Est-ce la perspective de l’élection présidentielle ? Est-ce une marque d’hésitation face aux pressions de certaines entreprises américaines impactées ? Le fait est que le Représentant américain au Commerce (USTR) n’a toujours pas rendu sa décision définitive concernant les hausses de droits de douane annoncées le 14 mai dernier par l’administration Biden.
[Mis à jour le 12/09/2024, 09H00]
Un retour en arrière s’impose. Le 14 mai dernier, au titre de la section 301 de la Loi américaine sur le commerce de 1974, le président Biden annonçait la forte augmentation, à compter du 1er août 2024, des droits de douanes ciblant environ 18 milliards de dollars de produits fabriqués en Chine jugés stratégiques : à 100 % sur les véhicules électriques, à 50 % sur les semi-conducteurs et les cellules photovoltaïques, et à 25 % sur les batteries lithium-ion et certains autres produits tels que l’acier, l’aluminium et les grues portuaires dans les prochains jours.
Parmi les motifs invoqués par la Maison Blanche pour cette décision, les « pratiques déloyales » de la Chine, englobant les transferts de technologie forcés, le vol de propriété intellectuelle et d’innovation, ainsi que le fait « d’inonder le marché mondial avec des exportations dont les prix sont artificiellement maintenus bas », une allusion évidentes aux surcapacités des usines chinoises.
1100 commentaires publics examinés par l’USTR
Mais la mise en œuvre des nouveaux tarifs se fait attendre. Fin août, le représentant américain au Commerce a fait savoir à la presse qu’il continuait à travailler sur la finalisation des mesures. C’est que celles-ci, présentées par la Maison Blanche comme visant à protéger les entreprises et les travailleurs américains, divisent les milieux d’affaires Outre-Atlantique. L’USTR a ainsi reçu près de 1100 commentaires publics, dont certains sont favorables aux mesures, et d’autres les rejettent en estimant qu’ils impacteront négativement l’économie américaine. Ils sont encore en cours d’examen.
« Les partisans des droits de douane se plaignent de la surcapacité et du dumping chinois – des questions que la secrétaire au Trésor Janet Yellen a soulevées avec Pékin, résume l’agence Bloomberg dans une newsletter hedbdomadaire. Les opposants soutiennent que six ans de droits de douane ont peut-être réduit la dépendance des États-Unis à l’égard des produits chinois, mais que cela ne s’est pas traduit par des gains d’emplois importants aux États-Unis ou par un transfert de production dans le pays ». De fait, l’administration Biden s’est bien gardée de revenir sur les hausses tarifaires décidées à partir de 2018 par l’ancien président Trump.
Dans ce contexte, certains observateurs estiment que les tergiversations de l’administration Biden visent à gagner du temps à quelques semaines des élections américaines et à peaufiner le ciblage des produits qui seront soumis à des hausses de tarif. Car si le candidat républicain Donald Trump n’a jamais varié dans sa position favorable à l’usage de l’arme douanière, sa rivale démocrate, Kamala Harris, n’a pas encore exposé en détail sa vision de la politique commerciale. Et le camp démocrate ne voudra certainement pas apparaître comme moins ferme que son adversaire.
En attendant, cette hésitation américaine pourrait nourrir le débat en Europe entre les partisans de la fermeté sur les hausses de tarif envisagés sur les Véhicules électriques Made in China soupçonnés de bénéficier de subventions massives, et ceux qui en contestent l’efficacité. Lors d’un déplacement en Chine le 11 septembre, le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez a déclaré à la presse que « nous devons tous reconsidérer, non seulement les États membres, mais aussi la Commission, notre position vis-à-vis de ce mouvement », cité par le Financial Times. « Nous n’avons pas besoin d’une autre guerre, dans ce cas d’une guerre commerciale. »
A suivre…
C.G.