Quatre dirigeants de société sont venus témoigner de leur expérience de l’international lors de la présentation du plan export par Olivier Becht, le 31 août dernier. Au-delà de leurs succès à l’export, leurs témoignages de terrain soulignent les bénéfices et les points d’amélioration du dispositif de soutien français.
Elizabeth Ducottet a la bosse de l’internationale. C’est sous l’impulsion de cette représentante de la cinquième génération de dirigeants de Thuasne que l’entreprise familiale spécialiste du matériel médical orthopédique s’est projetée à l’international où elle réalise aujourd’hui 50 % de son chiffre d’affaires (265 millions d’euros en 2022) et affiche une présence commerciale dans 85 pays. Aux manettes de l’entreprise depuis une trentaine d’année, elle a fait de cette entreprise née en 1847 le leader européen des orthèses avec quinze filiales en Europe, deux aux Etats-Unis et une en Chine.
« Je suis particulièrement fière de notre conquête des marchés d’Europe de l’Est, d’autant que les entreprises allemandes y sont très présentes », a confié la directrice générale qui a plusieurs fois souligné la nécessité de « chasser en meute ». Preuve que le dispositif de soutien à l’internationalisation des entreprises n’est pas seulement réservé aux PME et ETI et que la concurrence n’a pas que du mauvais, Thuasne, qui compte quelque 3000 collaborateurs dans le monde, a pris le leadership du Club franco-allemand « Tech & Fab for Good – Santé » lancé en 2021 par Bpifrance. L’objectif ? Rapprocher les dirigeants d’entreprises familiales industrielles des deux bords du Rhin afin de susciter des opportunités de coopération et de renforcer les filières dans les deux pays.
Le dispositif bénéficie à des entreprises de toutes tailles
Mathieu Carras, représentait quant à lui l’univers des startups. MirSense, spécialiste des lasers à cascade quantique, est née en 2015 à partir de travaux menés au III-V Lab (groupement d’intérêt économique entre Thalès, Nokia et le CEA) et à l’université de Montpellier (IES). Ses capteurs sont utilisés dans l’industrie, l’environnement et la défense pour contrôler des émissions de gaz et détecter des substances dangereuses.
Exporter 80 % de sa production n’empêche pas de continuer à se faire accompagner, y compris dans un secteur de niche. Pour aborder le marché américain, particulièrement concurrentiel et dont la conquête coûte toujours cher à une entreprise quel que soit le secteur, la jeune pousse de 20 salariés a décidé de participer prochainement à un bootcamp sur place organisé par Business France.
Un dispositif de soutien qui doit encore se faire connaître
Le témoignage de Xuan Dang, directrice commerciale de Micronor, a souligné la nécessité pour la Team France Export de prendre son bâton de pèlerin pour informer les entreprises des possibilités d’accompagnement à l’export. Embauchée en 2017 par ce spécialiste de l’application des métaux précieux pour la bijouterie et des technologies de pointe pour l’industrie, l’aéronautique et le domaine militaire, la directrice commerciale a propulsé l’entreprise à l’export.
« Quand j’ai pris mon poste, je ne connaissais pas du tout le dispositif de soutien aux entreprises qui veulent s’internationaliser, a-t-elle témoigné. C’est grâce à la CCI que je l’ai découvert. Nous avons également été approchés par les équipes de Business France sur le salon du Bourget. » Suite à divers accompagnements, la part de l’international dans le chiffre d’affaires global de cette société de 50 salariés est passé de 3 % à 30 %.
Un appel à la mobilisation des banques
Enfin, Philippe Matière, qui dirige l’entreprise éponyme spécialiste des ponts mobiles et des marchés difficiles (la société a par exemple livré 30 installations en Ukraine), a ouvert une piste de réflexion sur les stratégies d’internationalisation des entreprises françaises à l’étranger. « Nous avons signé en mars en contrat en RDC et nous réfléchissons à confier à des partenaires locaux une partie de la production. Si nous ne donnons pas du travail aux jeunes de pays en difficulté dans le cadre de ces contrats d’autres le feront à notre place, américains ou indiens. » Pour le dirigeant, il ne s’agit pas de délocaliser la production mais de la prolonger sur place. Et de créer un argument de poids auprès des donneurs d’ordres.
En outre, Philippe Matière que les banques françaises se désengagent du continent africain. « Récemment, quatre banques ont été reprises par des établissements américains en Afrique. Bpifrance ne peut pas faire toute seule et les banquiers doivent l’aider », a-t-il plaidé. Une proposition largement applaudie par l’assistance composée de membres de la TFE et de chefs d’entreprises.
Sophie Creusillet