Sujets d’une conférence de FranceAgrimer pendant le Salon de l’agriculture, le Japon et la Corée du Sud, les deux pays les plus développés d’Asie, dépendent en grande partie des importations pour nourrir leur population. Ils ont également en commun une ouverture sur les produits étrangers et des possibilités d’y faire des affaires malgré une conjoncture négative. Revue de détail.
« Le gouvernement japonais se tourne de plus en plus vers d’autres pays pour se prémunir des ‘ coups durs ‘, et c’est un vrai changement que l’on observe également dans les semences et d’autres produits », s’enthousiasme Jérôme Perdreau, conseiller aux affaires agricoles pour le Japon et la Corée du Sud à la direction générale du Trésor. Pourtant, le Japon importe déjà les deux tiers de ses besoins alimentaires.
Les entreprises françaises se sont fait une place de longue date dans les produits laitiers ainsi que les vins et spiritueux. « Le Japon, très dépendant des importations, a conclu 21 accords de libre-échange dont un avec l’Union européenne en 2019, ce qui, dans le vin, nous met sur un pied d’égalité avec ses autres partenaires grâce à l’absence de droits de douane », explique le conseiller.
Des importations en hausse de 30 % vers le Japon
En 2023, les entreprises françaises y ont exporté pour 2 milliards d’euros (Md EUR) de produits agroalimentaires et agricoles, contre 1,4 Md EUR l’année précédente, soit une hausse de 30 %. La France est le premier fournisseur européen dans ce secteur et le neuvième au niveau mondial. Une performance dans un contexte largement défavorable : même si elle n’atteint « que » 2,5 %, l’inflation est un phénomène nouveau au Japon qui a bouleversé les habitudes de consommation.
En outre, le taux de change n’est pas spécialement favorable aux exportateurs français puisqu’il faut aujourd’hui 160 yens pour un euro quand il en fallait 130 avant le début de la guerre en Ukraine, ce qui avantage nettement les produits locaux.
L’hôtellerie-restauration, secteur de choix pour diffuser ses produits, a grandement souffert de la pandémie de Covid 19, rappelle Jérôme Perdreau : « Les deux tiers des restaurants n’ont pas rouvert après la pandémie, mais la reprise de l’hôtellerie qui accueille 30 millions de visiteurs par an donne de l’optimisme ».
Le marché nippon, transparent mais exigeant
Surtout, la bonne image de la gastronomie et de l’agriculture françaises ne se dément pas dans l’Empire du soleil levant. Pays ouvert de longue date aux cultures étrangères, le Japon est une destination phare pour les vins et spiritueux et l’épicerie fine. Il est ainsi le troisième client international du champagne. Et la réglementation nippone est à l’image des consommateurs locaux : exigeante.
« C’est un marché exigeant, mais prévisible et transparent », résume Claudine Girardo. La conseillère agricole adjointe et référente SPS (sanitaire et phytosanitaire) à la DG Trésor conseille néanmoins de soigner le relationnel avec l’importateur qui pourra s’avérer utile en cas de blocage à la frontière. « Il faut en général fournir beaucoup d’éléments pour les formalités mais il est très important de faire au maximum pour y répondre. »
Même si l’histoire de la Corée du Sud, un des pays les plus pauvres au monde encore dans les années 1960, diffère de celle de son voisin nippon, son marché n’est pas si différent. L’appétence pour le Made in France y est forte, le pays dépend des importations pour nourrir sa population, l’ouverture a grandi avec la pandémie et les consommateurs font de plus en plus attention à leurs dépenses en raison de l’inflation et d’un fort surendettement des ménages.
L’e-commerce alimentaire a explosé en Corée du Sud
Ce qui n’a pas empêché la France, dont la Corée du Sud est le quatrième client en Asie, d’y exporter pour 600 millions d’euros de produits agroalimentaires et agricoles en 2023. Là encore les vins et spiritueux dominent (35 % des ventes), suivis des produits laitiers, essentiellement du beurre et du lait pour la transformation.
Pays de plus en plus ouvert -il a aussi signé un accord de libre-échange avec l’UE-, il conserve cependant de vieux réflexes. « Les ventes en ligne de produits agroalimentaires et de vins et spiritueux ont explosé lors de la pandémie, explique ainsi Jérôme Perdreau. Il existe cependant des barrières non tarifaires : on peut vendre de l’alcool en ligne mais uniquement à condition qu’il soit coréen. » Ce canal de distribution n’en demeure pas moins intéressant selon le conseiller.
Sophie Creusillet
Les négociations en cours dans les viandes
Avec le Japon :
– L’accord de zonage pour la peste porcine africaine est en bonne voie. Un groupe d’experts japonais a fait le déplacement fin janvier et devrait donner sa validation.
– Concernant la vaccination des volailles contre la grippe aviaire, des négociations vont pouvoir commencer après unen première évaluation des autorités japonaises. En attendant, un agrément peut-être demandé pour les ovoproduits traités thermiquement.Avec la Corée du Sud :
– L’Assemblée nationale coréenne a validé en décembre dernier l’autorisation d’accès au marché pour la viande bovine en provenance de France et d’Irlande après avoir entamé la réouverture de son marché aux importations de l’UE en levant les restrictions liées à l’encéphalopathie spongiforme bovine pour la viande bovine danoise et néerlandaise. Le dossier doit à présent être renvoyé au ministère sud-coréen de l’Agriculture pour finaliser les démarches administratives. En outre, le processus d’importation de viande bovine en Corée du Sud comprend une délibération à l’Assemblée nationale.
– Des négociations sont en cours pour parvenir à des accords de zonage sur les volailles et le porc.