La sénatrice des Yvelines Sophie Primas, présidente de la commission des Affaires économiques du Sénat pendant six ans, est devenue ministre délégué au Commerce extérieur et aux Français de l’étranger dans le gouvernement de Michel Barnier.
[Mis à jour le 25/09/2024 à 17H30]
Vice-présidente du Sénat depuis 2023, Sophie Primas (62 ans) s’est forgée depuis son entrée en politique en 2001 à la mairie d’Aubergenville (Yvelines) une réputation de femme de terrain et de négociatrice. Cette proche de Gérard Larcher, engagée à droite, a claqué la porte des Républicains en juin dernier après que son président Eric Ciotti a passé un accord avec le Rassemblement national en vue des législatives.
Ingénieure agronome, également diplômée de l’Essec en marketing et gestion, elle a travaillé dans le commerce de détail et chez Kantar sur les questions de consommation avant de s’engager en politique, d’abord localement puis à l’Assemblée nationale en 2010 et l’année suivante au Sénat, dont elle a présidé pendant six ans la commission aux affaires économiques.
Dans un rapport transpartisan de juillet 2022 (Cinq plans pour reconstruire la souveraineté économique) elle regrette « le manque de réciprocité de nos échanges, la dégradation de notre empreinte carbone globale en dépit de nos efforts de décarbonation au sein de l’UE et un déficit de transparence et d’évaluation qui accroît la défiance des acteurs économiques ». Elle s’est par ailleurs montrée très critique sur l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur, pas encore signé.
Manque de compétitivité des entreprises
« Les théories du commerce international nous apprennent que le libre-échange permet des gains économiques globaux, mais c’est toujours au détriment de réallocations entre pays, entre entreprises, entre secteurs plus ou moins productifs, déclarait-elle ainsi le 22 janvier, sur la chaîne Public Sénat. A ce jeu, notre agriculture européenne et particulièrement notre agriculture française sont bien souvent perdantes ».
La sénatrice s’est par ailleurs montrée très critique à propos de l’explosion du déficit commercial et du manque de compétitivité des entreprises tricolores à l’international. En 2021, alors que la commission des Affaires économiques du Sénat constatait avec inquiétude la nouvelle dégradation du solde du commerce extérieur pour l’année 2020, sa présidente estimait que « au‑delà des nécessaires mesures de soutien d’urgence prises par le Gouvernement, on peine à voir aujourd’hui les leviers susceptibles de redresser le potentiel de croissance de la France, de conquérir de nouveaux marchés et de créer de l’emploi ».
Protection sociale des Français de l’étranger
La situation du commerce extérieur s’est cependant légèrement améliorée ces derniers mois en raison de la baisse des prix de l’énergie qui plombaient la balance commerciale, mais aussi du retour en force de l’aéronautique à l’export. Au cours des six premiers mois de l’année, le déficit s’est réduit à 39,7 milliards d’euros, après 45,2 milliards au second semestre 2023. Par ailleurs, selon la DG Trésor, la demande mondiale adressée à la France va enregistrer une hausse de 3,6 % en 2025. Malgré ces bonnes nouvelles, la nouvelle ministre déléguée devra batailler pour augmenter les parts de marché de la France à l’international.
Enfin, des dossiers relatifs aux Français de l’étranger attendent la nouvelle ministre déléguée sur son bureau, tels l’organisation des assises de la protection sociale (actée par le gouvernement Attal), la montée en puissance des écoles françaises avec un objectif de 700 élèves ou encore la fiscalité (notamment sur le prélèvement de la CSG-CRDS).
Très critique sur l’explosion du déficit commercial et sur la difficulté des entreprises à demeurer compétitive face à la concurrence internationale, Sophie Primas va désormais avoir toute latitude pour tenter de redresser la barre. Si le gouvernement de Michel Barnier tient, ce qui pour l’heure reste incertain.
Dans l’immédiat, elle va devoir rassurer les acteurs de l’écosystème du commerce extérieur inquiets sur l’avenir de certain programmes de soutien à l’heure où la priorité affichée par le nouveau gouvernement est de réduire le déficit budgétaire : quid, par exemple, du plan de soutien Osez l’export lancé l’an dernier par un de ses prédécesseurs, Olivier Becht ? Ou encore du volet export de France 2030 ? Les Conseillers du commerce extérieur (CCE) viennent, dans un post sur Linkedin, de réclamer leur maintien.
Sans compter les demandes urgentes de certaines filières comme celles de l’armagnac et du cognac, menacées par les représailles chinoises dans le cadre des tentions Union européenne-Chine sur les voitures électriques, ou encore celles du secteur agricole/agroalimentaire, exprimées par le collectif Export & Souveraineté alimentaire, inquiet du déclin de l’appareil exportateur français.
En attendant, un autre sujet urgent l’attend d’ores et déjà : trouver un remplaçant à Laurent Saint-Martin, qui a fait son entrée au gouvernement en tant que ministre du Budget directement rattaché à Matignon et laisse donc la direction générale de Business France vacante (lire également notre rubrique Ecosystème export). Les candidatures ne devraient pas manquer…
Sophie Creusillet
avec Christine Gilguy