Le président Donald Trump a annoncé, dans la nuit du 26 au 27 mars, la prochaine mise en place de droits de douane additionnels de 25 % sur tous les véhicules importés aux États-Unis. Dans tous les pays constructeurs, l’inquiétude monte.
[Mis à jour le 28/03/2025 14H30, analyse Kearney]
Après l’acier et l’aluminium et leurs produits dérivés, l’automobile. A Bruxelles, la réaction a été immédiate : « Je regrette profondément la décision des États-Unis d’imposer des droits de douane sur les exportations automobiles européennes », a réagi Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, dans un bref communiqué le 27 mars. « Nous allons maintenant évaluer cette annonce, ainsi que d’autres mesures que les États-Unis envisagent dans les prochains jours. L’UE continuera de rechercher des solutions négociées, tout en préservant ses intérêts économiques ».
Dans la nuit du 26 au 27 mars, le président Trump a annoncé, depuis la Maison Blanche, qu’il allait instaurer des droits de douane supplémentaires de 25 % sur l’ensemble des voitures importées aux États-Unis, quelle que soit la provenance. Elles toucheront à partir du 2 avril « toutes les voitures qui ne sont pas fabriquées aux États-Unis », et « nous commencerons à les collecter le 3 » a déclaré Donald Trump, selon des propos rapportés par la presse internationale. « Nous allons faire payer les pays qui font des affaires dans notre pays et prennent notre richesse », a justifié le président américain.
Ces annonces ont suscité une volée de critiques dans le monde, de la part des autorités de tous les blocs producteurs qui exportent aux États-Unis, dont le Japon et l’Union européenne (UE), le Canada mais aussi la Corée du Sud et le Brésil. Selon Les Echos, le Premier ministre canadien, Mark Carney, a d’ailleurs eu des mots beaucoup moins diplomatiques que ceux de l’exécutif européen pour réagir : « ces droits de douane contre notre industrie automobile sont une attaque directe contre les travailleurs [canadiens]» a-t-il déclaré, accusant le président américain de « trahir notre accord commercial ».
Elon Musk, patron de Tesla et proche allié de Donald Trump a lui-même admis que cela affecterait sa chaîne d’approvisionnement : « Pour être clair, cela affectera le prix des pièces détachées des voitures Tesla qui viennent d’autres pays. L’effet sur les coûts n’est pas négligeable », a-t-il posté sur son réseau social X selon des propos rapportés par la presse économique.
L’UE prépare sa riposte
Ces nouveaux droits de douane seront-ils finalement reportés comme la rumeur coure dans la presse américaine ?
Quoiqu’il en soit, cette nouvelle sortie du locataire de la Maison Blanche a de quoi conforter la Commission européenne dans sa stratégie de riposte : dans l’attente d’en savoir plus sur les mesures tarifaires et non tarifaires qui seront mises en place à partir du 2 avril par les États-Unis -dont la fameuse politique de droits de douane réciproques-, et pour donner du temps à la consultation au sein des États membres sur les listes de produits américains qui seront ciblés par les contre-mesures européennes, l’exécutif européen avait reporté l’ensemble la mise en œuvre de ses contre-mesure à la mi-avril.
Les États-Unis sont le premier client à l’export de l’industrie automobile européenne, absorbant près d’un quart de ses exportations en valeur pour environ 640 000 véhicules, selon les données de l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA), dont 445 000 pour la seule Allemagne. D’après La Tribune, le premier État membre à être particulièrement affecté par cette nouvelle menace sur l’automobile est bien entendu l’Allemagne et ses grands constructeur (Volkswagen, BMW, Mercedes), dont les exportations automobiles outre-Atlantique ont atteint 24,8 milliards d’euros l’an dernier, plus de 13 % de ses exportations totales. La France et l’Italie, via Stellantis, sont également exposées mais dans une bien moindre mesure.
Pour Sébastien Amichi, associé chez Kearney et responsable de l’automobile à Paris, si elle se concrétise, la mise en place de droits de douane de 25 % sur les véhicules aura un effet dévastateur sur l’industrie européenne : « La position de l’Europe est critique à plusieurs titres : d’abord bien sûr parce que la baisse drastique de ses ventes automobiles sur le marché américain l’impacterait fortement, ensuite parce que les mesures de rétorsion qu’elle pourrait prendre contre les importations d’automobiles seraient une double peine pour plusieurs constructeurs européens qui produisent certains modèles exclusivement aux Etats-Unis, enfin parce qu’elle aurait encore plus besoin de se tourner vers le marché chinois alors même qu’elle cherchait jusqu’alors à se préserver de l’expansion croissante des acteurs automobiles venues de Chine, analyse le spécialiste. Largement empêchée à l’Ouest et en posture délicate à l’Est, l’automobile européenne est soumise à une pression dont les effets en termes de revenus (15 milliards) et d’emplois (30 000 postes) pourraient se faire sentir à très courte échéance. »
C.G