Le gouvernement camerounais affronte actuellement une situation sociale tendue, liée à l´inflation des prix des denrées de première nécessité.
D´importants efforts restent à faire pour développer durablement l´économie d´un pays qui présente un potentiel reconnu. Et dont la stabilité reste la carte maîtresse.
Les émeutes de février dernier contre l´augmentation des prix et le régime en place, provoquant plusieurs dizaines de morts, ont révélé une situation économique fragile du Cameroun. D´après le FMI, les indicateurs sont pourtant « encourageants ». Les finances publiques se sont équilibrées en 2007 grâce à l´allègement de la dette et aux revenus pétroliers qui fournissent le quart des recettes budgétaires, et l´inflation a été maîtrisée. Le PNB par habitant atteint 650 euros par an. La croissance hors pétrole, qui était de 2,9 % en 2007 (3,6 % en 2006), devrait reprendre en 2008 autour de 4,5 %, notamment grâce, selon le FMI, à « une reprise des activités dans les secteurs agricoles, des services et l´augmentation des investissements publics ». Et la stabilité reste la carte maîtresse du Cameroun face aux investisseurs.
Mais pour améliorer les conditions de vie des Camerounais, la croissance devrait avoisiner les 7 %, selon les économistes.
Environ 35 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Les travailleurs du secteur formel privé et public représentent à peine 10 % des actifs. Le salaire moyen tourne autour de 70 euros mensuel.
Ébranlé par la violence des revendications populaires, et surtout soustrait aux contraintes budgétaires imposées par le FMI (le Cameroun fini, en juin 2008, son programme triennal avec le Fonds), le gouvernement a pris, début mars, des mesures d´urgence. Les salaires des fonctionnaires ont ainsi été augmentés de 20 %. Sur le blé, la farine, le poisson et le riz, les droits de douane ont été suspendus. Ils ont été abaissés pour le ciment et le clinker. Les tarifs de l´électricité ont été allégés pour les petits consommateurs et ceux du carburant bloqués.
L´actuelle tension alimentaire mondiale a par ailleurs poussé les autorités, en avril dernier, à annoncer une relance de la production agricole locale à travers l´appui aux filières vivrières (riz, plantain, mais, tubercules, palmier à huile), en déshérence depuis une vingtaine d´années.
À long terme, le gouvernement de Yaoundé prévoit d´investir davantage dans les secteurs de l´agriculture et des infrastructures, d´accroître les recettes hors pétrole, d´élargir l´assiette fiscale et d´améliorer le climat des affaires. Quelques projets industriels en cours devraient redynamiser la croissance, comme l´extension de l´usine de production d´aluminium Alucam (Rio Tinto/Alcan), avec à la clef la construction de deux barrages hydroélectriques et l´augmentation de la production nationale d´électricité.
Des sociétés américaines, canadiennes et australiennes misent sur l´exploitation d´importantes mines de cobalt, de bauxite et de fer. On parle de la construction d´un port en eau profonde à Kribi… Le pays compte sur les capitaux étrangers. Avec 300 entreprises implantées sur son sol, 1 milliard d´euros de volume d´échanges commerciaux en 2006, et autant en aide au développement, la France reste le premier partenaire économique du Cameroun. Les États-Unis investissent surtout le domaine de l´énergie (pipe line Tchad-Cameroun et exploitation minière).
Quant à la Chine, plus portée sur les infrastructures de prestige, elle n´effraie encore guère les entrepreneurs français sûrs de leur assise et de leurs compétences. Mais ses échanges commerciaux avec le Cameroun s´amplifient depuis quelques années (213 millions d´euros en 2006). La Chine est actuellement le troisième fournisseur du pays après le Nigeria et la France.
Valentine Lescot, à Yaoundé