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Ces PME qui réussissent sur le marché vietnamien

Malgré le ralentissement économique actuel, les opportunités d’investissement restent nombreuses au Vietnam. à condition, dans ce pays en transition économique, de savoir s’adapter à l’environnement professionnel et administratif local. Témoignages et retours d’expériences.

« On ne vient pas au Vietnam pour faire un coup », avertit Guillaume Crouzet, le directeur de la Chambre de commerce et d’industrie française au Vietnam. « Il faut avoir une vision à long terme », poursuit-il, « avec un relais sur place, au moins un bureau, même léger, car c’est très compliqué de faire du business depuis la France sans une implantation locale ».

Aymeric Pons, directeur du bureau d‘Erai au Vietnam, l’agence rhône-alpine qui aide les entreprises de cette région dans leur développement international, ne dit pas autre chose : « Avant d’avoir des relations commerciales avec quelqu’un ici, il faut d’abord avoir des relations humaines, aller au restaurant ensemble… Tout ça peut prendre du temps ».

Bureaucratie parfois kafkaïenne pour obtenir une licence, difficulté d’avoir une entreprise en son nom propre dans certains secteurs, les obstacles peuvent paraître nombreux. « C’est quand même plus facile dans le sud du pays », note un chef d’entreprise. Selon Guillaume Crouzet, « le marché est différent dans le Nord et le Sud, et la stratégie doit donc être différente entre un Nord plus administratif, et un Sud plus commercial et industriel ».
Autre souci dans ce pays en transition, un environnement juridique encore instable, où les règles peuvent parfois être floues ou sujettes à interprétation. « Dans certains secteurs, les textes de loi ne sont pas assez étoffés pour préciser des cadres d’exportation », explique un patron d’usine, ce qui laisse une certaine marge de manœuvre aux services douaniers. « On a intérêt à avoir de bonnes relations avec son douanier », ironise un autre. Sur les marchés publics, la corruption est également une réalité quotidienne.

Enfin, inutile de chercher à se financer au Vietnam. Suite à la crise et à la douloureuse prise de conscience de l’existence d’une « bulle du crédit », avec un système bancaire plombé par les créances douteuses, les banques locales demandent énormément de garanties, avec des taux d’intérêt qui, même s’ils ont baissé, restent le plus souvent supérieurs à 10 %. Mieux vaut privilégier l’autofinancement ou passer par une banque étrangère ou française. Tous ces freins au développement n’en constituent pas pour autant des obstacles insurmontables, les entreprises qui ont réussi peuvent en témoigner…

P. B.

Perrin Vietnam : une aventure familiale dans la maroquinerie

Tanneur de profession, Henri Perrin a quitté la France en 2005. « Trop de coûts, et puis tous mes clients étaient partis, alors on a fermé l’usine et je suis venu m’installer ici », explique-t-il. Aujourd’hui à la tête d’une maroquinerie près d’Hô Chi Minh – Ville, il ne regrette pas son choix.

Lorsqu’il pose pour la première fois le pied au Vietnam, Henri Perrin s’appuie sur un partenaire français déjà installé. Les deux associés construisent une première usine, une tannerie qui entre en service en 2008. Mais rapidement, des divergences de point de vue conduisent Henri Perrin à se retirer de l’affaire, puis à se lancer dans une aventure familiale. Son frère, basé à Los Angeles, est à la tête de « Perrin Paris », une maroquinerie de luxe. Il fait fabriquer ses sacs en Italie. Henri le convainc de transférer l’usine au Vietnam. La maroquinerie « Perrin Vietnam » voit alors le jour, et s’installe sur la zone industrielle d’Amata, à Bien Hoa, dans la province de Dong Nai, au nord d’Hô Chi Minh – Ville.

Chaque année, entre 2000 et 3000 sacs sortent des lignes de production. « Nous avons commencé à 4 ou 5, et aujourd’hui nous sommes 60 employés », se souvient Henri Perrin. « Nous sommes en progression, c’est certain ». Mais tout n’a pas été facile. L’entrepreneur, surtout venu ici pour le faible coût de la main-d’œuvre, a dû s’adapter à un pays qu’il ne connaissait pas : « Il faut du temps pour comprendre les choses, se diriger à travers les arcanes administratifs ».

