Le secteur des voyages d’affaires revient à une forme de stabilité, avec des déplacements moins nombreux mais plus chers sur fond de reconfiguration des acteurs du transport et de l’hôtellerie, selon une étude du cabinet de conseil EPSA. Les coûts devraient progresser moins fortement, de 3,5 % en moyenne en 2025.
Directeurs export, commerciaux, dirigeants… Les habitués des déplacements professionnels, devenus sédentaires pendant la crise sanitaire, ont depuis retrouvé le chemin des gares et des aéroports. Le 14e baromètre d’EPSA, publié à l’occasion de la dernière édition du salon IFTM Top Résa (17-19 septembre, Paris Porte de versailles), observe que, sur la période post-Covid, le nombre de voyages d’affaires a fléchi de 20 %, soit un déplacement sur cinq. Le secteur renoue ainsi avec « une forme de stabilité globale » selon le cabinet de conseil européen en optimisation de la performance. Cette baisse d’activité est cependant compensée par la hausse des coûts globaux due à l’inflation cumulée.
Dans l’aérien, les transporteurs prennent la main sur les agences avec l’introduction de la NDC. Commanditée par l’International Air Transport Association (IATA), la New Distribution Capability est une norme de transmission des données utilisant des flux XML. Concrètement, ce canal de distribution permet aux agences de voyages, aux OBT (Online Booking Tool) et aux agences présentes uniquement en ligne de partager des informations sur les tarifs aériens et les services additionnels.
Dans l’aérien, la NDC augmente les coûts
Si ce système à l’avantage de permettre des offres groupées et personnalisées et des différentiels plus faibles entre chaque niveau de prix, « pour les agences de voyage, la distribution ne rémunère plus, elle coûte », estime l’étude. Le sujet est par ailleurs loin de faire l’unanimité. American Airlines, qui avait adopté une approche très offensive en est revenu, après avoir estimé ses pertes à 1,5 milliard de dollars en raison de la fuite de clients.
D’autres hausses de coût apparaissent également avec par exemple la mise en place par Lufthansa en 2025 d’une surcharge écologique pouvant atteindre 72 euros. En France, l’intégration de biocarburants aériens, rendue obligatoire (2% en 2025, 5% en 2030), est un autre facteur d’inflation à venir. Pour autant, bonne nouvelle : la forte inflation des prix enregistrée ces deux dernières années s’essouffle : 1,3 % en 2024 sur les long-courriers, contre 22,1 % en 2023.
Inflation soutenue dans le ferroviaire
Ecologie oblige, le train est plébiscité par les entreprises et, à l’international, les lignes transfrontalières, de jour et de nuit, se multiplient. La SNCF se développe d’ailleurs actuellement en Espagne et espère se lancer sur le marché domestique italien. Mais cette tendance favorable, combinée à une capacité restreinte, entraine mécaniquement une inflation qui reste soutenue. Les prévisions d’EPSA pour 2024, confirmées par l’Autorité de Régulation des Transports (ART), l’évaluent à 7,2 % en France.
Si le coût des déplacements continue d’augmenter, certes dans une moindre mesure, l’hôtellerie effectue également un retour à la modération, note EPSA. En revanche la reconfiguration des grands acteurs de ce secteur suscite des inquiétudes. Pour contrer les fournisseurs qui imposent de nouveaux modèles de distribution et satisfaire les exigences de prix des clients, les agences de voyages d’affaires réagissent en unissant leurs forces.
Concentration et manque de concurrence dans l’hôtellerie
Leader du secteur, American Express Global Business Travel (Amex GBT) est en passe d’acquérir CWT, numéro 3 mondial. Ensemble, ils représenteraient un volume d’affaires d’environ 45 milliards de dollars, près du triple de leur unique concurrent et numéro 2 : BCD Travel. Le duopole qui se profile inquiète quant au manque de concurrence à venir si l’opération, en cours d’évaluation par les autorités de la concurrence au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, venait à se confirmer.
Face à ce constat et dans un contexte économique incertain marqué par l’inflation les entreprises, en particulier les plus petites, réduisent la voilure. Selon une étude mondiale de SAP Occur, presque neuf employés sur dix (84 %) ressentent cet impact, beaucoup notant une réduction des budgets de voyage et une pression accrue pour limiter les dépenses.
Un tiers des salariés évoquent des hébergements de moindre qualité ou dans des zones moins sûres et 43 % des gestionnaires de voyages citent l’inflation comme leur principal défi cette année, car elle augmente les coûts des voyages sans augmenter leur nombre.
Sophie Creusillet