Grand bénéficiaire des fonds de cohésion européens, la Pologne bénéficie d’une enveloppe globale record de 82,5 milliards d’euros pour la période 2014-2020, dont 45,6 milliards répartis entre six programmes nationaux (infrastructures et environnement, recherche et développement, Pologne digitale, etc.) et 31,28 milliards dévolus à un programme régional, qui est « la copie conforme des programmes nationaux », selon Szymon Zolcinski, partner chez Taxand Poland.
« Le programme régional permet de financer des projets de moindre envergure et si votre projet est trop important pour être approuvé au niveau national, vous pouvez alors vous tourner vers le niveau régional », précisait-il, le 3 décembre, lors d’un séminaire à l’ambassade de Pologne à Paris, intitulé « quelles incitations financières pou les investisseurs français en Pologne ? ».
Dans le dernier Guide Business Pologne 2014 du Moci, Piotr Popa, porte-parole du ministère des Infrastructures et du développement (en charge notamment des fonds de cohésion) indiquait que la gestion des fonds serait de plus en plus décentralisée, l’objectif étant de passer d’une part de 35 % entre 2007 et 2013 à 40 % de 2014 à 2020. A l’échelon central, 60 % du total des programmes nationaux, soit 27,5 milliards d’euros, sont également attribués au seul secteur des infrastructures et de l’environnement.
SII Pologne : des fonds européens comme « accélérateurs »
Des montants plus modestes sont placés dans la recherche & développement (R & D) ou l’investissement de départ (lancement d’une production) ou de modernisation, soit 7 milliards et 6,5 milliards d’euros. De façon générale, les projets européens font l’objet de subventions ou de financements à taux préférentiel. Et des micro entreprises et des petites et moyennes entreprises peuvent en profiter, c’est-à-dire des sociétés dont l’effectif est inférieur à 250 salariés, avec un chiffre d’affaires au maximum de 50 millions d’euros ou un bilan d’au plus 43 millions d’euros.
Il y a quelques années, dans le cadre de l’enveloppe financière de 67,3 milliards d’euros attribuée par l’UE à la Pologne, l’entreprise SII Pologne comptait plus de 200 salariés. Une taille que son directeur, Grégoire Nitot (notre photo), juge critique pour s’attaquer à un projet européen, car, prévient-il, « un projet, c’est un an de travail ». Ce spécialiste des systèmes et réseaux, qui a bénéficié de 7 millions d’euros de fonds européens pour deux projets de recrutement d’ingénieurs, a ainsi détaché sur ces opérations quatre personnes : un contrôleur financier, un responsable général, un spécialiste des ressources humaines et un ingénieur.
Une fois le dossier accepté, il faut également en assurer le suivi, des contrôles réguliers étant effectués. « Nous avons dû nous confronter à la machinerie bureaucratique et bloquer deux à trois personnes sur le projet », expose Grégoire Nitot, fondateur de l’entreprise dont il détient 30 % des actions, au côté de SII France (70 %). Créée en janvier 2006, sa petite entreprise a réalisé un chiffre d’affaires de 60 millions d’euros l’an dernier et travaille pour de grands noms : Atena, Citibank, Danone, France Télécom, Gemalto, Pekao, Polkomtel, Roche, Vodafone, Volvo, etc.
« Pour nous, les fonds européens ont été un accélérateur. Nous sommes aujourd’hui 1 800 personnes, dont 800 embauchées l’an dernier, et, à la fin de l’année, nous serons encore 500 de plus », souligne ce Français de 38 ans, qui a décidé de constituer une équipe de 50 recruteurs pour trouver de la main d’œuvre hors Pologne, en Ukraine, en Afrique, voire en France.
R & D : l’obligation de mise sur le marché
L’innovation est un thème central de compétitivité, alors que la Pologne au terme de la décennie ne bénéficiera plus d’enveloppe financière aussi généreuse de la part de l’Union européenne. Or, dans ce domaine, la patrie de Donald Tusk, ancien Premier ministre devenu président du Conseil européen depuis le 1er novembre, ne figure pas dans le Top 10 européen, avec des dépenses de R & D représentant 0,7 % du produit intérieur brut. D’après les projections, cette part s’élèverait à 1,7 %, soit 12,5 milliards d’euros, en 2020.
Les nouvelles solutions, les nouveaux produits, les créations et les extensions de centres ou de départements de R & D peuvent faire l’objet de subventions ou de financements à taux préférentiel pouvant constituer jusqu’à 70 % des dépenses en capital. Peuvent s’y ajouter une subvention de 25 à 80 % des dépenses d’exploitation. « Plus le projet est novateur, plus il a de chance d’être financé. De même, il faut prouver que l’on a de l’expérience de la matière. Coopérer avec des universités scientifiques est encore un plus. Et il est nécessaire aussi de chercher à mettre sur le marché le résultat de la recherche », expose Szymon Zolcinski.
Dans le cas du budget d’investissement, la subvention ou le prêt à conditions préférentielles peut monter jusqu’à 70 % pour les dépenses en capital. « Plus votre entreprise est petite et plus la zone visée est défavorisée, plus vous recevrez pour réaliser votre projet », commente encore le responsable de Taxland Pologne.
Des avantages pour investisseur dans les ZES
A côté des fonds européens, des financements nationaux sont également disponibles. En cas d’investissement dans des zones économiques spéciales (ZES), différents avantages sont ainsi apportés, notamment une exemption de l’impôt sur les sociétés (CIT) pouvant représenter jusqu’à 70 % des coûts éligibles (coût de l’investissement ou de création d’emplois sur de nouveaux sites).
« Quel que soit le type d’activité, met en garde Szymon Zolcinski, aucun soutien n’est apporté en cas de délocalisation, d’investissement de remplacement ou pour des investissements déjà lancés. En revanche, tout ce qui favorise la compétitivité, comme l’innovation ou une performance environnementale élevée, est recherché. Et donc l’entreprise va bénéficier d’un soutien. Elle peut même acheter un terrain et commencer des travaux préparatoires avant de recevoir l’autorisation de lancer ses opérations ».
En revanche, la société est soumise à deux obligations : acheter de nouveaux actifs, sauf s’il s’agit de petites et moyennes entreprises, et maintenir son investissement pendant au moins cinq ans, trois ans seulement en ce qui concerne une PME.
François Pargny
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