Le coup d’envoi officiel des négociations destinées à approfondir et à développer les relations bilatérales entre l’Union européenne et la Suisse a été officiellement donné le 18 mars, trois ans après leur suspension. Il y avait urgence alors que la Suisse est un partenaires important de l’UE et qu’elle multiplie les initiatives pour développer ses accords commerciaux.
Il n’est plus question d’un « accord cadre » global, sur le modèle de ceux que cherche à conclure l’UE avec les pays tiers (Canada, Nouvelle Zélande…) mais dont la Suisse n’avait pas voulu il y a trois ans, mais plutôt d’ un « vaste ensemble de mesures destiné à approfondir et à développer les relations entre l’UE et la Suisse » selon les termes du mandat validé par le Conseil de l’UE le 12 mars et utilisé dans le communiqué de la Commission européenne. La Confédération suisse avait pour sa part adopté son mandat de négociation le 8 mars.
Les deux blocs menaient depuis mars 2022 des discussions exploratoires sur l’avenir de leurs relations bilatérales. Le 15 décembre 2023, la Commission et le Conseil fédéral ont publié la « convention d’entente » qui fournit un compte rendu écrit de l’issue de ces discussions exploratoires.
D’après les détails fournis par la Commission, l’objectif des négociations qui s’ouvrent est de « moderniser et d’approfondir » les relations bilatérales entre l’UE et la Suisse, à « garantir des conditions de concurrence équitables entre les entreprises opérant sur le marché intérieur » et à « garantir la protection des droits des citoyens de l’UE en Suisse, y compris l’absence de discrimination entre les citoyens de différents États membres ».
Le train de propositions sur la table contient les principaux éléments suivants :
-des dispositions institutionnelles à intégrer dans les accords existants et futurs avec la Suisse relatifs au marché intérieur, prévoyant un alignement dynamique sur le droit de l’Union, son interprétation et son application uniformes, et un mécanisme de règlement des différends;
-un accord permettant la participation de la Suisse aux programmes de l’Union, y compris le vaste programme de financement de la recherche et de l’innovation Horizon Europe;
-un accord sur la contribution financière régulière et permanente de la Suisse à la cohésion économique et sociale dans l’UE en contrepartie de sa participation au marché intérieur;
-une relance des négociations en vue d’accords dans les domaines de l’électricité, de la sécurité alimentaire et de la santé et de la participation de la Suisse aux agences de l’UE pour le programme spatial et pour les chemins de fer.
De forts liens économiques et commerciaux
L’enjeu est loin d’être négligeable. L’UE et la Suisse sont des voisins proches, qui entretiennent des liens transfrontaliers très étroits, la France étant particulièrement concernées. Sans évoquer les imbrications étroites des tissus économiques de part et d’autre, les seuls échanges commerciaux en témoignent. Avec un volume d’échange de biens de l’ordre de 326 milliards de francs suisses (FCH), soit à peu près la même chose en euros, l’UE est le premier partenaire commercial de la Suisse, représentant en 2022 50 % de ses importations (170 Mds CHF) et 41 % de ses exportations (156 Mds CHF). Quant à la Suisse, elle est le quatrième partenaire de l’UE.
Concernant la France, la Suisse est un partenaire clé. Sur le seul plan du commerce extérieur, avec des échanges de biens fortement excédentaires (4 Md EUR en 2023). Les exportations françaises ont atteint 20,9 Md EUR en 2023, pour 16,9 Md EUR d’importation. La France est le troisième partenaire commercial de la Suisse dans l’UE, derrière l’Allemagne et l’Italie.
Par ailleurs, environ 1,5 million de citoyens de l’UE vivent en Suisse, et environ 450 000 citoyens suisses vivent dans l’UE. Plusieurs centaines de milliers de citoyens de l’Union franchissent quotidiennement la frontière pour travailler en Suisse. On peut d’autant plus se réjouir de la reprise des négociations que la Confédération helvétique a montré ces derniers mois sa volonté de diversifier et dynamiser ses partenaires commerciaux, comme en témoigne l’abolition récente d’une partie de ses tarifs douaniers et sa participation, à travers l’AELE, à un accord commercial d’ampleur avec l’Inde.
C.G