Les autorités camerounaises ont plutôt bien géré les mouvements populaires importants en début d´année liés à la flambée des prix alimentaires. Diverses mesures ont été rapidement prises : le gel des prix du carburant (un coût de 180 milliards de FCFA sur l´année pour l´État) ; la suspension des droits de douane sur la farine, le blé, le riz et le poisson congelé ; des mesures à l´égard des importateurs.
Parallèlement, les salaires des fonctionnaires ont été augmentés en moyenne de 20%, ce qui a dopé la croissance qui atteindrait 4% sur 2008. Du jamais vu depuis 4 à 5 ans. La baisse des cours mondiaux des matières premières au second semestre a permis de contenir l´inflation à 5% sur l´année.
La crise mondiale n´a guère impacté le secteur bancaire local qui demeure relativement sain et liquide, mais celle-ci pèse fortement sur la filière bois dont les carnets de commande se dégonflent dangereusement. Parallèlement, on peut s´inquiéter de l´impact qu´aura la crise sur le secteur minier qui a le vent en poupe au Cameroun : le nombre de permis de recherche délivrés est passé de 2 en 2003 à 53 durant le seul premier semestre 2008. L´américain Geovic se positionne sur le cobalt, nickel et manganèse près de Lomié ; l´australien Sundance Resources sur le fer de Mbalam (ce qui implique la création d´une voie ferrée de 400 km) ; Hydromine sur la bauxite à Minim Martap et à Ngaoundal ; le coréen C&K sur le diamant à Mobilong ; le sud-africain Africa Aura sur l´or dans le Batouri. Certains projets risquent, toutefois, d´être mis en attente en 2009 en raison de la crise.
Il en est de même de projets d´investissements dont les appels d´offres ont été lancés cette année, comme le port en eau profonde de Grand Batanga près de Kribi (655 millions de dollars d´investissements avec Rio Tinto, Sundance, China Harbour Engineering, Maersk et Vinci « short listés ») ou encore le démarrage du barrage de Lom Pangar prévu pour 2009 ou 2010.
Les milieux d´affaires sont préoccupés par un environnement des affaires qui se complique. Ces deux dernières années, on a recensé pas moins de quatre nouveaux régimes fiscaux dérogatoires tendant à soutenir l´in- vestissement, la Bourse et le réinvestissement des bénéfices. Mais en l‘absence de textes d´application, ils demeurent inapplicables… La charte des investissements de 2002 n´est toujours pas applicable car les codes sectoriels ne sont pas tous sortis. Or, cette charte deviendra caduque si ces textes ne sont pas édictés avant avril 2009. L´ancien code de 1990 ferait alors office de réglementation en la matière.
Le projet de loi de finances 2009 prévoit de réintégrer dans le code général des impôts un certain nombre d´avantages figurant dans divers codes sectoriels et ce code ferait office de référentiel unique en matière fiscal et d´investissement.
Côté politique, outre la réforme constitutionnelle autorisant le président Biya à se représenter en 2011, l´opération Épervier a donné lieu à plusieurs vagues d´arrestations pour détournements de fonds publics, dont l´ancien ministre de l´Économie et des finances Polycarpe Abah Abah et son ex-collègue de la Santé Urbain Olanguena Awono.
Bénédicte Châtel et Anne Guillaume-Gentil