Il pointe également du doigt l’importance des douanes pour une entreprise comme la sienne, qui exporte la totalité de sa production vers l’Europe et les États-Unis. « Il faut entretenir de bons rapports avec son douanier, le service des douanes est très puissant ». Autre obstacle à surmonter, celui de la communication : « 99 % des gens ne parlent que vietnamien ! ».

De Paris, le patron fait venir créateurs et prototypistes pour imprégner ses employés du savoir-faire français. « Mes ouvriers comprennent très vite, et sont méticuleux », se satisfait-il. Celui qui décrit aujourd’hui le Vietnam comme « son petit paradis » prédit un « avenir rieur » pour le pays. Mais la crise mondiale n’est jamais très loin lorsque l’on est exportateur. « Mon marché ne se développe pas, ce n’est pas la tendance avec la baisse du pouvoir d’achat en Europe et aux USA », se désole-t-il. Du coup, il ne prévoit pas d’embauches supplémentaires pour le moment.

P. B.


Saint Honoré : de l’appétit sur une niche gourmande inexplorée

« Quand je vois que les Coréens donnent des noms français à leurs boulangeries, ça me casse un peu les pieds ! ». Alors Philippe Perruchot, ancien spécialiste de l’eau purifiée, installé à Hanoi depuis 16 ans, a décidé de lancer sa propre boulangerie – pâtisserie au Vietnam. Avec des perspectives à l’international.

Presque trois ans après l’ouverture du magasin, une file ininterrompue de clients vient chercher son pain en ce vendredi soir. Pour un peu, on se croirait presque dans une boulangerie parisienne. Sauf que la boutique est située à Hanoi, à deux pas du lac de l’Ouest.

Philippe Perruchot est heureux du développement de Saint Honoré, imaginée au départ comme un business d’appoint. « La boulangerie, le bistro, c’est un secteur pour lequel le savoir-faire français est réel, or c’est un marché sur lequel il n’était pas présent ici ». La société, montée avec deux autres partenaires, emploie des Vietnamiens formés en France, et également des Français, pour garantir le goût du pain et des pâtisseries. L’entreprise compte maintenant 80 employés, répartis entre les magasins et l’usine de fabrication. Au fur et à mesure, Saint Honoré a étoffé ses activités et propose également des services de traiteur. Mais Philippe Perruchot voit plus loin. Après l’ouverture d’une seconde enseigne en 2012, plus proche du centre de la capitale vietnamienne, l’entrepreneur prévoit d’en inaugurer bientôt deux ou trois autres à Hanoi, avant de s’attaquer au sud du pays et à Hô Chi Minh – Ville à la fin de l’année. Au Vietnam, les fondateurs veulent investir en propre. Mais Saint-Honoré pourrait bientôt franchir les frontières vietnamiennes, grâce à l’aide de nouveaux partenaires laotiens, cambodgiens, kazakhs ou encore mongols. « C’est clair, le concept plaît, beaucoup de gens sont intéressés », explique l’entrepreneur.

Le patron attribue sa réussite à sa bonne connaissance du pays. « Sans connaître, on va faire énormément d’erreurs. Dans le secteur de la restauration par exemple, c’est très compliqué d’être propriétaire. Il vous faut donc un prête-nom ». Des difficultés réelles, selon lui, mais contrebalancées par « le peu de contraintes » pour monter une société, et surtout le « potentiel énorme d’un marché naissant ».

Mais déjà, Philippe Perruchot doit écourter l’entretien. Il s’excuse car demain, il s’envole pour la Chine négocier l’achat de nouvelles machines. Un voyage qui se poursuivra en Mongolie, à la rencontre de partenaires potentiels pour y implanter son enseigne.

P. B.

Hi-Tech Wires Asia Le choix du Vietnam pour alimenter le marché asiatique

Filiale du groupe français Termo-Technologies (une ETI récemment formée par les actionnaires de Thermocompact), Hi-Tech Wires Asia (HWA) fabrique des fils de très haute technologie, avec des dépôts de métaux précieux, destinés aux secteurs de l’électronique, la micro-électronique et l’aérospatiale.
La société est présente au Vietnam depuis 2008, et ses perspectives sont très positives, selon Bertrand Maxel, le directeur de l’usine.

