professionnels en Chine
Dossier – Propriété industrielle, mode d’emploi pour se protéger à
l’international