Frappée par le contrecoup du ralentissement économique chinois, et plus largement mondial, Hong Kong tire bien son épingle du jeu grâce à un tourisme florissant et des chantiers d’infrastructures en cours. Dans ce contexte, cette plaque tournante du commerce avec la Chine continentale reste très attractive, à condition de bien anticiper les coûts du ticket d’entrée. L’édition 2014 de ce guide business fait le point sur les nouvelles opportunités.
Par sa nature géographique et démographique, Hong Kong a toujours eu vocation à être une plaque tournante de marchandises, un lieu de services en tout genre, notamment financiers et portuaires. Mais le ralentissement de l’économie en particulier chinoise n’a pas été sans effet sur l’économie extrêmement ouverte et exposée qu’est Hong Kong, désindustrialisée à 99 %.
« La situation est loin d’être alarmante mais l’ambiance n’est plus à la fête », résume Stéphane Cieniewski, chef du service économique au consulat de France à Hong Kong. Les chiffres insolents de croissance avec des flux mirobolants et des entrées en bourse battant des records historiques plusieurs fois par an ne sont plus au rendez-vous. Mais le premier semestre 2013 a connu 3 % de croissance, après une année 2012 faiblarde (1,4 %). Le gouvernement a prévu dans son dernier budget un taux entre 2,5 et 3,5 %, tout indique qu’il se situera juste au milieu.
Le chômage à 3,4 % reste proche de son taux plancher. Paradoxalement à Hong Kong, ce très faible taux de chômage est quasiment un obstacle à la croissance. Nombre d’entreprises, y compris françaises, affirment en effet souffrir du manque de main-d’œuvre et d’un taux de turnover très élevé qui a tendance à faire monter les coûts salariaux des entreprises.
La forte exposition de l’économie a l’inconvénient de la rendre fragile aux chocs extérieurs, qu’ils viennent de Chine ou de l’Ouest. Tout se ressent à Hong Kong. Mais deux nouveaux facteurs compensent pour le moment ce phénomène : le tourisme, et les chantiers d’infrastructures.
Le tourisme est fortement dominé par la venue en masse de Chinois continentaux. Sur 49 millions de touristes par an (+16 % en 2012), 70 % viennent de Chine continentale. Alors que Hong Kong compte 7 millions d’habitants, les 35 millions de visiteurs chinois comptent pour 40 % des ventes de détail et pour 90 % des ventes dans le secteur du luxe. Les chinois continentaux préfèrent acheter leurs produits de luxe en dehors de Chine et en particulier à Hong Kong, pour au moins deux raisons : ils sont moins taxés qu’en Chine et ils leur semblent plus « sûrs ». L’effet du tourisme chinois est donc extrêmement stimulant sur l’économie locale.
De porte d’entrée des occidentaux en Chine, Hong Kong est en train de devenir une porte de sortie des Chinois continentaux vers sinon l’occident, du moins la ville la plus occidentale d’Asie. Car Hong Kong continue de donner le la aux tendances chinoises. « Hong Kong a désormais une nouvelle fonction, celle d’un laboratoire pour les entreprises » affirme Oriane Chenain, directrice de la Chambre de Commerce et d’Industrie française à Hong Kong (FCCIHK/French Chamber of Commerce and Industry in Hong Kong). Elle constate qu’un certain nombre d’entreprises, en particulier dans le secteur du luxe mais pas seulement, essayent des nouveaux produits ou des nouvelles stratégies de ventes, profitant de la grande réactivité du marché. « Hong Kong jouit en même temps d’une clientèle locale hyper sophistiquée, qui sert sans que cela soit avoué de modèle à la nouvelle bourgeoisie chinoise, et en même temps d’une importante clientèle de Chinois continentaux. Les entreprises mettent donc ici au point leur stratégie de service aux Chinois, qu’elles peuvent ensuite appliquer ailleurs » ajoute la directrice de la Chambre.
Les grands travaux d’infrastructure, annoncés en 2007 et qui vont connaître un pic de construction en 2014-2015, contribuent aussi à compenser le ralentissement de l’économie. Ils représentent entre 5 et 10 milliards d’euros par an de dépense publique. La filiale de Bouygues Construction, Dragages, a d’ailleurs remporté plusieurs contrats à Hong Kong et Macao, notamment une partie du pont devant relier Hong Kong à Macao et Zhuhai, l’ouest du Delta de la rivière des perles. C’est l’un des plus grands ouvrages en cours dans le monde.
Dans ce contexte de croissance plus mesurée, la maîtrise des coûts opérationnels est devenue l’un des premiers enjeux de la plupart des entreprises, locales ou étrangères. Le coût de l’immobilier reste l’un des obstacles les plus difficiles à franchir. Plusieurs grandes banques ont déménagé leur siège, du quartier des Finances à Central sur l’île, vers Kowloon, la rive continentale de Hong Kong, située à 15 minutes de ferry. « Je dis depuis 3 ans que l’immobilier va baisser » ironise Stéphane Cieniewski, « cela va bien finir par arriver ! ». Reste qu’en trois ans, les loyers résidentiels et les baux commerciaux ont parfois encore doublé.
Pour le moment, suite à plusieurs mesures visant à enrayer les achats immobiliers spéculatifs, couplée avec une légère augmentation des taux d’intérêt, (proches de 3 %), le nombre de transactions baisse mais les prix résistent. Plusieurs boutiques passent pour avoir le loyer le plus cher de Hong Kong, et donc du monde, car Hong Kong, selon une étude réalisée par l’agent immobilier Savills et publiée par Forbes en mars 2013 aurait été reconnue comme le pas-de-porte le plus cher de la planète. Certains considèrent que l’on paye en loyer ce que l’on ne paye pas en impôts…
L’économie hongkongaise est donc saine, libre et ouverte, mais le ticket d’entrée y est très élevé, en particulier pour les petites entreprises.
Florence de Changy, à Hong Kong
Repère
Un statut très spécial
Depuis son rattachement à la République populaire de Chine (RPDC), en 1997, Hong Kong, avec son statut officiel de « Région administrative spéciale », n’a cessé d’affirmer sa différence de la mère patrie : monnaie distincte, justice indépendante, système éducatif propre, système politique géré par le principe du « un pays, deux systèmes »… Même le trafic roule à gauche dans cette ancienne colonie britannique et à droite en Chine. Quant à la langue, les Hongkongais tiennent à la leur, le cantonnais, incompréhensible pour les Chinois qui parlent mandarin… Différente certes mais en fait de plus en proche. L’intégration physique et économique se fait à grands pas. Hong Kong offre la sécurité d’institutions fiables et le confort d’un mode de vie à l’occidentale avec un accès presque direct à la grande Chine… « À Hong Kong, on est en Chine sans y être » commentent volontiers les étrangers qui ont choisi d’y travailler.
Bloc-notes
Taux de croissance du PIB en 2012* : 4,19 %
Estimation pour 2013* : 4,21 %
Revenu national par habitant en parité de pouvoir d’achat* : 52 350 dollars US
Classement à l’indice de perception de la corruption de Transparency International (2013) : 14e sur 176 pays (la République populaire de Chine est 80e)
Classement Doing Business 2013 : 2e sur 185 pays (Chine 91e)
Sources : *Banque mondiale, mai 2013. Chiffres cités dans la fiche Hong Kong de l’Atlas des risques pays 2013 du Moci. N° 1943, 13 juin 2013.