Bertrand Maxel veut être clair : « Nous ne sommes pas venus au Vietnam pour bénéficier en premier lieu du faible coût de la main-d’œuvre mais surtout pour nous rapprocher de nos clients qui grandissaient en Asie ». Une situation géographique intéressante, l’absence de concurrents dans le pays, et les accords de libre-échange avec certains États voisins ont aussi pesé dans la décision. En 2008, la production démarre donc au sein d’une usine flambant neuve, située à une vingtaine de kilomètres au nord d’Hô Chi Minh – Ville.

Pour se lancer, HWA a bénéficié, grâce au soutien de sa maison mère, d’un prêt bancaire via une banque française installée au Vietnam. Emprunter de l’argent à une banque vietnamienne demandait « trop de garanties ».

Depuis deux ans à la tête de la société, Bertrand Maxel mesure le chemin parcouru et les difficultés qui ont jalonné le chemin. Pas facile, en effet, pour un petit groupe français de s’implanter à l’international, dans un pays où il n’est jamais allé, et surtout, « pour exporter ». « Il ne faut pas arriver avec un schéma tout fait. Il faut vietnamiser son management », explique-t-il. Et de souligner la nécessité d’une formation spécifique passant par un suivi régulier des employés. Leur nombre a augmenté progressivement. Ils sont aujourd’hui au nombre de 64.
L’entreprise exporte la totalité de sa production (150 tonnes de fil par mois) et jouit de l’avantage d’être en « export processing zone ». Les règles sont claires : les exportations se font sans problème, et la matière première est importée sans taxes. En échange, tout doit être exporté pour faire rentrer des devises étrangères dans le pays. Pas besoin, donc, de passer de longues heures à négocier avec les services des douanes.

L’activité continue de croître de manière régulière, et Bertrand Maxel prévoit une croissance et un développement basés sur un « niveau de performance actuel déjà très intéressant ». Chaque année, HWA importe de nouvelles machines pour augmenter la capacité de production de l’usine. Car avec la concurrence féroce des fournisseurs asiatiques, l’usine n’exporte plus seulement vers l’Asie, mais également vers l’Europe et les États-Unis.

P. B.

Témoignage : Thierry Mermet (SOA) profite de l’image positive du Vietnam par rapport à la Chine
Aider les entreprises à trouver et évaluer des fournisseurs au Vietnam en fonction de leurs besoins. Depuis 2007, le sourcing est le cœur de l’activité de SOA (Source of Asia), co-dirigée par Thierry Mermet. Mais son développement actuel passe aussi par le conseil et la représentation d’entreprises.

Au Vietnam depuis 1999, Thierry Mermet décide en 2007 de créer sa propre société. Armé de ses 15 ans d’expérience en tant que directeur d’usine, il s’associe avec un autre Français pour créer son entreprise de sourcing : SOA.

Les deux partenaires n’ont aucun mal à créer leur entreprise. Le gouvernement vietnamien favorise l’import-export, secteur où une société peut être 100 % étrangère, sans prête-nom vietnamien.

Les locaux sont installés à Hô Chi Minh – Ville, et SOA compte aujourd’hui 15 employés, dont 4 Français. Depuis sa création, l’entreprise s’est diversifiée. Elle ne recherche plus seulement des fournisseurs pour les entreprises, mais peut également leur vendre du conseil : suivre la qualité du produit, aider à la formation des ouvriers… Enfin, plus récemment, SOA s’est lancée dans la représentation d’entreprises. Se définissant comme un « accompagnateur des ventes », Thierry Mermet dit profiter de l’image positive du Vietnam par rapport à la Chine. « Il y a ici une masse de fabricants, d’usines, et une main-d’œuvre pas chère et donc des produits compétitifs », dit-il. Par contre, il pointe du doigt de gros problèmes d’infrastructure (routes, coupures d’électricité), une formation professionnelle de faible niveau, et un manque de rigueur global au niveau des plannings de production.

À terme, le but est d’accompagner les clients pour longtemps, « d’investir et de grossir avec eux, ne pas rester juste un consultant externe que tu utilises au démarrage et que tu abandonnes après ». Mais SOA ne souhaite pas se limiter aux seules frontières vietnamiennes, et vise un développement régional. La société travaille un peu au Cambodge, et a déjà effectué quelques opérations en Birmanie. La Mongolie et le Kazakhstan, « deux pays en plein boom, complexes et en train de s’ouvrir, qui ressemblent un peu au Vietnam il y a 15 ans », sont aussi dans la ligne de mire.

P. B.

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