Contrairement à ce qu’espéraient les organisations professionnelles (nos précédentes éditions*), la rationalisation du dispositif d’assurance-prospection n’a pas été suspendue par le ministère des Finances et celui de l’Economie, les mesures annoncées sont même applicables depuis le 23 mai selon nos informations, et elles devraient donc être mises en œuvre par la Direction des garanties publiques (DGP) de Coface.
Dans les organisations que la Lettre confidentielle a contactées, la douche est plutôt froide : « Quelle est cette façon de faire ce type de réforme sans concertation avec les entreprises concernées ? » s’interroge François Coulin, le vice-président de l’OSCI (Organisation des opérateurs spécialisés de l’international), en pointe sur ce dossier avec des contre-propositions de réforme. Mais il veut croire que la possibilité de discuter avec l’administration de certaines modalités n’est pas perdue : les rendez-vous avec les cabinets des différents ministres concernés à Bercy sont toujours prévus fin mai et début juin.
Au Medef, où le GFI (Groupement des fédérations industrielles) a été en pointe sur le dossier, le Comité commerce extérieur de la Commission international, que préside Alain Bentejac, – futur président du Comité national des CCEF**, devrait bientôt s’emparer du sujet pour faire des propositions, et en premier lieu « discuter avec l’administration ». Le Medef fait partie des organisations qui ont applaudi et parfois inspiré les mesures de simplification du dispositif de soutien à l’exportation, dont l’AP. « On aurait pu discuter autour d’une table et travailler ensemble sur l’évolution du dispositif » souligne-t-on. « C’est une réflexion qui doit mener à une décision, pas un coup de rabot », déplore-t-on.
A la CGPME, le dossier était au menu d’une réunion de la Commission internationale le 21 mai. « On nous parle de raboter, on n’y est pas favorable » déclare d’entrée Philippe de Brauer, président de cette instance, à la sortie de cette réunion, en ajoutant qu’il vaudrait mieux veiller à ce que « l’assurance prospection finance davantage les PME et PMI que les ETI ». « On ne comprend pas comment ça a été décidé puisque dans les cabinets de certains ministères concernés, on n’était pas au courant ! » ironise-t-il avant de demander quelle est l’autorité à même de décider « puisqu’il y a au moins trois ministres concernés par le commerce extérieur : Michel Sapin, Arnaud Montebourg et Laurent Fabius ». La CGPME, qui a « été prise de court » par l’annonce de ces mesures, devrait demander rapidement à rencontrer les responsables dans les trois ministères cités.
L’AP, très appréciée des PME, serait-elle victime de son succès ? Selon les informations complémentaires que nous avons réunis, les mesures de simplification décidées ces dernières années (dont en 2012, une AP ultra simplifiée pour les primo-exportateurs, l’A3P, avec des demande totalement informatisées), l’AP aurait vu le nombre de ses bénéficiaires exploser, mais aussi les échecs (donc le non remboursement des financements accordés avec cette garantie), et donc les financements pris en charge par l’Etat : entre 2010 et 2013, le nombre de bénéficiaires de ce mécanisme est passé de 6000 à près de 11000. Rien qu’en 2013, quelque 1800 contrats ont été souscrits.
Pour mettre fin à certains effets d’aubaines indésirables, et austérité budgétaire oblige, de 120 millions d’euros en 2013, l’objectif est de ramener le coût net pour l’Etat à 80 millions avec différentes mesures de restriction sur les quotités garanties et les frais pris en charge **. Pour l’heure, les documents de présentation de l’assurance prospection en ligne sur le site de Coface (ww.coface.fr) n’ont pas encore été modifiés.
Christine Gilguy
*Lire nos précédents articles : Assurance prospection : un projet de coupe budgétaire suscite le tollé des entreprises et Assurance-prospection : le projet de restriction suspendu en attendant une concertation public-privé