Le champion franco-italien des semi-conducteurs traverse une mauvaise passe que n’arrange pas la guerre commerciale de Donald Trump et le désaccord entre Rome et Paris sur sa gouvernance. Revue de détail dans cet article proposé par notre partenaire La newsletter BLOCS.
Le géant franco-italien des semi-conducteurs STMicroelectronics a annoncé le 10 avril la suppression de 2800 emplois. Ces coupes passeront par des plans de départs volontaires à l’échelle mondiale sur une période de trois ans, et devraient notamment concerner ses sites italiens et français. En particulier, celui de Tours, déjà touché par une délocalisation à Singapour, s’apprête à subir une nouvelle réduction de son activité.
Un tournant inquiétant pour cette entreprise de 50 000 salariés, qui a accusé en 2024 un recul de 23,4 % de son chiffre d’affaires, à 13,4 milliards d’euros, et une chute de 45 % de son cours en bourse, en dépit d’une enveloppe de 2,9 milliards d’euros d’aide d’État française reçue en 2023.
Baisse des commandes et menaces de droits de douane
En cause : la baisse des commandes enregistrées par l’entreprise de droit néerlandais, dont les ventes dépendent à environ 45 % de l’automobile. En difficulté, les acteurs de ce secteur ont de surcroît eu tendance à sur-stocker pour mieux affronter les multiples risques géopolitiques.
La téléphonie et les ordinateurs, les équipements industriels ainsi que l’électroménager, qui constituent les trois autres secteurs clé de STMicroelectronics, ne lui ont pas permis d’inverser la tendance.
Mi-février, la banque Jefferies avait envoyé un message positif inattendu, en incitant les investisseurs à acheter les actions de STMicroelectronics, prévoyant une forte reprise de son activité au deuxième semestre 2025. Principale raison de cette perspective d’embellie : la sortie prochaine de l’iPhone 17, qui devrait embarquer un grand nombre de puces fabriquées par l’entreprise.
Le retour en force de STMicroelectronics paraît toutefois beaucoup moins probable aujourd’hui, dans le contexte de feu d’artifices protectionniste américain et du poids de l’incertitude sur l’industrie mondiale.
Donald Trump a certes finalement exempté les smartphones et les ordinateurs de droits de douane et évoque la possibilité de faire de même sur le secteur automobile. Il prévoit toutefois, dans le même temps, de sanctionner très rapidement celui des semi-conducteurs.
Un nouveau coup dur en perspective pour STMicroelectronics, qui souffre déjà d’un conflit politique entre Paris et Rome autour de sa gestion. L’Italie, qui constitue le premier actionnaire de l’entreprise aux côtés de Bpifrance, s’oppose en effet frontalement à son P-dg, Jean-Marc Chéry, dont elle remet en cause la stratégie, l’accusant de favoriser les intérêts français.
La semaine dernière, le refus du conseil de surveillance de l’entreprise de désigner en son sein Marcello Sala, directeur général du département économique du ministère italien des Finances, proche de la première ministre, Giorgia Meloni, a mis le feu aux poudres. Le ministre italien des Finances, Giancarlo Giorgetti, a ainsi qualifié cette décision d’« incompréhensible, très grave et inacceptable ».