En visite au Panama, le secrétaire d’État américain Marco Rubio a réaffirmé la volonté des États-Unis de freiner l’expansion chinoise dans la zone stratégique du canal. Dans la foulée, le gouvernement panaméen a annoncé des mesures contre une entreprise hongkongaise et la fin prochaine de sa coopération avec le programme de financement chinois des « nouvelles routes de la soie ». Revue de détail dans cet article proposé par notre partenaire La newsletter BLOCS.
Pour son premier déplacement en tant que secrétaire d’État des États-Unis, Marco Rubio s’est rendu, dimanche 2 février, au Panama. Ce pays d’Amérique centrale est au cœur d’une tourmente diplomatique depuis que Donald Trump, fraîchement réinvesti, a affirmé vouloir « reprendre » le contrôle du canal pour contrer l’influence chinoise.
Le canal de Panama constitue un passage stratégique par lequel transite habituellement pas moins de 5 % du commerce mondial de biens, soit plus de 500 millions de tonnes de marchandises par an, avec 74,7% des navires en provenance ou à destination des États-Unis, en 2024.
Lors de sa rencontre avec le président panaméen José Raul Mulino, Marco Rubio a réitéré la position américaine. « J’ai indiqué clairement que les États-Unis ne peuvent pas, et ne pourront pas, permettre que le Parti communiste chinois poursuive son contrôle effectif et grandissant sur la zone du canal de Panama », a-t-il écrit sur le réseau social X.
Donald Trump considère les activités chinoises comme une violation du traité américano-panaméen de 1977, qui avait entériné le transfert du canal aux autorités panaméennes le 31 décembre 1999, tout en garantissant sa neutralité.
Ce texte autorise également une intervention américaine en cas d’atteinte à cette neutralité. Donald Trump argumente en ce sens. « La Chine gère le canal de Panama. Il n’a pas été donné à la Chine, il a été donné au Panama de manière stupide. Mais ils ont violé l’accord et nous allons le reprendre, ou quelque chose de très puissant va se produire », a-t-il averti dimanche devant la presse.
Dans le viseur de Donald Trump, deux ports stratégiques situés de part et d’autre du canal et exploités par Hutchison Ports, une filiale du conglomérat hongkongais CK Hutchison Holdings. Ces concessions ont été renouvelées sans appel d’offres en 2021 pour une durée de 25 ans.
Pékin nie toutefois exercer un contrôle sur cette entreprise. « La Chine n’a pas participé à la gestion et à l’exploitation du canal de Panama et n’est jamais intervenue dans les affaires du canal. La Chine respecte constamment la souveraineté du Panama sur le canal et reconnaît le canal comme une voie d’eau internationale neutre et permanente », a déclaré mercredi 22 janvier un porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères.
Annuler la concession d’Hutchison Ports
Les déclarations du président américain ont eu toutefois provoqué un effet immédiat. Dès le lendemain de la visite de Marco Rubio, deux avocats panaméens ont déposé une plainte pour annuler la concession de la société hongkongaise, tandis que le gouvernement a annoncé l’ouverture d’un audit sur les terminaux gérés par CK Hutchison afin de vérifier le respect des accords de concession signés par le Panama en 1997.
Dans un geste supplémentaire de prise de distance avec Pékin, José Raul Mulino a également annoncé que le Panama ne renouvellerait pas son mémorandum d’accord sur l’initiative chinoise des « nouvelles routes de la soie ». Il a précisé que son gouvernement examinerait la possibilité d’un retrait anticipé avant l’échéance actuelle de 2026.
Cette coopération avait débuté en 2017 sous la présidence de Juan Carlos Varela, qui avait reconnu la souveraineté de Pékin sur Taïwan en échange de promesses d’investissements massifs.
Lors des discussions de dimanche, Marco Rubio et José Raul Mulino ont également abordé la question de l’immigration par la brèche de Darien, une zone de jungle entre la Colombie et le Panama qui, selon le Panaméen, a connu une diminution de 94 % des passages clandestins. M. Mulino a proposé une piste d’atterrissage à proximité de cette zone pour les procédures de rapatriement.