Le 6 octobre 2009, le Président Sarkozy se rendait à Astana et érigeait le Kazakhstan en « partenaire stratégique » de la France. Mais qu’en pensait le Kazakhstan ? Deux ans après l’offre française, il semble que la France devienne aussi un véritable partenaire stratégique du Kazakhstan.
Lorsque le 6 octobre 2009, à Astana, Nicolas Sarkozy fait du Kazakhstan un « partenaire stratégique » de la France, cela n’engage que lui. Pas son homologue, Noursoultan Nazarbaïev. D’autant que ce dernier mène des plus habilement une politique étrangère multi-vectorielle, conduite à coups de signatures soigneusement accordées pour faire fructifier les énormes réserves de pétrole et de minerais du pays. La république d’Asie centrale, tout à son émergence, ne compte alors déjà plus les « partenaires stratégiques » ou ce qui y ressemble : Russie, Etats-Unis, Chine, Allemagne, Japon, Corée du Sud…
Toutefois, deux ans après la visite de M. Sarkozy, il semble bien que la réciprocité stratégique soit là. Un indice ? En Europe, c’est la France et l’Allemagne que le holding d’Etat Samruk-Kazyna a choisies comme cibles privilégiées pour y chercher des partenaires pour ses projets. La liaison « stratégique » possède même comme une manifestation institutionnelle avec l’existence d’un Conseil franco-kazakhstanais des affaires, co-présidé par Yves-Louis Darricarrère, le n° 2 de Total, et Aïdan Karibjanov, le vice-président de Samruk-Kazyna.
Pour ce dernier, « ce qui compte, c’est le fait que la France apporte une technologie qui contribue à la diversification de notre économie, ce qui est notre priorité. La plupart des entreprises américaines présentes au Kazakhstan sont dans le pétrole, du point de vue technologique la Russie n’est pas une option, de même que la Chine, outre des questions géopolitiques. Quant à la France, regardez la liste des entreprises qui travaillent au Kazakhstan. Ce sont des leaders dans leur domaine, pas seulement dans les hydrocarbures », explique-t-il en un excellent français. « C’est bien pour cela que nous sommes là, en nous inscrivant pleinement dans la stratégie de fond du Kazakhstan de développement des industries non-extractives », renchérit Silvère Delaunay, directeur général d’EADS Kazakhstan, dont les contrats dans les domaines de l’espace, de la sécurité civile ou de la défense sont basés sur le transfert de technologie et de savoir-faire.
Résultat : « Le partenariat stratégique se porte bien. L’étendard français n’est pas porté que par Total et Areva, mais aussi, depuis un an ou deux, par Alstom, EADS ou Thales. Les Kazakhstanais apprécient que la France les aide à moderniser leur pays », affirme Jean-Charles Berthonnet, l’ambassadeur de France au Kazakhstan.
« La France est devenu le 4e pays investisseur au Kazakhstan », de 5e qu’elle était en 2009, comme s’en félicitait Eric Besson début novembre dernier, à Astana.
Le ministre de l’Industrie, de l’Énergie et de l’Économie numérique illustrait par sa présence combien le dialogue est soutenu depuis deux ans entre membres des gouvernements français et kazakhstanais. Sans parler des deux chefs d’Etat qui se sont rencontrés à quatre reprises dans le même laps de temps. « C’est un signe qui ne trompe pas », estime M. Berthonnet.
« En outre, ce partenariat traite de sujets majeurs », nous précisait Eric Besson. Les sociétés françaises œuvrant dans le domaine de le défense traitent avec Astana. La présence française dans un secteur aussi clé que le transport, compte tenu de l’immensité du pays, contribue aussi à renforcer le caractère stratégique de ce partenariat. Ainsi, Alstom va-t-il produire des locomotives électriques avec le groupe russe TransMashHolding et les chemins de fer kazakhstanais. Même si la France tente de s’impliquer pleinement dans la diversification industrielle kazakhstanaise, le domaine de l’énergie n’est pas négligé pour autant. Total a le vent en poupe et lorgne sur de nouveaux gisements, outre les 16,81 % qu’il détient sur le champ offshore géant de Kashagan et les 17 % du champ de gaz à condensats de Khvalynskoye (dont GDF-Suez a acquis 8 % des parts).
Quant à Areva, il signait avec Kazatomprom, la société nucléaire nationale du Kazakhstan, à l’occasion de la visite de M. Besson, un accord pour la création d’une usine de fabrication de combustible nucléaire dédiée au marché asiatique. Il prévoit « l’exploitation conjointe des mines d’uranium pour la production de 4 000 tonnes par an entre 2012 et 2039, et une coopération élargie sur l’ensemble du cycle amont du combustible ».
Dans la foulée, le ministre installait le comité de pilotage d’un laboratoire franco-kazakhstanais sur les terres rares, hautement stratégiques depuis que la Chine a décidé de restreindre ses exportations. Pékin produisait jusqu’à présent 97 % desdites terres. Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et des industriels français (Areva, Rhodia et Eramet) vont tenter d’apporter leur expertise scientifique pour évaluer les réserves kazakhstanaises et générer de nouveaux projets industriels.
R. G.
L’association Cercles français d’affaires au Kazakhstan tisse des liens
Créée en octobre 2010, l’association Cercles français d’affaires au Kazakhstan (ACFAK) joue à plein son rôle de développement et de maintien du « lien avec la communauté d’affaires de la France et des cercles francophone et francophile d’une part, et celle du Kazakhstan d’autre part ». Une trentaine de membres composent l’association.
« L’essentiel de la communauté d’affaires française », affirme Jean-Michel Meunier, le président de l’ACFAK, par ailleurs représentant au Kazakhstan de la Société Générale. 11 heures, mercredi 2 novembre 2010, Astana… une quinzaine d’hommes d’affaires français ou travaillant pour des sociétés de l’Hexagone assistent à une présentation sur le blé au Regine’s, branche kazakhstanaise du club de la chanteuse française. Total, EADS, Natixis ou Cifal sont représentés. L’ambassade de France aussi, en la personne de l’ambassadeur et du chef de la mission économique. Chaque mois, l’ACFAK organise un déjeuner ou un dîner. « Une fois sur trois, cela se passe à Astana, la capitale politique. Sinon, c’est à Almaty, la capitale des affaires », raconte Jean-Michel Meunier. Tout ce petit monde poursuit la discussion à table. On y décrypte à plusieurs l’actualité politique ou économique kazakhstanaise, évoque tel ou tel projet d’une de nos entreprises, annonce l’ouverture d’une école française ou la prochaine visite du ministre Eric Besson… « À hauteur de nos moyens, nous tentons aussi d’organiser des visites sur des sites industriels du pays.
Par ailleurs, nous pouvons héberger une entreprise, lui fournir bureau, téléphone et secrétariat, répondre aux questions des entreprises intéressées par le Kazakhstan en les mettant en relation avec nos membres et nos contacts », explique Jean-Michel Meunier. Services également ouverts aux associations et chambres de commerces françaises, pour 500 euros de cotisation annuelle. Pour tout renseignement, l’ACFAK a son site web : www.france.kz.
R. G.