Malgré la baisse de fréquentation des cinémas, les films français ont réalisé l’an dernier 38,1 millions d’entrées à l’international, selon les données publiées le 13 janvier par Unifrance. Tous genres confondus, la France est également la cinquième nationalité la plus représentée sur les plateformes de SVOD étrangères et arrive en troisième position sur les chaînes de télévisions.
Si, comme l’a rappelé le ministre délégué au Commerce extérieur Laurent Saint Martin en préambule de la présentation du bilan provisoire d’Unifrance pour 2024, « à l’international, le cinéma est un puissant vecteur de notre identité culturelle » et donc de notre soft power, il est également un secteur important dans l’ensemble des exportations françaises. Les films diffusés en salle ont ainsi rapporté l’an dernier 250,2 millions d’euros (M EUR).
Signe de la diversité de la production tricolore, le top 3 des œuvres les plus vues à l’étranger est composé de l’adaptation d’un classique de la littérature (Le Comte de Monte-Cristo avec 3,3 millions d’entrées), d’un film d’auteur multiprimé (Anatomie d’une chute, 3,2 M) et d’une comédie dramatique familiale (Le dernier Jaguar, 2,4 M).
Les cinéphiles européens toujours au rendez-vous
La production française continue de séduire les marchés européens qui forment les deux tiers de ses débouchés à l’international, Allemagne et Russie en tête, tandis que le Mexique occupe la troisième position, devant la Belgique et le Luxembourg, la Pologne, l’Italie, l’Espagne, la Chine, les Etats-Unis plus le Canada, et la Suisse. Il est évidemment difficile de prédire le destin d’un film à l’étranger, mais l’année 2024 aura été celle de jolis succès.
La passion de Dodin Bouffant a ainsi effectué le meilleur démarrage aux Etats-Unis et au Canada depuis 25 ans et est resté dans le top norvégien pendant cinq semaines. Le dernier Jaguar a totalisé un million d’entrée en Allemagne, tandis que le film d’animation les As de la jungle 2 est arrivé directement à la 1ère place du box-office serbe la semaine de sa sortie. Le numéro 1 du classement, le Comte de Monte-Cristo, a raflé la mise en Bulgarie et en Ukraine où il a rencontré le plus gros succès pour un film français au cours des cinq dernières années.
Une production à contre-courant
Ces quelques exemples ne doivent cependant pas faire oublier que les recettes des œuvres tricolores dans les salles obscures étrangères ont reculé de 13 % par rapport à 2023. En cause, notamment : une baisse générale de la fréquentation. Elle a fléchi de 12,2 % en Allemagne, première destination des exportations d’œuvres cinématographiques françaises, de 12,8 % en Russie et de 25,4 % en Chine, a rappelé Gilles Renouard, directeur du cinéma à Unifrance.
Ce dernier voit dans cette baisse générale du nombre d’entrées les effets de la grève des scénaristes à Hollywood et de l’absence de blockbusters américains qui attirent traditionnellement les foules, mais aussi la concurrence des plateformes.
« La fréquentation des salles en France a reculé de 12 % en 2024, enregistrant la baisse la plus faible dans le monde, a nuancé Ramy Nahas, directeur de la distribution internationale à la SND. La France est à contre-courant de de cette tendance mondiale en raison de la force de son cinéma local. Un petit truc en plus, par exemple, a rencontré le succès auprès du public français mais personne ne croyait à son internationalisation. Il a pourtant très bien marché à l’étranger ! »
Pour Gilles Renouard, la baisse des recettes, qui survient après une année de reprise du secteur en 2023, est « un petit coup d’arrêt » car « la tendance générale reste positive ».
Carton plein sur les plateformes de SVOD en Europe de l’Est
En outre, si, la pandémie de Covid-19 oblige, les plateformes de SVOD (Subscription Video On Demand) continuent de faire de la concurrence aux cinémas, leur courbe de croissance semble s’approcher aujourd’hui de la saturation. Elles n’en demeurent pas moins un vecteur privilégié de l’internationalisation de l’audiovisuel français.
Tous genres confondus, les lancements d’œuvres dans leur pays d’origine représentent en effet un peu mois de 12 % du total, ce qui signifie que la majorité des sorties concernent des titres importés. En 2024, la France a occupé la 5e place des sorties d’œuvres étrangères (3,8 %). Elle arrive en pole position en Pologne, particulièrement amatrice de fictions françaises.
L’Europe se révèle comme la première zone géographique en nombre de sorties hexagonales, avec un taux de pénétration supérieur dans la partie centrale et orientale par rapport à la partie occidentale (5,6 % contre 4,7 %). Si les plateformes SVOD globales génèrent le plus grand nombre de sorties d’œuvres françaises, c’est souvent sur les plateformes locales et régionales que la production tricolore est la mieux exposée à un large public.
L’Espagne, première cliente des œuvres pour la télévision
Enfin, la télévision demeure un canal privilégié de diffusion des œuvres qu’il s’agisse de fictions, de documentaires ou de films animés. Et ce malgré la baisse constante de la durée d’écoute des téléspectateurs et de la diminution des revenus publicitaires auxquelles sont exposées les chaînes.
La France occupe la 3e place des premières diffusions d’œuvres étrangères sur les chaînes de télévision à l’international (7,3 %). Il s’agit du 2e pays européen (et du 1er non anglophone toutes nationalités confondues). L’Espagne comptabilise de loin le plus grand nombre de premières diffusions hexagonales en 2024, devant le Canada et la Pologne. En ce qui concerne le taux de pénétration, c’est la République tchèque qui se hisse en tête devant l’Espagne et la Pologne.
Films, documentaires, animés, séries… Quel que soit leur genre et leur support de diffusion, alors que les marchés américain et asiatiques font grise mine, les œuvres audiovisuelles made in France continuent donc d’avoir la cote en Europe, en particulier dans sa partie orientale qui se révèle au fil des ans très friande des productions hexagonales.
Sophie Creusillet